Communiqué de presse

Le Myanmar doit immédiatement faire face aux besoins humanitaires de la population et s’‘attaquer à la discrimination systémique

Alors que la situation dans l’État d’Arakan (ouest du pays) reste très tendue, les autorités du Myanmar doivent veiller à ce que l’aide humanitaire ait pleinement et librement accès aux personnes déplacées, et diligenter une enquête indépendante et impartiale sur les récentes violences interethniques, a déclaré Amnesty International le 19 juin 2012.

Le gouvernement du Myanmar doit également viser à lever l’état d’urgence dans cet État dès que possible, à faciliter le travail des observateurs internationaux et à s’attaquer à la discrimination systémique dont la minorité ethnique rohingya est victime depuis des décennies.

Les violences généralisées qui ont commencé le 8 juin 2012, et qui concernent au moins huit zones, ont considérablement diminué, mais des atteintes aux droits humains continuent d’être commises parmi les communautés rakhine bouddhiste, rakhine musulmane et rohingya musulmane ; les forces de sécurité se rendent également coupables de ces agissements. Les villes de Maungdaw et Rathidaung sont particulièrement touchées.

D’après le gouvernement, au moins 50 personnes auraient été tuées et plus de 30 000 déplacées à cause des violences. Des milliers de maisons ont été détruites.

Il est urgent de satisfaire les besoins humanitaires essentiels de cette population car une grande partie des habitants manquent de nourriture, d’eau, d’abris et de soins médicaux adaptés. Les autorités du Myanmar doivent permettre aux organisations humanitaires locales et internationales de se rendre pleinement et librement auprès de toutes les personnes déplacées, y compris les quelque 1 500 individus auxquels le Bangladesh a illégalement refusé l’asile la semaine dernière.

Le 18 juin, les gardes-frontières bangladais ont placé en détention au moins 150 hommes rohingyas qui essayaient d’entrer au Bangladesh par la Naf à bord de petits bateaux. Ces personnes fuyaient les gardes-frontières et l’armée du Myanmar qui, depuis le 15 juin, procèdent à un grand nombre d’arrestations, le plus souvent arbitraires, à Maungdaw.

Les causes immédiates de ces événements doivent faire l’objet d’une enquête minutieuse, indépendante et impartiale, et les responsables présumés d’atteintes aux droits humains, y compris parmi les forces de sécurité, doivent être amenés à rendre des comptes.

Amnesty International a aussi noté que les causes qui sous-tendent ces violences sont aussi critiques que leurs conséquences, et que les autorités du Myanmar doivent s’engager à les combattre.

Le travail de l’organisation à travers le monde démontre que les états d’urgence, bien que parfois inévitables, suspendent certains droits même s’ils en protègent d’autres. L’état d’urgence dans l’État d’Arakan doit être levé au plus vite et une équipe d’observateurs internationaux, si possible composée de membres de l’Association des nations de l’Asie du Sud-Est (ANASE), doit être envoyée là où c’est nécessaire.

Étant donné que les communautés rakhine et rohingya sont également en conflit dans le domaine religieux, les observateurs doivent s’efforcer de garantir que la liberté de religion ne sera pas restreinte au nom de la paix interethnique.

Amnesty International a toutefois souligné que réinstaurer le statu quo d’avant les violences ne serait pas suffisant, car la discrimination systémique à l’encontre des Rohingyas est caractéristique des décennies de politique étatique au Myanmar. Des dizaines de milliers de Rohingyas ont été déplacés par les forces de sécurité en 1991 et 1992. Bien que le Myanmar soit partie à la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, ce pays continue de refuser aux mineurs rohingyas le droit à une nationalité. Les individus appartenant à cette minorité ethnique et religieuse ne peuvent obtenir la citoyenneté en vertu de la Loi relative à la citoyenneté de 1982, et des restrictions plus ou moins importantes pèsent sur leurs droits d’étudier, de travailler, de se déplacer, de se marier, de pratiquer leur religion et de recevoir des soins médicaux.

De récentes déclarations faites par d’anciens prisonniers politiques au Myanmar démontrent que cette discrimination est due, et contribue, aux préjugés à l’égard des Rohingyas.

Les autorités du Myanmar doivent accorder à ces individus la citoyenneté à laquelle ils ont droit, et mettre un terme à toutes les politiques et pratiques discriminatoires dont ils sont victimes.

Complément d’information

Le 28 mai 2012, une femme de 27 ans appartenant à la communauté rakhine bouddhiste a été violée puis tuée à Maungdaw. Le lendemain, la police aurait interpellé trois suspects musulmans. Le 3 juin, environ 300 Rakhines ont arrêté un bus à destination de Yangon dans la communauté urbaine de Toungup. Ils pensaient, semble-t-il, que les auteurs du crime étaient à bord et ils ont battu à mort 10 passagers musulmans. Cet événement a provoqué de graves violences interethniques et religieuses qui ont continué jusqu’au 14 juin, bien que le gouvernement ait déclaré l’état d’urgence dans l’État d’Arakan le 10 juin. La situation dans cette région est encore tendue.

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