Lituanie. Un projet de loi menace de bafouer les droits humains et de renforcer l’homophobie

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amnesty International a condamné ce mercredi 3 juin le Parlement lituanien, le Seimas, pour avoir donné son feu vert à un projet de loi qui institutionnalise l’homophobie et qui bafoue le droit à la liberté d’expression ainsi que le droit de ne pas être exposé à des discriminations.

Hier, le Seimas, à une écrasante majorité, s’est prononcé en faveur de la tenue d’un vote final sur un projet de loi portant modification de la Loi relative à la protection des mineurs face aux effets préjudiciables de l’information publique. S’il est adopté, ce texte aura pour effet d’interdire tout débat sur l’homosexualité au sein des établissements scolaires ainsi que les références à l’homosexualité dans toute forme d’information publique susceptible d’être vue par des mineurs.

« En votant en faveur de cette modification de la loi, le Seimas a renforcé la discrimination fondée sur l’orientation sexuelle des personnes », a déclaré Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

La modification proposée mettrait les informations sur l’homosexualité sur le même plan que la représentation de la violence (physique ou psychologique), la diffusion d’images montrant des cadavres ou des corps cruellement mutilés et toute information susceptible d’engendrer la peur ou l’effroi ou d’encourager les automutilations ou le suicide.

« Cette modification est contraire au droit à la liberté d’expression et prive les élèves d’un accès à un soutien et à une protection qui peuvent leur être nécessaires, a déclaré Nicola Duckworth. Le Parlement lituanien doit respecter pleinement les droits de chacun et rejeter cette modification lorsqu’elle lui sera soumise pour un vote final. »

Si cette disposition était adoptée, elle serait contraire aux obligations de la Lituanie. Aux termes du droit international, cet État est en effet tenu d’agir dans l’intérêt supérieur des mineurs, y compris s’il s’agit de lesbiennes, de gays ou de personnes bisexuelles ou transgenres.

Complément d’information

Ce nouveau projet de loi s’inscrit dans un contexte où les actes d’intimidation et les mesures de discrimination se multiplient en Lituanie à l’encontre des lesbiennes, des gays et des personnes bisexuelles et transgenres. L’année dernière, les autorités de certaines municipalités ont tenu des propos dégradants à leur égard et les mairies de Vilnius et de Kaunas ont refusé que le camion de la campagne de l’Union européenne (UE) intitulée Pour la diversité. Contre les discriminations fasse halte dans leur ville. Évoquant cette initiative de l’UE, le maire de Kaunas a déclaré que « le festival homosexuel risqu[ait] de provoquer de nombreuses émotions négatives ».

La première lecture du projet de loi en séance plénière a eu lieu hier. De nombreux parlementaires étaient absents, mais parmi les présents, 57 se sont prononcés en faveur du texte, deux contre et huit se sont abstenus.

Ce projet de loi va à l’encontre de la déclaration conjointe que la Lituanie a signée à l’Assemblée générale des Nations unies en décembre 2008, texte qui réaffirmait, en substance, que chacun peut se prévaloir de ses droits fondamentaux indépendamment de son orientation sexuelle ou de son identité de genre.

Le Comité des droits économiques, sociaux et culturels des Nations unies a récemment adopté une Observation générale portant sur la disposition du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels (PIDESC) consacrée à la non-discrimination. Dans cette Observation, il indiquait que les parties devaient veiller à ce que l’orientation sexuelle ne constitue pas un obstacle à la réalisation des droits énoncés dans le Pacte, y compris le droit à l’éducation.

En 2002, le Comité des droits de l’enfant des Nations unies avait exprimé sa préoccupation face à des dispositions législatives similaires au Royaume-Uni. Introduites en 1988, elles avaient finalement été abrogées en septembre 2003.

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