Communiqué de presse

Libye. Il faut abandonner les charges retenues contre des hommes politiques au sujet d’un dessin sur les droits des femmes

Les autorités libyennes doivent abandonner les charges retenues contre deux hommes politiques qui ont publié un dessin humoristique sur les droits des femmes considéré par certains comme insultant envers l’islam, a déclaré Amnesty International vendredi 14 juin.

Fathi Sager, secrétaire général du Parti national libyen (PNL), et Ali Tekbali, en charge de l’orientation politique, doivent comparaître dimanche 16 juin devant le Tribunal pénal de Tripoli. Ils encourent la peine de mort pour un dessin humoristique sur l’égalité entre les hommes et les femmes et les droits des femmes, publié sur une affiche de la campagne électorale en juin 2012.

Ce dessin représente un groupe d’hommes débattant du rôle des femmes dans la société libyenne, dont l’un d’entre eux est barbu. Ce même personnage est réapparu sous les traits du prophète Mahomet trois mois plus tard dans une bande dessinée anti-islamique sujette à controverse, publiée par le magazine satirique français Charlie Hebdo en septembre 2012. Toutefois, le dessin original ne faisait aucune référence au prophète Mahomet ni à l’islam.

Les deux hommes sont inculpés d’une série de charges au titre d’articles du Code pénal qui ont été fréquemment invoqués pour réprimer l’opposition politique et la liberté d’expression sous l’ère de Mouammar Kadhafi. Ils sont accusés de propager la discorde parmi les Libyens et d’avoir l’intention « de modifier les principes de base » de la Constitution, ainsi que d’insulte envers l’islam et d’incitation à la haine. Deux de ces chefs d’inculpation sont passibles de la peine de mort.

« Les poursuites engagées contre Ali Tekbali et Fathi Sager sont grotesques et doivent être immédiatement abandonnées. S’ils sont reconnus coupables de ces accusations, Ali Tekbali et Fathi Sager seront des prisonniers d’opinions, incarcérés uniquement pour avoir exercé sans violence leur droit à la liberté d’expression », a estimé Hassiba Hadj Sahraoui, directrice adjointe du programme Moyen-Orient et Afrique du Nord d’Amnesty International.

Les bureaux de ce parti à Tripoli ont été perquisitionnés par une brigade militaire dépendant du Comité de sécurité suprême (SSC), en novembre 2012, et ont été fermés sur ordre du parquet.

Ali Tekbali et Fathi Sager seraient les premiers hommes à être jugés pour ces chefs d’inculpation depuis le soulèvement qui a conduit au renversement de Mouammar Kadhafi en 2011.

« Cela fait bientôt deux ans que la Libye a garanti la liberté d’expression dans sa déclaration constitutionnelle. Les autorités doivent tenir cet engagement et abroger sans délai toutes les lois qui érigent en infraction l’exercice pacifique des droits à la liberté d’expression et de réunion, et prévoient la peine de mort, a expliqué Hassiba Hadj Sahraoui.

« Il est proprement scandaleux de penser que défendre les droits des femmes est devenu un crime passible de la peine capitale, alors que les femmes en Libye réclament de participer davantage à la vie publique et au processus d’élaboration de la Constitution. »

Ali Tekbali, qui assume la responsabilité de ce dessin humoristique visant à dénoncer le fait que les conservateurs s’opposent au droit des femmes à l’éducation, affirme avoir trouvé l’image en naviguant sur Internet à la recherche d’un homme barbu.

Il a déclaré à un délégué d’Amnesty International qui assistait en tant qu’observateur à la première audience du procès des deux hommes au mois de mai : « Le but principal du dessin était de montrer que les femmes ne sont pas des seaux emplis de péchés marchant dans les rues, comme le pensent ces hommes. Une société ne peut pas prospérer si les deux côtés, les hommes et les femmes, ne travaillent pas ensemble. »

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