La Grèce doit améliorer de toute urgence les conditions de vie déplorables qui prévalent dans les lieux de détention

DÉCLARATION PUBLIQUE

Index AI : EUR 25/006/2011

16 mars 2011

Amnesty International a demandé aux autorités grecques d’agir immédiatement afin d’en finir avec les conditions de détention déplorables que connaissent les ressortissants étrangers privés de leur liberté et les prisonniers ; elles sont dans de nombreux cas si mauvaises qu’elles constituent un traitement cruel, inhumain ou dégradant. La Grèce doit immédiatement cesser de placer systématiquement en détention des ressortissants étrangers au seul motif de leur situation au regard de la législation sur l’immigration.

L’appel d’Amnesty International fait suite à la décision exceptionnelle du Comité européen pour la prévention de la torture et des peines ou traitements inhumains ou dégradants (CPT) d’adopter une déclaration publique mardi 15 mars. Il s’agissait d’une réaction à l’inertie de la Grèce face aux vives préoccupations exprimées par le Comité, concernant les conditions de détention de migrants en situation irrégulière et l’état du système carcéral du pays. En particulier, le CPT a déploré que la Grèce continue à manquer à son obligation de remédier aux graves défaillances du régime de détention, aux conditions de détention de migrants en situation irrégulière, ainsi qu’à la détérioration constante des conditions de vie des prisonniers du pays et au traitement qui leur est réservé.

Amnesty International rappelle aux autorités grecques qu’incarcérer des personnes dans des conditions cruelles, inhumaines ou dégradantes est une violation du droit international en matière de droits humains.

L’organisation exhorte les autorités grecques à coopérer véritablement avec le CPT afin de prévenir toute atteinte supplémentaire aux droits humains ; cela suppose notamment de mettre en œuvre les recommandations du Comité.

Amnesty International appelle par ailleurs les autorités grecques à :

• Mettre fin à la pratique consistant à placer les demandeurs d’asile en détention, sauf dans les circonstances les plus exceptionnelles et lorsque la décision de les placer ou de les maintenir en détention est conforme aux droit et normes internationaux relatifs aux droits humains et aux réfugiés ;

• Mettre fin à la pratique consistant à placer en détention, pour des raisons ayant uniquement trait à leur statut de migrant, des personnes vulnérables - victimes de la torture, victimes de la traite et enfants, que ceux-ci soient accompagnés ou séparés de leur famille ;

• Cesser d’incarcérer des personnes dans des lieux de détention surpeuplés et/ou offrant des conditions de vie cruelles, inhumaines ou dégradantes, notamment aux postes de surveillance des gardes-frontières et dans d’autres centres de détention de l’immigration, tels que ceux qui seraient situés à Soulfi, Tihero et à l’aéroport d’Athènes ;

• Donner aux détenus une véritable possibilité de contester la légalité de leur détention, notamment au motif que leurs conditions de détention sont cruelles, inhumaines ou dégradantes ;

• Proposer à tous les demandeurs d’asile et aux autres groupes vulnérables : des centres d’accueil adaptés et des conditions de vie conformes aux obligations de la Grèce en vertu du droit relatif aux droits humains et aux réfugiés, et notamment des normes minimales de l’Union européenne ;

• Mettre en œuvre dans les meilleurs délais les réformes législatives récentes relatives au placement en détention des migrants.

Compte tenu des difficultés posées à la Grèce par les « flux migratoires mixtes » ces dernières années, Amnesty International demande également à l’Union européenne et aux pays membres de celles-ci d’aider les autorités grecques à offrir de bonnes conditions d’accueil aux personnes arrivant sur leur territoire et à évaluer leurs besoins en termes de protection.

Complément d’information

Le 15 mars 2011, le CPT a pour la première fois adopté une déclaration publique sur la Grèce. Les déclarations publiques du CPT sont des mesures exceptionnelles prévues par l’article 10(2) de la Convention européenne pour la prévention de la torture. Ce type de déclaration n’avait jusqu’alors été utilisé que cinq fois dans l’histoire du CPT : deux fois en relation avec la Turquie et trois fois en rapport avec la Russie (Tchétchénie).

Lors d’une visite en Grèce en janvier 2011, le CPT a constaté que les informations fournies par les autorités grecques n’étaient pas fiables. Les postes de police et les postes de gardes-frontières continuaient à abriter un nombre sans cesse plus important d’étrangers en situation irrégulière dans de terribles conditions. Le CPT y a observé, entre autres, surpopulation, conditions de détention déplorables et incarcération d’hommes et de femmes dans les mêmes locaux.

Dans les locaux spécialement conçus pour la rétention des étrangers en situation irrégulière de Filakio, dans la région d’Evros, des migrants en situation irrégulière, dont des mineurs et des familles avec de jeunes enfants, étaient enfermés pendant des semaines, voire des mois, dans des cellules comparables à des cages, crasseuses, surpeuplées et insalubres.

Le CPT a également constaté que le centre de détention de l’aéroport d’Athènes continuait à maintenir des personnes en détention dans des conditions similaires à celles que la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme a récemment jugées, dans le cas M.S.S. c. Belgique et Grèce, comme étant contraires à la Convention européenne des droits de l’homme parce qu’elles s’apparentaient à un traitement dégradant.

Le CPT a par ailleurs fait état d’« une détérioration constante des conditions de détention et du traitement des détenus pendant la dernière décennie. »

Si la Grèce a adopté des réformes législatives sur le placement en détention des migrants, avec sa loi sur l’asile, les centres d’accueil et la transposition de la directive de l’UE sur les retours, en janvier 2011, Amnesty International est préoccupée par les informations persistantes selon lesquelles : des migrants et des demandeurs d’asile continuent à être systématiquement placés en détention ; et les personnes se trouvant dans de nombreux centres de détention de l’immigration sont incarcérées dans des conditions cruelles, inhumaines et dégradantes.

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