LIBAN : Il faut ouvrir une enquête indépendante sur la mort en détention d’Ismail al Khatib et mettre un terme aux détentions au secret

Index AI : MDE 18/011/2004
ÉFAI

Jeudi 30 septembre 2004

DÉCLARATION PUBLIQUE

Amnesty International exhorte les autorités libanaises à ouvrir sans délai une enquête indépendante sur les causes du décès d’Ismail Mohammad al Khatib, âgé de trente et un ans. Il a trouvé la mort le 27 septembre, alors qu’il était détenu au secret dans un lieu inconnu.

En outre, l’organisation s’inquiète de la sécurité d’au moins 16 militants islamistes. Arrêtés par les forces de sécurité libanaises et syriennes dans divers sites du pays, ils sont maintenus en détention au secret au Liban, dans des lieux non divulgués. Amnesty International redoute qu’ils ne soient torturés ou soumis à d’autres formes de mauvais traitements en vue de les contraindre à reconnaître des actes présumés de « terrorisme ».

Le ministre libanais de l’Intérieur, Elias al Murr, a déclaré qu’Ismail al Khatib comptait parmi 10 personnes interpellées le 22 septembre. Elles entretenaient semble-t-il des liens avec Al Qaïda et projetaient d’attaquer les ambassades italienne et ukrainienne, le palais de justice et d’autres bâtiments gouvernementaux liés à la sécurité à Beyrouth. Selon Elias al Murr et Adnan Addoum, procureur général libanais, neuf autres personnes ont été arrêtées pour des raisons de « sécurité » dès le 18 septembre et sont toujours détenues au secret dans des lieux inconnus. Cinq d’entre elles seraient Ahmad Salim al Miqati, Nabil al Khatib, Nabil Abd al Ghani Jallul, Jamal Gassem Abd al Wahid et Shafiq Samir al Banna.

Dans une déclaration concernant la mort en détention d’Ismail al Khatib, les forces de sécurité libanaises ont indiqué : « [Il] s’est trouvé mal dans la matinée et a été immédiatement conduit à l’hôpital, où il est mort d’une crise cardiaque foudroyante », qui aurait été provoquée par des « complications respiratoires ». Toutefois, selon les médias, la famille et les amis d’Ismail al Khatib affirment qu’il était en bonne santé. Sa sœur Latifa, incarcérée dans le même centre avec une autre de ses sœurs, Anam, a déclaré avant d’être relâchée le 28 septembre qu’elle avait entendu son frère Ismail hurler de douleur dans sa cellule. Des membres des forces de sécurité lui auraient affirmé qu’il souffrait de troubles rénaux et avait reçu des médicaments. Ismail al Khatib a été inhumé le 29 septembre. Selon sa famille, son corps portait des traces de torture - notamment des brûlures de cigarettes - sur le visage, les yeux et les pieds.

Amnesty International estime que les autorités doivent entreprendre dans les meilleurs délais une enquête impartiale, approfondie et indépendante afin de veiller à ce que justice soit rendue. Elle doit être confiée à des enquêteurs indépendants tant vis-à-vis du ministère public que des organismes impliqués dans l’arrestation et l’interrogatoire de la victime. Ils doivent être autorisés à consulter des experts impartiaux, notamment dans le domaine médical, et avoir accès aux dossiers et documents pertinents. D’autre part, les autorités concernées doivent garantir leur pleine et entière coopération à l’enquête. Dans le même temps, les autorités libanaises se doivent de mettre un terme à la pratique qui consiste, dans le cadre d’affaires liées à la sécurité, à maintenir des suspects en détention au secret, notamment dans des lieux inconnus, où il s’avère plus difficile de prévenir des actes de torture et autres mauvais traitements.

Les autorités soutiennent que certaines personnes appréhendées sont liées aux détenus de Dhinniyah, islamistes sunnites jugés devant le Conseil de justice au cours des dernières années. En mai 2003, Amnesty International a publié un rapport intitulé Liban. Torture et procès inéquitables à la suite des événements de Dhinniyah (index AI : MDE 18/005/2003), qui rend compte des actes de torture, des mauvais traitements et des procès iniques dont font l’objet les détenus soupçonnés d’avoir porté atteinte à la « sécurité ». Dans les cellules souterraines du centre de détention du ministère de la Défense à Yarzé, les détenus de Dhinniyah auraient été régulièrement maintenus dans des positions inchangées pendant des périodes prolongées. Ils auraient été torturés, et notamment soumis à des décharges électriques et au supplice du ballanco (la « balançoire », qui consiste à suspendre la victime par les poignets attachés dans le dos), et ce afin de les contraindre à passer aux « aveux ». En janvier 2003, deux des détenus de Dhinniyah ont été admis à l’hôpital Dhahr al Bashiq, celui-là même où Ismail al Khatib a trouvé la mort, semble-t-il après avoir reçu de graves blessures

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