Libération sous caution d’un avocat

La libération sous caution de Xie Yang ne représente pas un véritable répit dans la répression acharnée qui vise les avocats spécialisés dans les droits humains en Chine, a déclaré Amnesty International mercredi 10 mai 2017.

Xie Yang a été jugé le 8 mai par le tribunal populaire intermédiaire de la ville de Changsha, dans le sud de la Chine, pour « incitation à la subversion de l’État » et pour avoir « troublé l’ordre au tribunal ». Il a semble-t-il été libéré sous caution, même si aucun verdict n’a été annoncé.

« Cette suite d’événements inhabituels n’atténue en rien les préoccupations relatives à la torture dans cette affaire, a déclaré Patrick Poon, chercheur sur la Chine à Amnesty International. Si c’est un soulagement de savoir que Xie Yang n’est plus en détention, cela ne change rien au fait qu’il n’aurait jamais dû être arrêté.

« Libéré sous caution, Xie Yang sera sans doute soumis à une surveillance constante et à des restrictions sévères de sa liberté de mouvement, comme ce fut le cas dans d’autres affaires similaires, a déclaré Patrick Poon. Ces méthodes semblent être le modus operandi des autorités à l’égard de ceux qui défendent les droits humains. »

Le tribunal a annoncé que le procès serait diffusé sur Weibo, une plateforme chinoise de réseau social, environ 20 minutes seulement avant son ouverture.

Lors du procès, Xie Yang a déclaré qu’il n’avait pas été torturé, contredisant les déclarations faites à ses avocats en janvier lorsqu’il a raconté les tortures prolongées subies durant sa détention, notamment les interrogatoires interminables, les coups et la privation d’eau et de sommeil.

Xie Yang fait partie des presque 250 avocats et militants visés par une vague de répression sans précédent lancée par le gouvernement chinois en juillet 2015.

Torturé

Lorsque ses avocats ont rendu public le récit des tortures subies par Xie Yang en janvier 2017, les autorités ont rejeté toute nouvelle requête de leur part pour rencontrer leur client. Un autre avocat spécialisé dans les droits humains placé en détention, Jiang Tianyong, a « avoué » en mars 2017 sur un média de Chine continentale avoir fabriqué de toutes pièces les récits de torture de Xie Yang.

Sa famille a également été menacée, dans le cadre d’une manœuvre visant à extorquer à Xie Yang des « aveux » et des déclarations incriminant d’autres défenseurs des droits humains.

Lors de son procès, Xie Yang a été représenté par des avocats commis d’office, les autorités ayant déchargé de l’affaire les avocats engagés par sa famille.

Les autorités ont enjoint à plusieurs reprises à Chen Jiangang, l’un des avocats qui défendaient initialement Xie Yang, de cesser d’évoquer l’affaire avec des médias internationaux, et ont ouvert une enquête sur son aptitude à exercer une profession juridique.

Chen Jiangang et sa famille, et le militant Zhang Baocheng et son épouse, Liu Juefan, ont été emmenés par la police alors qu’ils voyageaient dans le Yunnan le 3 mai. Lorsqu’ils ont été libérés, Chen a dû repartir en voiture à Pékin depuis le Yunnan, escorté par des agents de la Sécurité publique, tandis que son épouse et leurs deux jeunes enfants ont été autorisés à prendre un vol pour Pékin.

« Les accusations visant Xie Yang sont sans fondement. Les autorités le savent et c’est pourquoi elles recourent à la torture et à d’autres formes de contrainte contre lui et sa famille », a déclaré Patrick Poon.

Une répression acharnée

Le placement en détention de l’avocate Wang Yu et de sa famille le 9 juillet 2015 a marqué le début d’une répression sans précédent de la part du gouvernement contre les avocats spécialistes des droits humains et d’autres militants. Dans les semaines qui ont suivi, près de 250 avocats et militants ont été interrogés ou détenus par des agents chargés de la Sûreté de l’État et, dans de nombreux cas, leur bureau et leur domicile ont fait l’objet de perquisitions.

Sans compter Xie Yang, cinq autres personnes ont été déclarées coupables de « subversion du pouvoir de l’État ». En août 2016, les militants Zhai Yanmin et Gou Hongguo, alias Ge Ping, ont été condamnés à des peines de prison avec sursis. Le militant Hu Shigen et l’avocat Zhou Shifeng ont été condamnés respectivement à des peines de prison de sept ans et demi et sept ans. L’avocat Li Heping a été jugé à Tianjin le 25 avril et condamné à une peine de trois ans de prison, assortie d’un sursis de quatre ans le 28 avril. On ignorait où il se trouvait après le jugement, jusqu’à ce qu’il rentre chez lui le 9 mai. Des images le montrent amaigri et ses cheveux sont visiblement devenus gris.

Trois autres personnes demeurent en détention et attendent la date de leur procès ou leur verdict. La date du procès de l’avocat spécialisé dans les droits humains Wang Quanzhang n’a toujours pas été fixée. Les militants Yin Xu’an et Wang Fang attendent toujours leur verdict après avoir comparu au tribunal en septembre 2016 et en février 2017 respectivement.

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