Communiqué de presse

La déclaration des droits humains de l’ASEAN doit être reportée en raison de ses graves défauts

Dans une lettre envoyée aujourd’hui aux chefs d’État de l’ASEAN (L’Association des nations de l’Asie du Sud-Est), des organisations internationales de défense des droits humains demandent que soit reportée l’adoption de la déclaration des droits humains de l’ASEAN, expliquant que dans sa forme actuelle cette déclaration n’est pas conforme aux normes existantes relatives aux droits humains et qu’elle risque ainsi de créer dans la région un niveau de protection rabaissé pour ces droits.

Les principes généraux exposés dans la déclaration sont particulièrement préoccupants. Les principes généraux 6, 7 et 8 de la version actuelle du texte prévoient que la jouissance des droits doit être « contrebalancée par le respect des obligations » en fonction des « contextes nationaux et régionaux » et des considérations liées aux « différents contextes cultuels, religieux et historiques ». De plus, tous les droits énoncés dans la déclaration peuvent être restreints pour toute une série de motifs, y compris pour des questions de « sécurité nationale » ou de « moralité publique ».

« L’idée que tous les droits humains doivent être "contrebalancés" par des responsabilités individuelles est contraire au concept même des droits humains consacré dans la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948, et soutenu par tous les États, y compris par les États membres de l’ASEAN, en 1993 dans la Déclaration et le programme d’action de Vienne », a souligné Wilder Tayler, secrétaire général de la Commission internationale de juristes.

« Contrebalancer les droits humains avec des responsabilités, cela revient à dénuer les droits humains de tout leur sens », a-t-il ajouté.

De plus, le droit international interdit aux gouvernements de déroger, quelles que soient les circonstances, à un vaste ensemble de droits. D’autres droits peuvent dans certaines circonstances être soumis à des restrictions qui doivent cependant être spécifiques, restreintes et clairement définies. Enfin, le droit international soumet tous les États membres de l’ASEAN à l’obligation, quels que soient leurs systèmes politiques, économiques et culturels, de respecter et protéger tous les droits humains et toutes les libertés fondamentales.

« Il est évident que dans sa forme actuelle la déclaration vise à s’éloigner fortement des normes internationales existantes relatives aux droits humains, y compris de celles inscrites dans d’autres instruments régionaux de défense de ces droits en Europe, dans les Amériques et en Afrique », a indiqué Souhayr Belhassen, présidente de la Fédération internationale des droits de l’homme (FIDH).

« À moins que d’importantes modifications ne soient apportées à ce texte, l’ASEAN va adopter en 2012 une déclaration des droits humains qui accorde aux États membres de l’ASEAN de nouveaux pouvoirs pour violer les droits humains, au lieu de mettre en place pour la population de la région de nouvelles protections contre de telles violations », a ajouté Michael Bochenek, directeur du programme Droit et stratégie politique d’Amnesty International.

Ces organisations demandent instamment dans leur lettre que les dirigeants de l’ASEAN renvoient le projet de texte devant la Commission intergouvernementale des droits humains de l’ASEAN et donnent des instructions claires pour qu’il soit modifié dans le cadre d’un processus transparent, réfléchi et exhaustif incluant la pleine consultation de toutes les parties intéressées, afin qu’il ne tombe pas sous le niveau des normes internationalement reconnues en matière de droits humains.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit