AMNESTY INTERNATIONAL
COMMUNIQUÉ DE PRESSE
ASA 16/000/2007
Amnesty International demande ce 1er octobre au Conseil de sécurité des Nations unies d’imposer immédiatement un embargo international complet sur les armes à destination du Myanmar, car un nombre de sources croissant fait état d’homicides, de blessures graves et de détentions massives de manifestants pacifiques par les autorités du Myanmar.
Amnesty International demande également aux principaux fournisseurs d’armes du Myanmar, en particulier l’Inde et la Chine, outre la Russie, la Serbie, l’Ukraine et les nations de l’ANASE, d’interdire l’implication de leurs agences, entreprises et ressortissants dans la fourniture directe et indirecte de matériel, munitions et savoir-faire dans le domaine militaire et sécuritaire, y compris les soi-disant transferts « non létaux », à destination du Myanmar.
« Il faut envoyer d’urgence un message clair aux dirigeants militaires du Myanmar : leur répression brutale de manifestants pacifiques ne sera tolérée ou entretenue par aucun membre de la communauté internationale », a déclaré Irene Khan, secrétaire générale d’Amnesty International.
Les rapports officiels parlent de neuf personnes tuées, mais Amnesty International craint que le nombre réel de tués soit bien plus élevé. Au cours de la semaine passée, les forces de sécurité du Myanmar ont effectué des raids dans des monastères et attaqué des manifestants pacifiques, tirant à balles réelles, utilisant du gaz lacrymogène et frappant les manifestants à coups de matraque. Un millier de personnes au moins auraient été arrêtées à Yangon seulement. Il existe un risque sérieux que les forces de sécurité poursuivent les arrestations et réagissent avec une violence croissante à toute nouvelle manifestation demandant des réformes démocratiques.
« Il est inacceptable que les États continuent de fournir des armes à un gouvernement déjà responsable de violations graves et persistantes des droits humains, et qui a désormais recours à la violence contre des manifestants pacifiques », a déclaré Irene Khan.
« Il faut que l’embargo complet sur les armes reste en vigueur jusqu’à ce que le gouvernement du Myanmar prenne des mesures concrètes pour améliorer la protection des droits humains pour tous, notamment en libérant tous les prisonniers d’opinion », a ajouté Irene Khan.
L’Union européenne et les États-Unis ont imposé des embargos sur la fourniture directe et indirecte de matériel militaire au Myanmar en 1988 et 1993 respectivement ; ces embargos doivent être imposés de manière stricte.
Les manifestations continuent sur fonds de violations persistantes des droits humains à grande échelle – qui se produisaient avant la crise actuelle. Parmi ces violations figurent la détention prolongée de plus de 1 160 prisonniers politiques, détenus dans des conditions carcérales aggravées ; la détention prolongée du prix Nobel de la Paix Daw Aung San Suu Kyi et d’autres dirigeants de l’opposition, qui sont des prisonniers d’opinion ; des exécutions extrajudiciaires ; et l’usage répandu de la torture. Il existe aussi une répression endémique de la liberté d’expression dans tout le pays. Le recours au travail forcé et aux enfants soldats continue. Certains éléments indiquent que les opérations militaires dans l’État oriental kayin (Karen) ont entraîné des actes contre les civils qui constituent des violations du droit international humanitaire et relatif aux droits humains, à une échelle qui correspond à des crimes contre l’humanité. Les observateurs indépendants et les organisations internationales de défense des droits humains se voient toujours interdire l’accès à de nombreuses régions du pays.
Contexte
Chine
Depuis 1988, la Chine fournit une large gamme de matériel militaire à l’armée du Myanmar, comme des tanks, des véhicules blindés de transport de troupes et des pièces d’artillerie comme des mortiers, des canons antichar et antiaériens, ainsi que des avions de chasse, selon des sources publiées. La Chine ne fait pas régulièrement état de ses transferts d’armes aux Nations unies.
Inde
En janvier 2007, le ministre indien des Affaires étrangères a promis une « réponse favorable » à la demande de matériel militaire du gouvernement du Myanmar ; en avril, des forces militaires d’Inde et du Myanmar ont mené des exercices militaires conjoints. Certaines sources signalent un accord indien de fourniture de divers matériels militaires, comme des tanks, des appareils aériens, des canons d’artillerie, des radars, des armes légères ainsi qu’un « hélicoptère léger de pointe » qui contient très probablement des composants, des technologies et des munitions originaires d’États membres de l’Union européenne et des États-Unis.
Fédération de Russie
La Fédération de Russie a signalé aux Nations unies, également en 2007, qu’elle avait exporté 100 systèmes d’artillerie de gros calibre au Myanmar en 2006. La Russie a également exporté dix avions de chasse en 2002 et quatre en 2001 ; en outre, la compagnie russe d’appareils militaires MIG avait une représentation au Myanmar en octobre 2006.
Serbie
De 2004 à 2006, la Serbie a livré au Myanmar de grandes quantités d’armes et de fournitures militaires, dont des munitions, selon les données des douanes.
Ukraine
En avril 2004, l’entreprise d’armes étatique d’Ukraine, UkrpetsExport, a signé un contrat de dix ans pour la fourniture de 1 000 véhicules blindés de transport de troupes devant être assemblés au Myanmar, dans le cadre d’un contrat qui dépasserait les 500 millions de dollars des États-Unis. En 2004, l’Ukraine a déclaré aux Nations unies qu’elle avait exporté au Myanmar, en 2003, dix véhicules de combat blindés BTR-3U ainsi que dix missiles R-27.