Hawi Tin comptait parmi 10 personnes enlevées par les combattants de l’Armée d’Arakan (AA) le 3 novembre 2019. Ces 10 personnes, toutes des civils, dont cinq ressortissants indiens, se rendaient en bateau du district de Paletwa, dans l’État chin, au district de Kyauktaw, dans l’État voisin d’Arakan, lorsqu’elles ont été appréhendées par l’Armée d’Arakan. L’un des ressortissants indiens est mort pendant sa détention, dans des circonstances qui restent floues. Huit de ces civils ont été libérés le lendemain et la dépouille de la victime a été restituée ; cependant, Hawi Tin n’a pas été relâché. L’Armée d’Arakan accuse ce député de la Ligue nationale pour la démocratie (NLD) au pouvoir de fournir des informations sur le groupe à l’armée du Myanmar et de créer des tensions au sein des communautés ethniques chins et rakhines – une allégation que nie sa famille.
Toutes les parties à un conflit armé non international, tel que celui opposant l’armée du Myanmar à l’Armée d’Arakan, sont tenues de respecter les règles du droit international humanitaire, qui interdit entre autres « les atteintes portées à la vie et à l’intégrité corporelle, notamment le meurtre sous toutes ses formes » de civils et de personnes qui ne participent pas activement aux hostilités, et interdit la privation arbitraire de liberté.
Amnesty International et les Parlementaires de l’ANASE pour les droits de l’homme (APHR) demandent à l’Armée d’Arakan de libérer immédiatement Hawi Tin, qui est clairement un civil, et exhortent les autorités du Myanmar à lancer dans les meilleurs délais une enquête indépendante et impartiale sur la mort en détention du ressortissant indien.
Amnesty International et l’APHR sont préoccupés par le nombre croissant d’attaques, de menaces et d’actes de harcèlement visant les députés en Asie du Sud-Est. Ces attaques contre les législateurs ont un effet dévastateur qui sape le droit à la représentation des citoyens et musèle la liberté d’expression au sein des Parlements.
Amnesty International et l’APHR sont très inquiets quant au sort de 13 autres civils chins, 11 hommes et deux adolescents, qui auraient été enlevés et détenus par l’Armée d’Arakan au cours de l’année écoulée et demandent au groupe de libérer immédiatement tous les civils qu’il détient. L’Armée d’Arakan doit aussi informer sans attendre les familles de toutes les personnes – qu’il s’agisse de civils ou de combattants – maintenues en détention et autoriser les prisonniers à communiquer avec leurs familles.
Ceux qui dénoncent les exactions commises par l’Armée d’Arakan, comme ceux qui dévoilent les violations des droits humains imputables à l’armée du Myanmar, risquent des menaces et autres représailles. Amnesty International et les Parlementaires de l’ANASE pour les droits de l’homme sont particulièrement préoccupés par les informations selon lesquelles les organisations de la société civile et les militants chins qui tentent de médiatiser l’affaire d’Hawi Tin et d’autres civils disparus, sont la cible de menaces et d’intimidations. Le 11 novembre, 43 organisations de la société civile et médias chins ont publié une déclaration conjointe réclamant la libération immédiate d’Hawi Tin. Depuis, des personnes associées à des organisations ayant signé la déclaration, notamment à l’Organisation chin pour les droits humains (CHRO), ont reçu des appels anonymes injurieux et des messages menaçants.
Aux termes du droit international relatif aux droits humains et des normes internationales en la matière, les autorités du Myanmar ont l’obligation de veiller à ce que toutes les personnes puissent exercer leur droit à la liberté d’expression et de fournir les efforts de diligence requise pour protéger les individus des atteintes aux droits humains commises par des acteurs non étatiques. Le fait de veiller à ce que les députés, les militants de la société civile et les défenseurs des droits humains puissent mener à bien leurs activités professionnelles sans subir de harcèlement, de menaces ni de préjudices est un élément essentiel afin de promouvoir et de protéger les droits humains au Myanmar.
Complément d’information
Les combats entre l’armée du Myanmar et l’Armée d’Arakan (AA) se sont nettement intensifiés dans l’État d’Arakan, dans l’ouest du Myanmar, depuis janvier 2019. Amnesty International a recensé de graves violations du droit international humanitaire et du droit international relatif aux droits humains commises par l’armée du Myanmar, notamment des attaques illégales qui ont fait des morts et des blessés parmi les civils, des arrestations arbitraires, des actes de torture et d’autres mauvais traitements, des exécutions extrajudiciaires, des disparitions forcées et des cas de travail forcé. Certaines de ces violations s’apparentent à des crimes de guerre. Amnesty International a également recueilli des informations faisant état de violations commises par l’Armée d’Arakan, notamment des enlèvements et des cas de privation arbitraire de liberté.