L’histoire

L’HISTOIRE

En 1962, le Général Né Win s’empare du pouvoir et nationalise les écoles. Ainsi le régime militaire a-t-il placé l’éducation sous son contrôle. Depuis, les gouvernements successifs ont sévèrement restreint les initiatives pédagogiques et les libertés académiques au Myanmar. La loi martiale a été largement mise à profit pour museler les mouvements des étudiants comme ceux des professeurs. Les autorités militaires ont, en outre, développé une idéologie anti-intellectuelle. L’enseignement, en ce pays, a souffert de nombreuses années d’isolationnisme, de stagnation et de répression. Les universités ont été fermées durant de longues périodes, à chaque premier signe de troubles, en particulier.

LA STRUCTURE ACTUELLE

Deux lois de la fin des années soixante [1] structurent l’enseignement actuel. Elles stipulent que l’enseignement primaire dure 5 ans (de l’école maternelle jusqu’à l’âge de 9 ans, environ). Les enfants capables de continuer après l’école primaire peuvent suivre pendant 4 ans l’école secondaire moyenne, puis le lycée, durant deux autres années. Les meilleurs sont en principe admis à passer l’examen d’entrée à l’université.

L’enseignement à l’école primaire est théoriquement gratuit et obligatoire. L’école primaire, en réalité, ne parvient pas à donner à tous les enfants un enseignement fondamental et coûte très cher. Les parents, en effet, sont obligés de supporter des frais importants pour l’achat de livres, de papier, de crayons, etc.. Ils doivent verser une contribution annuelle à l’Association des Parents et des Professeurs ainsi que d’autres pour la modernisation de l’école [2]. Envoyer ses enfants à l’école entraîne, dés lors, pour la plupart des familles de lourdes privations. Selon une étude faite par l’Unicef en 1995, 39% des enfants scolarisables n’ont jamais fréquenté l’école primaire. Un élève sur quatre, en moyenne, termine le cycle primaire et 2% des enfants seulement, qui entrent en primaire, terminent des études de niveau universitaire...

A la fin des années 90, la junte consacrait 0,5% du Produit National Brut à l’enseignement tandis que les pays voisins y consacraient en moyenne 2,7% [3].

A cela s’ajoute le problème des minorités ethniques dont le birman n’est pas la langue maternelle, alors que lui seul est autorisé. De multiples manquements dans l’enseignement en ont gravement abaissé le niveau. En règle générale, il y a une école pour 5 villages. Mais dans les régions frontalières où vivent la plupart des minorités ethniques, on n’en compte plus qu’une pour 25. Cette pénurie de ressources concrètes trahit l’attitude officielle qui attache peu d’importance à la valeur de l’enseignement et voit dans la connaissance un dangereux instrument entre les mains du peuple.

Le statut de fonctionnaire interdit aux enseignants de prendre part à une quelconque activité politique. Les syndicats d’enseignants et d’étudiants sont interdits au Myanmar. Les enseignants sont, en revanche, encouragés à rejoindre l’USDA [4] , une organisation fondée et contrôlée par la junte [5]. Comme d’autres fonctionnaires, ils sont soumis à un questionnaire qui leur demande de donner leur opinion sur un grand nombre de sujets sensibles tels que Aung San Suu Kyi, le communisme, les Etats-Unis, la C.I.A.... Ceux qui ne répondent pas de façon satisfaisante sont révoqués. Plusieurs milliers d’enseignants et des centaines de professeurs d’université ont ainsi été renvoyés en 1991 et en 1992 pour avoir émis des opinions contraires à celles du gouvernement militaire.

Par ailleurs, bien des enseignants, indépendamment de leurs engagements, quittent la profession, car leur salaire de fonctionnaire ne leur permet pas de subvenir à leurs besoins. Un enseignant gagne en moyenne 4 € par mois [6] par mois. Beaucoup d’entre eux peuvent gagner dix fois plus en donnant des cours privés.

En 1998, la junte a supprimé les examens dans 9210 écoles (le pays en compte 40.450) et les a remplacés par un système d’évaluation continue. Mais, comme la corruption règne en maître, il suffit à un élève, à la fin de la cinquième année, d’être membre de l’UDSA pour obtenir automatiquement un 16/20 et ainsi réussir.

LE DROIT A L’ENSEIGNEMENT

A l’heure actuelle l’enseignement supérieur est réservé à une élite, d’autant plus que la classe moyenne a tendance à disparaître. Dans les régions rurales, l’accès à l’université est excessivement difficile en raison de la pauvreté des familles et du coût élevé des études.

D’autres facteurs sociaux influencent cet accès. Ainsi, seule une élite issue des familles de généraux et de leurs amis peut entrer aisément dans les écoles supérieures ou suivre des cours à l’étranger.

