Malaisie. La torture est pratiquée de manière systématique, sous la forme de peines de bastonnade

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

6 décembre 2010

Le gouvernement malaisien doit immédiatement mettre fin à la pratique de la bastonnade, sanction qui se traduit chaque année par des actes de torture et des mauvais traitements systématiques infligés à des milliers de personnes, qui en gardent des séquelles physiques et psychologiques permanentes, écrit Amnesty International dans un nouveau rapport rendu public le 6 décembre.

Intitulé A Blow to Humanity , ce document propose une étude approfondie de la peine de bastonnade en Malaisie qui ne laisse guère de recours, de soutien ni d’espoir aux victimes, parmi lesquelles de nombreux étrangers sollicitant l’asile. Beaucoup ne comprennent pas les charges retenues contre eux ni le sort qui les attend.

« La bastonnade a atteint des proportions épidémiques en Malaisie, a déclaré Sam Zarifi, directeur d’Amnesty International pour la région Asie-Océanie. Dans chaque affaire que nous avons examinée, la sanction s’apparentait à un acte de torture, ce qui est absolument interdit en toutes circonstances. »

Ces dernières années, la Malaisie a accru le nombre d’infractions pénales passibles de la bastonnade. On en dénombre désormais plus de 60. Depuis 2002, date à laquelle le Parlement a ajouté à cette liste les infractions à la législation sur l’immigration, telles que l’entrée illégale sur le territoire, des dizaines de milliers de réfugiés et de travailleurs migrants ont subi ce châtiment.

Dans les prisons de Malaisie, des agents de l’État spécialement formés à la bastonnade assènent des coups violents à la victime à l’aide d’une canne ou d’un bâton d’un mètre de long, qu’ils tiennent à deux mains. La peau, nue, est lacérée, les tissus graisseux en dessous sont déchirés, ce qui laisse des cicatrices qui s’étendent jusqu’aux fibres musculaires. La douleur est si intense que les victimes perdent souvent connaissance.

Le gouvernement malaisien ne sanctionne pas ses agents pour de tels actes. Au contraire, il en forme certains sur la manière d’administrer les coups et leur verse une prime pour chaque coup de bâton. Beaucoup d’entre eux doublent leurs revenus en infligeant ce châtiment. D’autres perçoivent des pots-de-vin pour ne pas procéder à la bastonnade, épargnant leurs victimes.

Les médecins d’État ont également un rôle à jouer dans ce processus. Ils examinent les condamnés et les déclarent aptes ou inaptes à subir ce châtiment. S’ils perdent connaissance en cours de bastonnade, ils les raniment afin d’achever la sanction. Certaines victimes souffrent ensuite de handicaps physiques durables.

« Le rôle des médecins malaisiens qui consiste à faciliter l’administration délibérée de souffrances et de blessures dans le cadre de la bastonnade est totalement contraire aux règles internationales de l’éthique médicale, a indiqué Sam Zarifi. Loin de soigner les victimes, les médecins contribuent à leur infliger des tortures et des mauvais traitements. »

Les représentants et les employés de l’État malaisien qui se rendent complices d’actes de torture sont passibles de poursuites dans le monde entier au titre de la compétence universelle pour ces graves violations des droits humains, a fait savoir Amnesty International.

La bastonnade a été introduite à l’origine par l’administration coloniale britannique, au 19e siècle. Aux termes du droit international, tous les châtiments corporels sont assimilés à des actes de torture ou à d’autres formes de mauvais traitements, et sont prohibés en toutes circonstances.

Des réfugiés ayant fui la torture et le travail forcé au Myanmar ont raconté que l’État malaisien, qui ne reconnaît pas les réfugiés, les a condamnés à des peines de bastonnade pour des infractions à la législation relative à l’immigration, parfois à maintes reprises. En Indonésie, Amnesty International a rencontré des travailleurs migrants expulsés par bateau de Malaisie. Parmi eux, 63 hommes avaient été soumis à la bastonnade.

« Les pays voisins participent fortement à l’économie de la Malaisie en y envoyant des dizaines de milliers de travailleurs migrants, a souligné Sam Zarifi. L’Indonésie et les autres pays qui envoient des migrants doivent demander avec insistance que la Malaisie cesse d’infliger à leurs citoyens des peines de bastonnade. »

Amnesty International a appelé le gouvernement malaisien à prendre les mesures suivantes :

• instaurer immédiatement un moratoire sur les peines de bastonnade en toutes circonstances, en vue d’abolir ce châtiment ;

• ratifier la Convention contre la torture des Nations unies et son Protocole facultatif, ainsi que le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (PIDCP) ;

• modifier la loi en vue de traiter les infractions à la législation relative à l’immigration comme des infractions administratives et non comme des crimes passibles de peines d’emprisonnement ou de châtiments corporels.

Toutes les infos
Toutes les actions
2024 - Amnesty International Belgique N° BCE 0418 308 144 - Crédits - Charte vie privée
Made by Spade + Nursit