La torture : une pratique courante de la police

Les autorités sri-lankaises doivent prendre des mesures décisives pour mettre fin à la torture et aux mauvais traitements, enquêter sur les plaintes et amener les responsables présumés à rendre des comptes, a déclaré Amnesty International le 8 décembre à la suite de la publication des observations finales du Comité contre la torture de l’ONU sur le Sri Lanka.

« Si les autorités sri-lankaises sont déterminées à rompre avec l’héritage d’un conflit qui a déchiré le pays pendant des décennies, elles doivent en finir avec la torture et les mauvais traitements, a déclaré Champa Patel, directrice pour l’Aise du Sud à Amnesty International.

« Le Sri Lanka a pris des mesures importantes et positives. Cependant, nous partageons la préoccupation du Comité contre la torture quant à l’incapacité du Sri Lanka à prévenir la torture et les mauvais traitements imputables aux forces de sécurité et quant au fait que ces crimes se poursuivent. L’impunité perdure pour les auteurs présumés de ces agissements, et pour les responsables de disparitions forcées et de morts en détention. En outre, des informations continuent de faire état du recours aux " aveux " forcés. »

L’ombre persistante du conflit

Dans son évaluation du bilan du Sri Lanka en matière de torture et de mauvais traitements, le Comité contre la torture de l’ONU a déclaré que le conflit armé interne qui a duré 26 ans a des répercussions durables dans le pays.

Malgré les promesses, les autorités n’ont pas enquêté sur les graves violations des droits humains commises durant le conflit armé.

Les violations, toutefois, ne se limitent pas à l’héritage du passé. Le Comité a exprimé ses préoccupations, que partage Amnesty International, sur le fait que la torture imputable à la police demeure « une pratique courante » et que l’absence de garanties cruciales en détention favorise ces violations.

Amnesty International se joint au Comité contre la torture de l’ONU pour demander aux autorités sri-lankaises d’identifier et de poursuivre les auteurs d’homicides illégaux, notamment de cinq étudiants tamouls sur la plage de Trincomalee et de 17 travailleurs humanitaires dans la ville de Muttur en 2006. En outre, Amnesty soutient le Comité dans sa demande de protection par les autorités sri-lankaises de la famille du caricaturiste politique disparu Prageeth Eknaligoda contre le harcèlement et les représailles. Sa famille est prise pour cible parce qu’elle veut obtenir vérité et justice.

« Le gouvernement sri-lankais a précédemment pris l’engagement de remédier aux violations généralisées des droits humains commises durant le conflit armé au Sri Lanka et juste après. Toutefois, il doit encore joindre les actes à la parole en créant les institutions promises, notamment un mécanisme judiciaire doté d’un conseiller spécial, une commission pour la vérité, la justice, la réconciliation et la non-répétition, et un bureau des réparations », a déclaré Champa Patel.

Des progrès importants mais encore trop limités

Amnesty International salue certaines mesures importantes prises par le Sri Lanka, notamment l’adoption de mesures législatives et autres destinées à prévenir la torture et les mauvais traitements. Toutefois, ces initiatives doivent être mises en œuvre de manière efficace, car les responsables en place bénéficient encore de l’impunité.

En outre, les autorités sri-lankaises n’ont pas pris de mesures au sujet des précédentes observations du Comité contre la torture. Des garanties doivent encore être adoptées pour enrayer la torture et les mauvais traitements imputables aux forces de sécurité et, malgré les interdictions contenues dans l’Ordonnance relative à l’administration de la preuve, les tribunaux continuent de retenir à titre de preuve des « aveux » obtenus sous la torture et les mauvais traitements.

Le Comité s’est déclaré préoccupé par le fait qu’un responsable de l’État qui a occupé des fonctions de commandement sur un site tristement célèbre pour la torture et les mauvais traitements qui y étaient pratiqués a fait partie d’une délégation ayant rencontré des représentants de l’ONU à Genève.

« Les autorités sri-lankaises doivent traduire leurs paroles en actes. Le Comité contre la torture a fait une série de recommandations qui doivent être mises en œuvre sans délai. Il faut mettre en place des garanties. Les forces de sécurité doivent savoir que la torture et les mauvais traitements ne seront pas tolérés et toutes les victimes doivent obtenir des réparations », a déclaré Champa Patel.

Autres recommandations

Amnesty International demande aussi aux autorités sri-lankaises de prendre les mesures suivantes, qu’a recommandées le Comité, afin de prévenir la torture et les mauvais traitements :

• mettre fin aux représailles contre les victimes et les témoins de ces crimes ;
• abroger la Loi relative à la prévention du terrorisme, et supprimer le système de détention administrative, y compris sous sa forme de « réinsertion » ;
• garantir que tous les détenus soient rapidement inculpés d’infractions dûment reconnues et présentés devant un juge, ou libérés ;
• veiller à ce que la Division de la protection, que prévoit la loi relative à l’aide aux victimes de crimes et aux témoins et à leur protection, soit une entité autonome, indépendante de la hiérarchie de commandement de la police ;
• veiller à renforcer la capacité du Bureau des personnes disparues, notamment en le dotant d’une expertise médicolégale, afin de lui permettre de mener des enquêtes efficaces ;
• garantir aux détenus la possibilité de consulter rapidement et librement un avocat dès le moment de leur arrestation, notamment lors de l’interrogatoire ;
• ratifier le Protocole facultatif se rapportant à la Convention contre la torture, en vue de permettre une surveillance internationale des lieux de détention et d’instaurer un mécanisme indépendant (Mécanisme national de prévention) chargé de surveiller tous les lieux de détention ;
• garantir aux victimes de la torture et d’autres mauvais traitements des réparations adéquates, notamment sous la forme d’une restitution, d’une réadaptation, d’une réhabilitation et de garanties de non-répétition.

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