En outre, les filières d’enseignement dans le secondaire supérieur conditionnent drastiquement l’orientation des études universitaires. A la sortie de l’année « Standard Eight » de l’école secondaire moyenne, c.-à-d. à l’âge de 13 ans, les élèves doivent, en effet, choisir entre 7 groupes de matières :

 Mathématiques, physique, chimie, économie, Birman et Anglais.
 Mathématiques, géographie, histoire, économie, Birman et Anglais.
 Mathématiques, géographie, histoire, Birman, Birman approfondi et Anglais.
 Mathématiques, histoire, économie, Birman, Birman approfondi et Anglais.
 Mathématiques, histoire, physique, chimie, Birman et Anglais.
 Mathématiques, physique, chimie, Birman, Birman approfondi et Anglais.
 Mathématiques, physique, chimie, biologie, Birman et Anglais.

Ainsi, le choix que l’élève effectue à 13 ans limite-t-il singulièrement les options universitaires ultérieures. Seuls, par exemple, ceux qui suivent la filière n°7 pourront envisager des études de médecine. Ils ne pourront, du même coup, opter pour les sciences économiques.

De plus, l’école secondaire est essentiellement ordonnée à la préparation à l’enseignement supérieur et non au monde du travail et à la vie active. L’enseignement prodigué, enfin, se donne uniquement en Birman. Ce qui revient à une assimilation forcée au nom de l’unité nationale. En 1972, le NMSP (New Mon State Party) avait ouvert des écoles dans les régions qu’il contrôlait. Mais, en 1998, 1200 de ces écoles, fréquentées par 60.000 élèves, ont dû fermer.

A tout cela s’ajoutent la dégradation du statut des enseignants, le manque cruel de matériel scolaire (4 grammaires anglaises pour 60 élèves) l’absence de laboratoires et de bibliothèques. Les programmes ne sont pas remis à jour (peu de changements ont été apportés au système mis en place par les Anglais, il y a 100 ans). Les méthodes d’enseignement sont inadaptées.

Autres problèmes tout aussi graves : le manque d’enseignants et leur manque de formation pédagogique : 57% des enseignants du primaire, 58% de ceux du secondaire et 9% de ceux du secondaire supérieur n’ont aucune formation pédagogique.

On tente de remédier à cette réalité en leur donnant l’occasion de se former tout en travaillant. Mais ceux qui obtiennent les moins bons résultats sont envoyés dans les écoles primaires. D’où la dévalorisation de l’éducation primaire alors qu’elle constitue la base du développement futur des enfants.

LES UNIVERSITES

La plupart des Hautes Ecoles et des Universités ont été réouvertes en 2.000. Entre juin 1988 et juillet 2000 les universités étaient ouvertes pendant 36 mois seulement. Le régime fermait les universités chaque fois que les étudiants manifestaient. Mais, après 13 ans d’interruptions régulières dans les cours, on se trouve devant une population de jeunes qui a perdu le goût d’apprendre et recherche des satisfactions immédiates.

A partir de juillet 2000 le régime changea de tactique pour écraser les soulèvements d’étudiants. Alors qu’avant la junte fermait les universités et arrêtait ou chassait les chefs étudiants, elle s’appliqua à séparer les universités en les délocalisant dans des endroits éloignés, tout en poursuivant les chefs étudiants. Plus de 800 étudiants sont emprisonnés avec des condamnations variant de 3 à 59 ans.

De ce fait les étudiants ont été dispersés. Certains campus sont si éloignés et les transports si onéreux que des étudiants confient à certains d’entre eux le soin de prendre les notes de cours. Seuls sont restés à Rangoon les étudiants en licence. Par ailleurs, l’année académique ne dure que trois mois ! Tous les candidats doivent fournir une attestation de l’autorité locale affirmant qu’ils ne sont pas impliqués dans des activités politiques.

A côté de cet ensemble public ont fleuri des écoles privées. Seuls les enfants de familles riches les fréquentent. A l’école primaire, les frais de scolarisation varient pour un enfant de 500 à 3.000 kyats, dans le secondaire de 3.000 à 5.000 kyats. A l’université, le coût mensuel se situe entre 7.000 et 10.000 kyats. Mais, dans les écoles privées, ce sont 70.000 kyats qu’il faut mensuellement débourser.

Notes

[1La loi fondamentale sur l’enseignement du Myanmar de 1966 et la loi sur l’enseignement de l’Union du Myanmar de 1973 ont établi la structure actuelle de l’enseignement.

[2Les parents paient 3.000 Kyats pour l’inscription annuelle et 500 Kyats par mois à l’école.

[3Education Report 2002, Foreign Affairs Committee, ABSFU, page 9.

[4Association Unifiée de Solidarité et du développement.

[5SPDC : State Peace and Developpement Council (Conseil d’Etat pour la Paix et le Développement).

[61 € = 1200 Kyat.
Un enseignant du primaire gagne entre 4.500 et 5.000 kyats par mois ; dans le secondaire entre 5.000 et 5.500 kyats ; à l’université entre 5.500 et 6.000 kyats (données de septembre 2.003).

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