Le gouvernement libérien doit engager des poursuites équitables et crédibles pour les crimes de droit international commis durant les deux guerres civiles au Liberia, ont déclaré 76 ONG libériennes, africaines et internationales dans une communication présentée au Comité des droits de l’homme des Nations unies et rendue publique le 5 juillet.
Cette communication est publiée avant que le Liberia ne se présente devant le Comité, chargé de surveiller la mise en œuvre du Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) par ses États parties, les 9 et 10 juillet à Genève.
« Depuis la fin de la guerre en 2003, le gouvernement libérien a mis de côté la question de la responsabilisation pénale pour les crimes de guerre, a déclaré Hassan Bility, directeur exécutif de Global Justice and Research Project, ONG basée à Monrovia.
« Absolument personne n’a été poursuivi pour les violations commises par le passé. »
Les Libériens ont énormément souffert au cours des deux conflits armés qu’a connus le Liberia pendant plus de 14 ans. Parmi les violations des droits humains citons les exécutions sommaires, les massacres d’ampleur, les viols et autres formes de violences sexuelles, les mutilations et la torture, ainsi que l’enrôlement forcé généralisé et l’utilisation d’enfants soldats.
Deux grandes manifestations se sont récemment tenues à Monrovia en faveur d’un tribunal chargé de traiter les crimes de guerre ; des personnalités libériennes réclament justice, notamment la lauréate du prix Nobel de la paix Leymah Gbowee et des dirigeants du Conseil des Églises du Liberia.
« Les citoyens au Liberia descendent dans la rue et demandent à leurs dirigeants de prendre des mesures pour veiller à ce que justice soit rendue pour les crimes du passé, a déclaré Nushin Sarkarati, avocate au Centre pour la justice et l’obligation de rendre des comptes.
« Les victimes et les familles méritent de voir les responsables présumés rendre des comptes. »
La Commission vérité et réconciliation pour le Liberia a recommandé en 2009 qu’un tribunal chargé des crimes de guerre enquête et juge les responsables de graves violations du droit international. Or, le Liberia n’a toujours pas mis en œuvre cette recommandation. Les rares affaires dans lesquelles les atrocités commises pendant les guerres civiles ont été prises en compte ont été jugées hors du Liberia, notamment en Europe et aux États-Unis.
« Avec un nouveau gouvernement élu en promettant de mettre fin à la corruption et de faire respecter l’état de droit dans la nation, nos organisations demandent au Liberia de s’acquitter de ses obligations internationales en matière de poursuites pour les crimes graves et de rendre justice aux victimes des guerres civiles », a déclaré Adama Dempster, secrétaire général de Civil Society Human Rights Advocacy Platform of Liberia.
La communication présentée par les 76 ONG identifie les mesures que le gouvernement libérien doit prendre sans délai afin de garantir l’obligation de rendre des comptes pour les crimes graves au Liberia, et que le Comité des droits de l’homme doit examiner. Elle formule aussi des recommandations afin de faire des ajouts et des modifications au projet de tribunal présenté par la commission, en vue de procès équitables et crédibles.
« Le gouvernement libérien doit instaurer rapidement un comité chargé d’élaborer une feuille de route afin que justice soit rendue pour les crimes graves, a déclaré Elise Keppler, directrice adjointe du programme Justice Internationale à Human Rights Watch.
« Le Liberia doit aussi soutenir les efforts des pays tiers afin de traiter les affaires relevant de la compétence universelle pour les crimes perpétrés pendant la guerre civile. »