Communiqué de presse

Le gouvernement doit veiller à ce que les auteurs présumés de violences policières commises à Bima rendent des comptes

Le gouvernement indonésien doit faire le nécessaire pour amener les responsables présumés de la mort d’au moins trois personnes et des blessures infligées à des dizaines d’autres, lors d’une manifestation pacifique à Bima (dans la province des petites îles de la Sonde occidentales) fin décembre, à répondre de leurs actes.

Si, à l’issue des enquêtes en cours, il apparaît que les forces de sécurité se sont rendues coupables d’homicides illégaux, d’actes de torture ou d’autres formes de mauvais traitements, les responsables présumés, y compris ceux exerçant des fonctions de commandement, devront être traduits en justice dans le cadre de procédures conformes aux normes internationales d’équité, et les victimes devront recevoir réparation.

Le matin du 24 décembre 2011, une centaine de manifestants ont bloqué la route menant au port de Sape, près de Bima, afin de demander la révocation d’un permis d’exploration délivré à une compagnie d’extraction d’or. Ils se disent inquiets au sujet de l’impact sur l’environnement et craignent que le projet ne menace leurs moyens de subsistance. Quelque 600 policiers, dont des membres de la brigade de police mobile et de l’unité d’enquêtes criminelles, ainsi que des agents des renseignements ont été déployés dans la zone portuaire afin de disperser les manifestants. Selon certaines sources crédibles, la police a ouvert le feu et recouru à une force excessive contre les manifestants, tuant au moins trois personnes et en blessant environ 80 autres, parmi lesquelles des femmes et des enfants. La police a plus tard arrêté au moins 56 résidents de Bima pour leur participation à cette action de protestation et pour détention présumée d’armes. D’après des sources locales, au moins 37 se trouvent toujours en détention.

La Commission nationale des droits humains a déterminé dans le cadre d’une enquête initiale que la police semblait avoir commis des violations des droits humains. D’après la Commission, le chef de la police du district de Bima avait donné l’ordre d’employer la force, et des manifestants n’ayant opposé aucune résistance ont reçu des coups de poing et de pied de la part de policiers, qui les ont également traînés par terre. La Commission a par ailleurs recueilli des éléments prouvant que la police avait touché à la scène du crime, en ramassant des cartouches vides éparpillées dans la zone où les coups de feu ont été tirés.

Amnesty International est consciente des difficultés inhérentes au maintien de l’ordre lors de manifestations. Cependant, dans le cas présent, les forces de sécurité ont apparemment bafoué le droit à la vie et le droit de ne pas être soumis à la torture et à d’autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants. Conformément aux dispositions du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, auquel l’Indonésie est partie, il ne peut être dérogé à ces droits en aucune circonstance.

Il semble par ailleurs que ces policiers aient enfreint le règlement indonésien codifiant l’usage de la force par la police (n° 1/2009). Ce texte dispose notamment que la force doit être utilisée uniquement en dernier recours, proportionnellement à la menace et dans le but de ne causer que le minimum de dommages et d’atteintes à l’intégrité physique.

Des procédures disciplinaires internes ont été ouvertes à Mataram, la capitale de la province des petites îles de la Sonde occidentales. Elles ont conclu que cinq policiers avaient bafoué la réglementation pour avoir frappé des manifestants, en leur donnant notamment des coups de pied, lors de manœuvres ayant pour but de les disperser. Ils auraient semble-t-il été sanctionnés de diverses façon – trois jours de détention, réprimandes écrites et report de futures sessions de formation.

Si Amnesty International se félicite que les fautes commises par des policiers donnent lieu à des procédures disciplinaires internes, celles-ci ne devraient jamais remplacer la traduction devant les tribunaux civils des personnes soupçonnées d’infractions impliquant des atteintes aux droits humains.

La direction de la police devrait par ailleurs immédiatement mener une évaluation approfondie des tactiques policières et de l’utilisation des armes dans le cadre des opérations de maintien de l’ordre public, afin de veiller à ce qu’elles soient conformes aux normes internationales, en particulier le Code de conduite des Nations unies pour les responsables de l’application des lois et les Principes de base des Nations unies sur le recours à la force et l’utilisation des armes à feu par les responsables de l’application des lois.

Amnesty International exhorte également les autorités indonésiennes : à mettre en place un mécanisme indépendant de recueil des plaintes contre la police, afin de traiter les violations des droits humains imputées à des policiers ; ou à donner des moyens d’agir à des organes existants, tels que la Commission nationale de la police ou la Commission nationale des droits humains, de sorte qu’elles puissent effectuer des enquêtes indépendantes et soumettre leur conclusions au parquet ou à une instance disciplinaire interne à la police.

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