La Syrie doit libérer le prisonnier d’opinion Ali al Abdullah

DÉCLARATION PUBLIQUE

4 février 2011 -

Index AI : MDE 24/004/2011

Amnesty International demande aux autorités syriennes de libérer immédiatement et sans conditions le journaliste et militant politique Ali al Abdullah, qui doit comparaître devant un tribunal militaire de Damas le 7 février. Il est accusé d’avoir « altéré les relations de la Syrie avec un autre pays », en raison de propos qu’il a tenus à une agence de presse au sujet des élections au Liban et en Iran.

Amnesty International considère Ali al Abdullah comme un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exprimé pacifiquement ses opinions. L’organisation exhorte les autorités à le relâcher mais également à abandonner les charges pesant contre lui, car elles ne correspondent pas à une infraction dûment reconnue par le droit international.

Le 17 juin 2010, Ali al Abdullah a fini de purger une peine de 30 mois de prison ; or, au lieu de le libérer, les autorités l’ont renvoyé devant un tribunal militaire. Le 19 septembre, un juge d’instruction militaire l’a inculpé d’« altération des relations de la Syrie avec un autre pays » (en vertu de l’article 278 du Code pénal), infraction passible de 15 ans d’emprisonnement.

Cette accusation est en relation avec des déclarations qu’il a faites au téléphone à l’agence de presse italienne AKI en juin 2009 ; il a ainsi parlé très favorablement des élections ayant eu lieu au Liban, puis critiqué le recours des autorités iraniennes à une force excessive contre les personnes qui manifestaient de manière pacifique ce mois-là contre les résultats contestés de l’élection présidentielle.

Il est prévu que l’audience du 7 février se déroule devant la Deuxième cour pénale militaire, à Damas. Amnesty International craint que le droit d’Ali al Abdullah à un procès équitable ne soit gravement bafoué. Jusqu’à présent, ses avocats n’ont pas été en mesure de le voir sans qu’un membre des forces de sécurité n’écoute leurs conversations. Ils n’ont en outre pas eu la possibilité de consulter l’intégralité du dossier.

Ali al Abdullah a précédemment été emprisonné à quatre reprises. Il a passé six mois en détention à son retour en Syrie dans les années 90, après avoir vécu à l’étranger. Il a purgé une peine de près de six mois de prison en 2005 pour son implication au sein du groupe de discussion interdit Jamal al Atassi, après avoir lu lors d’une réunion une déclaration du dirigeant exilé des Frères musulmans qui appelait au respect du pluralisme et des droits humains en Syrie.

En 2006, il a passé six mois en prison pour avoir pris part à une action de protestation devant la Cour suprême de sûreté de l’État, dont les procédures sont loin d’être conformes aux normes internationales d’équité en la matière. En décembre 2007, il a été condamné à une peine de 30 mois de prison pour son rôle au sein de la Déclaration de Damas pour le changement national démocratique, une large coalition d’opposition.

Ali al Abdullah n’est pas le seul membre de sa famille à avoir été emprisonné par les autorités syriennes ; cependant, comme il est le principal soutien financier de sa famille, sa détention cause des difficultés particulières à ses proches. Un de ses fils, Omar Ali al Abdullah, purge actuellement une peine de cinq ans de prison après avoir fait l’objet d’un procès inique devant la Cour suprême de sûreté de l’État en 2007 ; à l’issue de ce procès, lui-même et six autres jeunes gens ont été condamnés pour avoir milité en faveur d’une réforme politique pacifique. Le frère aîné d’Omar, Mohammad Ali al Abdullah, qui a lui aussi été incarcéré à deux reprises, a choisi l’exil. Leur mère, et épouse d’Ali al Abdullah, Omaya Abbas, est morte d’un cancer le mois dernier ; ni Ali al Abdullah, ni ses fils n’ont pu assister à son enterrement.


Complément d’information

En Syrie, les libertés d’expression et d’association sont étroitement contrôlées par les autorités, qui continuent à se servir des pouvoirs conférés par l’état d’urgence pour punir et museler leurs détracteurs, et notamment les militants politiques, les défenseurs des droits humains, les blogueurs et les militants défendant les droits de la minorité kurde. Ceux qui critiquent le pouvoir sont victimes d’arrestations arbitraires et placés en détention pendant de longues périodes sans procès, ou emprisonnés au terme de procès iniques se déroulant devant la Cour suprême de sûreté de l’État ou des tribunaux militaires ou pénaux.

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