MALAISIE - Saisir l’opportunité d’une police garante des droits de ses concitoyens ?

La publication prochaine des résultats d’une enquête officielle sur la police malaisienne offre à celle-ci une occasion unique d’améliorer son efficacité et de regagner la confiance de la population. Les atteintes systématiques aux droits humains telles que les fusillades meurtrières, les tortures et les morts en détention vont être abordées. Amnesty International contribue ce jeudi 7 avril 2005 à cette démarche en rendant public un rapport sur le sujet, qui comporte des recommandations et souligne à quel point il est nécessaire que les policiers soient tenus pour responsables de leurs actes.

S’étant rendu compte qu’il y avait de graves problèmes, le Premier ministre malaisien a pris la décision de nommer une commission royale d’enquête pour y remédier. « La population malaisienne, les organisations non gouvernementales et la communauté internationale attendent avec impatience les résultats de cette enquête, a déclaré Tim Parritt, chercheur pour l’Asie du Sud-Est à Amnesty International. Il est à espérer que ces conclusions seront rendues publiques et qu’elles donneront lieu aux réformes qu’il est urgent d’instaurer. »

Parmi les victimes des violences policières figure Tharma Rajen, un serveur malaisien d’origine indienne âgé de dix-neuf ans. L’enquête sur son décès en détention est toujours en cours. Il marchait dans la rue lorsqu’il a été arrêté parce qu’il était soupçonné d’être impliqué dans des combats entre bandes de malfaiteurs. Détenu dans plusieurs postes de police pendant soixante-six jours, il avait dit à son frère que des policiers lui avait donné des coups et l’avaient frappé sur la plante des pieds avec un tuyau en caoutchouc. Sa famille n’avait été informée que tardivement de sa détention et quand sa mère était allée le voir, il avait froid, il souffrait et il vomissait constamment. Ayant fini par être hospitalisé, il était attaché à son lit par des menottes et il est mort à l’hôpital le 21 juin 2002.
Le cas de Tharma Rajen met en évidence plusieurs dysfonctionnements de la police dénoncés dans le rapport et, en particulier, le fait que les policiers sont rarement tenus pour responsables des violences qu’ils commettent. Les comparutions à l’issue desquelles se décide la prolongation d’une détention sont souvent considérées comme les magistrats comme une pure formalité plutôt que comme l’occasion de vérifier ce que fait la police. Souvent, les policiers ne préviennent pas les proches de l’arrestation d’un suspect ni du moment où aura lieu la comparution devant le juge chargé d’examiner les demandes de mise en liberté. Les suspects sont systématiquement torturés et maltraités en garde à vue, particulièrement pendant les interrogatoires.

« Trop souvent, les policiers ne voient dans les droits humains qu’un obstacle à leur travail, a ajouté Tim Parritt. Mais si on en revient aux fondements, les polices existent pour maintenir l’ordre au sein des sociétés qu’elles servent, en protégeant les droits fondamentaux des individus contre ceux qui veulent y attenter. Ce principe de base doit être rétabli dans la culture policière en Malaisie ».

Amnesty International a remis son rapport à la commission royale en janvier. L’objectif de ce document est de contribuer au travail de la commission en examinant les différentes formes de violations des droits humains commises par le passé et en formulant des recommandations d’amélioration qui placent le respect des droits humains au cœur des opérations de maintien de l’ordre.

« Professionnalisme de la police et respect des droits humains sont interdépendants, a poursuivi Tim Parritt. Il faut un code de conduite spécifique à la police, qui prenne en compte les principes les plus élémentaires en matière de droits humains. Ce code ne peut être respecté que s’il règne un esprit de responsabilisation et de transparence au sein de la police. Pour instaurer un tel climat, il faut mettre en place une procédure disciplinaire interne et, ce qui est tout aussi important, créer un organe indépendant chargé des plaintes concernant la police, qui agisse comme garde-fou.
La police est d’autant plus efficace qu’elle bénéficie de la coopération de la population au service de la laquelle elle se trouve. Les policiers peuvent instaurer un climat de confiance en se montrant sensibles aux besoins de la population, y compris de ses composantes minoritaires. Pour obtenir le soutien de la population, il faut aussi faire en sorte que la police réponde rapidement aux demandes d’assistance, y compris celles formulées par les femmes, les enfants ou les membres des minorités ethniques.

« L’occasion de devenir un modèle pour les autres pays de cette région du monde en matière de maintien de l’ordre est donnée aujourd’hui à la Malaisie
, a conclu Tim Parritt. Un modèle où la police doit répondre de ses actes devant la société comme devant le gouvernement ; où les policiers travaillent de manière efficace dans leur quartier après s’être attiré le respect de la population pour avoir protégé tous les habitants de la même façon. Les droits humains ne sont pas un obstacle à un bon fonctionnement de la police mais plutôt un élément essentiel de sa réussite. »


Complément d’information

La commission royale chargée d’enquêter sur la conduite et la direction de la police royale malaisienne a été créée par le gouvernement malaisien au début de l’année 2004. Elle devrait faire connaître les résultats de ses investigations en mai 2005.

La semaine dernière, Amnesty International a présenté son rapport au gouvernement et à la direction de la police royale de Malaisie, avec lesquels elle a engagé un dialogue constructif.

Vous pouvez consulter le rapport Malaysia : Towards Human Rights Based Policing (index AI : ASA 28/001/2005) sur le site de l’organisation à l’adresse suivante :
http://web.amnesty.org/library/inde...

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