Communiqué de presse

Le Tadjikistan doit clarifier la situation de suspects détenus au secret

Amnesty International craint pour la sécurité d’Abdoulvossi Latipov (également connu sous le nom de Kori Vosit), ancien membre de l’opposition tadjike unifiée qui aurait été renvoyé de force depuis la Russie vers le Tadjikistan à la fin du mois d’octobre 2012. Son avocat au Tadjikistan a déclaré à Amnesty International qu’il pensait qu’Abdoulvossi Latipov était détenu au secret par les forces de l’ordre dans la capitale du Tadjikistan, Douchanbé. Il craint que son client ne soit soumis à des tortures et à d’autres mauvais traitements visant à lui extorquer des aveux ou à le forcer à accuser d’autres personnes.

Abdoulvossi Latipov a été arrêté en novembre 2010 par le Service fédéral de sécurité en Russie, à la suite d’une demande d’extradition émise par les autorités tadjikes. Selon Mémorial, une organisation russe de défense des droits humains, cette personne est accusée de différents crimes (enlèvement, dégradation de biens de l’État et actes terroristes). En août 2011, le procureur général de la Fédération de Russie a ordonné son extradition. Lorsque la demande d’asile d’Abdoulvossi Latipov a été refusée par la Russie, son représentant légal a adressé un recours à la Cour européenne des droits de l’homme. En décembre 2011, la Cour a ordonné des mesures provisoires selon la règle 39 impliquant que la Fédération de Russie ne devait pas extrader Abdoulvossi Latipov tant que son cas n’aurait pas été examiné de manière exhaustive par la Cour. Cette personne aurait été libérée le 15 octobre 2012 et, quelques jours plus tard, enlevée d’un appartement où elle séjournait par des hommes armés masqués et non identifiés.
Au vu des précédentes affaires de disparition et de retour forcé de Tadjiks depuis la Russie vers le Tadjikistan, où ces personnes ont subi des tortures et d’autres mauvais traitements, Amnesty International craint qu’Abdoulvossi Latipov n’ait été transféré vers le Tadjikistan et soit actuellement détenu dans un lieu inconnu par les forces de sécurité tadjikes.

Amnesty International pense qu’Abdoulvossi Latipov risque d’être torturé ou de subir des mauvais traitements lors de sa détention au secret au Tadjikistan. L’organisation appelle donc les autorités de ce pays à :

  • révéler où se trouve Abdoulvossi Latipov ;
  • veiller à ce qu’il ne soit ni torturé, ni soumis à d’autres formes de mauvais traitements ;
  • veiller à ce qu’il soit autorisé à entrer en contact avec un avocat désigné par sa famille.

Complément d’information

D’après les recherches menées par Amnesty International, les actes de torture et d’autres formes de mauvais traitements sont fréquents au Tadjikistan. Les personnes accusées de crimes contre la sécurité publique risquent particulièrement d’être torturées et de subir d’autres violations des droits humains de la part des responsables de l’application des lois. Amnesty International a recensé un certain nombre de cas où des Tadjiks demandant asile en Russie ont été enlevés et renvoyés de force vers le Tadjikistan, puis torturés ou soumis à d’autres mauvais traitements et emprisonnés à l’issue de procès inéquitables.

Savriddin Jouraïev a été relâché en Russie le 20 mai 2011 et aurait été enlevé le 31 octobre 2011. Le 1er novembre 2011, il aurait pris un vol de Moscou au Tadjikistan sans avoir de passeport, il n’avait qu’un certificat d’asile temporaire sur lui. Le 19 avril 2012, il a été condamné à 26 années d’emprisonnement mais continue de clamer son innocence. Il aurait également été torturé et soumis à d’autres formes de mauvais traitements en détention.

Un autre Tadjik, Nizomkhon Jouraïev, a disparu après avoir été libéré de sa détention temporaire en Russie le 29 mars 2012 et est réapparu plusieurs jours après à Douchanbé, alors que la Cour européenne des droits de l’homme examinait encore son cas. Anna Stavitskaïa, l’avocate russe qui a porté l’affaire de Nizomkhon Jouraïev devant la Cour européenne des droits de l’homme, a déclaré qu’elle doutait que cet homme ne soit retourné volontairement au Tadjikistan étant donné qu’il se battait pour ne pas être renvoyé dans ce pays, où il risquait d’être victime de torture et autres mauvais traitements. L’avocate a en outre précisé que c’est encore elle qui a le passeport de son client. Sans passeport ni suffisamment d’argent, il aurait été extrêmement difficile, pour ne pas dire impossible, pour Nizomkhon Jouraïev de retourner au Tadjikistan.

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