Le rapport de l’ONU sur le conflit au Sri Lanka doit être rendu public

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

12 avril 2011

Le rapport de l’ONU sur l’obligation de rendre des comptes pour les crimes de guerre commis lors du conflit armé au Sri Lanka doit être rendu public, a déclaré Amnesty International mardi 12 avril, alors qu’un groupe d’experts remet ses conclusions au secrétaire général Ban Ki-moon.

« Les Sri Lankais doivent avoir connaissance des conclusions du groupe d’experts. Ce rapport porte sur une période critique de leur histoire récente et ils ont le droit de le lire dans son intégralité, a estimé Sam Zarifi, directeur de la région Asie-Pacifique d’Amnesty International.

« Ban Ki-moon a déclaré que l’obligation de rendre des comptes était un fondement essentiel d’une paix durable et de la réconciliation au Sri Lanka. Il doit rester fidèle à ses propos : rendre des comptes pour les violations commises dans le cadre du récent conflit est la première étape vers une future réconciliation. »

Le groupe d’experts des Nations unies a été nommé en juin 2010 pour conseiller le secrétaire général sur les questions de responsabilisation en lien avec les violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains qui auraient eu lieu pendant les dernières phases du conflit armé au Sri Lanka, qui a pris fin en mai 2009.

Ce groupe devait également préconiser un plan d’action qui garantirait l’obligation de rendre des comptes, dans le droit fil de l’engagement souscrit conjointement par le président sri-lankais Mahinda Rajapakse et par Ban Ki-moon lorsqu’il s’est rendu au Sri Lanka en mai 2009.

Amnesty International a invité les Nations unies à ouvrir une enquête internationale indépendante sur les crimes présumés, notamment sur l’homicide de plus de 10 000 civils, sur l’utilisation de civils comme boucliers humains et le recrutement d’enfants soldats par les Tigres libérateurs de l’Eelam tamoul (LTTE), sur le bombardement par l’armée de zones densément peuplées par des civils et sur la grave privation de nourriture, d’eau et de soins médicaux qu’ont subie les personnes prises au piège des combats.

Le gouvernement sri-lankais a protesté contre la nomination du groupe d’experts, le qualifiant d’« injustifié et infondé », et a refusé d’apporter sa pleine et entière coopération.

« Le travail du groupe d’experts sur les questions d’obligation de rendre des comptes au Sri Lanka doit marquer le début, et non la fin, d’un processus visant à rendre compte des violations », a estimé Sam Zarifi.

Pendant des décennies, les LTTE ont systématiquement pris pour cibles des civils, mené des attentats-suicides contre des gares routières et ferroviaires, assassiné des hommes politiques et des détracteurs, et recruté des enfants soldats.

Quant aux forces du gouvernement sri-lankais et à leurs alliés armés, ils ont agi en toute impunité, se livrant à des exécutions extrajudiciaires et à des disparitions forcées, et torturant les personnes soupçonnées d’entretenir des liens avec les LTTE.

« L’impunité pour les violations a été de mise pendant toute la durée de la guerre civile au Sri Lanka. Afin de tourner une nouvelle page de l’histoire du pays et de rétablir la confiance de la population, il importe de faire émerger la vérité et de rendre justice, a conclu Sam Zarifi.

« En rendant public le rapport du groupe d’experts et en s’orientant vers un mécanisme indépendant et international d’obligation de rendre des comptes, les Nations unies réaffirmeraient avec vigueur la pertinence du droit international et renforceraient la tendance en faveur de la responsabilisation pour les atteintes aux droits humains sur la scène internationale. »


Complément d’information

La crise humanitaire engendrée par le conflit armé au Sri Lanka s’est aggravée au cours des derniers mois des affrontements, lorsque quelque 300 000 civils déplacés se sont trouvés pris au piège entre les deux camps.

Amnesty International a reçu de multiples allégations crédibles, selon lesquelles les LTTE ont placé de force des civils en ligne de mire et ont abattu ceux qui tentaient de fuir durant les derniers jours du conflit. En outre, elle a reçu des informations crédibles sur les violations du droit international imputables aux forces du gouvernement sri-lankais. Le gouvernement sri-lankais a instauré des zones dites « protégées » pour permettre aux civils se déplaçant avec les LTTE d’échapper aux combats, mais les tirs d’artillerie des forces gouvernementales se sont plus tard abattus sur ces zones où se trouvaient de très nombreux civils.

En 2008, le gouvernement a interdit aux employés d’organisations humanitaires, aux journalistes et aux observateurs indépendants l’accès aux régions du nord contrôlées par les LTTE, bloquant ainsi toute surveillance de la situation qui se détériorait.

Le gouvernement sri-lankais a invariablement donné une version mensongère de l’ampleur de la crise, affirmant jusqu’en février 2009 qu’il n’y avait qu’entre « 50 000 et 70 000 » civils pris au piège dans la zone des combats. Aussi la réponse humanitaire destinée à ces civils a-t-elle été dramatiquement sous-estimée.

Après la fin du conflit, 300 000 personnes ont été retenues pendant des mois dans des camps pour personnes déplacées gérés par les militaires, tandis que les autorités sri-lankaises ont entravé le travail de protection des droits humains dans le but de neutraliser la menace pour la sécurité qu’étaient censés représenter les LTTE. Les restrictions ont depuis lors été levées, mais des milliers de personnes vivent toujours dans les camps.

Des milliers de membres présumés des LTTE sont maintenus en détention arbitraire sans inculpation, dans ce que l’État appelle des « camps de réadaptation ».

Le refus des autorités de reconnaître les allégations de violations et d’enquêter à ce sujet a déjà contribué au chaos au Sri Lanka.

Fin 2010, les informations faisant état d’enlèvements, de disparitions forcées et d’exécutions extrajudiciaires dans le nord du Sri Lanka se sont multipliées. Parmi les victimes figurent des personnes rentrées chez elles après avoir été déplacées lors du conflit.

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