Le Zimbabwe célèbre son indépendance dans un climat de peur

Déclaration publique

Index AI : AFR 46/009/2011

18 avril 2011

Alors que le Zimbabwe célèbre le 31e anniversaire de son indépendance, Amnesty International a fait part lundi 18 avril de ses préoccupations concernant l’absence de volonté dont fait preuve le gouvernement pour faire face à son passé marqué par les atteintes aux droits humains et faire respecter les droits garantis par la Constitution du pays, ainsi que par les traités internationaux.

Malgré la création du gouvernement d’union nationale en 2009, les atteintes aux droits humains perdurent avec la même intensité. Des restrictions injustifiables des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion pacifique font vaciller la stabilité induite par la mise sur pied de ce gouvernement.

Six militants, Munyaradzi Gwisai, Hopewell Gumbo, Antonater Choto, Welcome Zimuto, Eddson Chakuma et Tatenda Mombeyarara, sont inculpés de trahison pour avoir organisé une conférence publique visant à débattre des événements qui se déroulent en Égypte et au Moyen-Orient. S’ils sont déclarés coupables, ils risquent la peine de mort. Ils font partie d’un groupe de 45 militants arrêtés le 19 février. Les 39 autres ont été acquittés, un magistrat de Harare ayant prononcé un non-lieu pour les charges retenues contre eux.

La culture politique qui consiste à privilégier les intérêts politiques partisans au détriment des droits fondamentaux a engendré la peur. Les habitants des zones rurales notamment craignent les forces de sécurité, en raison de leur implication dans les violences électorales de 2008 et de leur incapacité à amener les responsables présumés à rendre compte de leurs actes.
Les violences encouragées par l’État et les poursuites judiciaires malveillantes engagées contre des opposants présumés du président Robert Mugabe demeurent un sujet d’inquiétude majeur.

Le 31 mars, la Troïka, l’organe de coopération en matière de politique, de défense et de sécurité de la Communauté de développement de l’Afrique australe (SADC), dans un communiqué publié à l’issue de son sommet en Zambie, a appelé à mettre immédiatement fin aux violences, aux mesures d’intimidation et de harcèlement, aux discours de haine et à toute autre forme d’action qui bafoue la lettre et l’esprit de l’Accord politique global (APG).

Les sentiments exprimés dans ce communiqué constituent sans conteste un pas en avant. En effet, par le passé, le silence des dirigeants régionaux sur les violations des droits humains commises au Zimbabwe a encouragé les auteurs à poursuivre leurs agissements en toute impunité. Toutefois, la question reste posée de savoir si ces paroles seront suivies par des actes afin de mettre en œuvre l’APG.

D’autant que les violations persistantes des droits à la liberté d’expression, d’association et de réunion au Zimbabwe l’ont vidé de sa substance. En tant que garante de cet accord, la SADC ne doit pas se contenter de faire des déclarations publiques, mais doit mettre en œuvre toutes ses résolutions, en prenant des mesures contre les signataires qui bafouent ses dispositions.
Le 18 avril, Amnesty International a invité la SADC à veiller à faire de la protection des droits humains une priorité, dans son application de la feuille de route vers des élections libres et démocratiques au Zimbabwe. Ce volet est crucial, d’autant que la SADC a reconnu que les droits fondamentaux continuent d’être bafoués malgré la formation du gouvernement d’unité nationale et à la lumière des terribles violences qui ont marqué les récentes élections dans le pays.

Par ailleurs, Amnesty International s’inquiète de ce que la loi visant à permettre à la Commission des droits humains du Zimbabwe de débuter son travail n’ait pas encore été promulguée. Permettre à cette Commission d’agir serait un bon début pour remédier aux problèmes relatifs aux droits humains auxquels est confronté le pays.

Depuis le mois de février, la société civile est en butte à un regain de harcèlement et d’intimidation, imputable semble-t-il à la police nationale du Zimbabwe, qui mène une répression marquée par les arrestations arbitraires, les détentions et les actes de torture, dont la fréquence est alarmante dans tout le pays.

Par ailleurs, les débats sur une éventuelle élection en 2011 avivent les tensions au sein du gouvernement d’unité nationale et des différentes communautés. Rien ou presque n’a été fait pour calmer les tensions dans les villages ruraux à la suite des violences électorales de 2008 cautionnées par l’État.

Les défenseurs des droits humains sont en butte à d’intenses pressions, principalement imputables à la section de maintien de l’ordre de la police du Zimbabwe, et sont inculpés parce qu’ils exercent leurs droits fondamentaux garantis par la Constitution.

À l’occasion de la fête de l’Indépendance, le fait que les violations des droits humains se poursuivent au Zimbabwe est particulièrement poignant, et jette une ombre sur les festivités. Les trois principales parties à l’Accord politique global doivent prendre des mesures décisives en vue de remédier à la culture de l’impunité qui prévaut dans le pays depuis 10 ans. Elles doivent s’efforcer de garantir la sécurité de tous au Zimbabwe. Il convient de mettre en œuvre sans plus attendre les réformes visant à mettre un terme à l’application partisane des lois.

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