Index AI : AFR 34/019/2004
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
« J’étais enceinte et j’avais fui le camp situé près du pont de St Paul. Trois soldats des forces gouvernementales m’ont rattrapée ; ils m’ont violée et battue. J’ai perdu mon bébé et tous mes biens ont été volés. »
Témoignage d’une femme de vingt-neuf ans originaire du Comté de Bomi.
Amnesty International a appelé ce jour les autorités libériennes à traduire en justice les personnes s’étant rendues coupables de viol, une pratique très répandue lors de la guerre civile au Libéria.
« Des milliers de femmes et de jeunes filles ont été victimes de viol ou d’autres formes de violences sexuelles, a indiqué Amnesty International. Pourtant, plus d’un an après la signature d’un accord de paix, aucunes poursuites judiciaires n’ont été engagées et on ignore quand et de quelle façon les responsables présumés de tels agissements auront à répondre de leurs actes. L’impunité dont ils jouissent est une insulte aux victimes de ces crimes, qui, rappelons-le, constituent des crimes contre l’humanité et des crimes de guerre. »
Dans son nouveau rapport intitulé Liberia : No impunity for rape - a crime against humanity and a war crime, l’organisation de défense des droits humains décrit à travers des témoignages déchirants les violences sexuelles qui auraient touché environ deux tiers de la population libérienne. Elle a également cherché à montrer les conséquences physiques, psychologiques et sociales de ces sévices.
« Le Libéria ne pourra pas instaurer une paix durable tant que les auteurs présumés de violations du droit international ne seront pas tenus pour responsables sur le plan pénal, que la vérité n’aura pas été établie et que les victimes n’auront pas obtenu réparation, a expliqué Amnesty International.
« Jusqu’ici, le Gouvernement de transition libérien n’a adopté aucune mesure visant à déférer à la justice les auteurs présumés de crimes de droit international. De son côté, la communauté internationale ne s’est pas résolument engagée à veiller à ce que ces crimes ne restent pas impunis au Libéria.
« Un plan d’action sur le long terme doit être élaboré et mis en œuvre, a ajouté l’organisation, afin de restaurer la justice et l’état de droit. Le gouvernement doit placer ce projet au rang de ses priorités et travailler en coopération avec la communauté internationale au sens large, en particulier les Nations unies et les organisations non gouvernementales. »
Le rapport aborde les points suivants :
– le caractère systématique des viols et d’autres formes de violences sexuelles au Libéria, et notamment les viols collectifs et le viol de femmes enceintes et de mineures commis par des combattants des trois parties au conflit : l’ancien gouvernement du Libéria, les Liberians United for Reconciliation and Democracy (LURD, Libériens unis pour la réconciliation et la démocratie) et le Movement for Democracy in Liberia (MODEL, Mouvement pour la démocratie au Libéria) ;
– l’incapacité des services de santé à prendre en charge les innombrables victimes de viol ou d’autres formes de violences sexuelles souffrant de blessures physiques ou d’un traumatisme psychologique ;
– la nécessité pour les gouvernements des pays donateurs d’honorer les engagements qu’ils ont pris lors de la Conférence internationale pour la reconstruction du Libéria, au mois de février (environ la moitié des financements promis n’ont toujours pas été mis à la disposition du Libéria) ;
– la menace pesant sur les femmes, qui restent exposées à la violence et à l’exploitation sexuelles parce qu’elles vivent dans le dénuement le plus total et en raison des conditions qui règnent dans les camps, où résident toujours un grand nombre de personnes déplacées.
« Le respect des droits des femmes et des jeunes filles doit être au cœur de toutes les initiatives visant à reconstruire le Libéria. Il est essentiel que les Libériennes jouent un rôle significatif dans tous les aspects de cette entreprise », a conclu Amnesty International.
Vous pouvez consulter le rapport Liberia : No impunity for rape - a crime against humanity and a war crime sur le site d’Amnesty International, à l’adresse suivante : http://web.amnesty.org/library/index/engafr340172004