Myanmar. Deux prisonniers d’opinion doivent être libérés immédiatement

Les autorités du Myanmar doivent libérer immédiatement et sans condition un défenseur de la paix et une jeune femme arrêtés pour avoir tourné en dérision le commandant en chef des armées du Myanmar sur Facebook, a déclaré Amnesty International.

Le militant pour la paix Patrick Kum Jaa Lee, 43 ans, a été arrêté le 14 octobre au soir chez lui, à Yangon, pour un post publié sur Facebook où l’on peut voir quelqu’un piétiner une photo du commandant en chef des armées, le général Min Aung Hlaing. Son téléphone et son ordinateur ont été saisis et le message publié a été supprimé. Il est actuellement détenu dans un poste de police de Yangon. Quelques jours auparavant, Chaw Sandi Tun, une jeune femme, a été arrêtée pour un post se moquant de l’armée.

« Il est choquant d’imaginer que quelqu’un risque des années de prison pour un simple post inoffensif sur Facebook. Patrick Kum Jaa Lee et Chaw Sandi Tun doivent être libérés immédiatement et les charges retenues contre eux abandonnées. Ils s’ajoutent à la liste croissante de prisonniers d’opinion au Myanmar, a déclaré Laura Haigh, chercheuse sur le Myanmar à Amnesty International.

« Les autorités du Myanmar ont une nouvelle fois montré à quel point elles sont susceptibles et vindicatives face à la critique ou la dérision. Elles ont beau affirmer avoir pris un tournant en matière de droits humains, ces affaires viennent rappeler que les pratiques répressives perdurent. »

La police a informé la famille et les amis de Patrick Kum Jaa Lee qu’il fait l’objet d’une enquête au titre de la Section 66(d) de la Loi sur les télécommunications de 2013, qui interdit d’« extorquer, contraindre, restreindre à tort, diffamer, importuner, causer une influence injustifiée ou menacer toute personne en utilisant un réseau de télécommunications ». Ce chef d’inculpation est passible d’une peine maximale de trois ans d’emprisonnement.

Le 12 octobre, Chaw Sandi Tun – également appelée Chit Tha Mee, 24 ans – a été interpellée pour avoir publié sur les réseaux sociaux un commentaire soulignant que la dirigeante de l’opposition Aung San Suu Kyi portait des vêtements d’une teinte similaire à ceux de l’armée, et en particulier à ceux du général Min Aung Hlaing.

Voici son commentaire : « Si vous l’aimez [Aung San Suu Kyi] tant, mettez un morceau de son longyi [sarong] sur votre tête ». Dans la société patriarcale et conservatrice traditionnelle birmane, l’idée d’un homme portant des vêtements de femmes sur la tête est considérée comme offensante.

Les informations concernant la loi au titre de laquelle Chaw Sandi Tun a été arrêtée sont contradictoires, mais il est clair qu’elle encourt plusieurs années de prison si elle est officiellement inculpée. Sa prochaine comparution en justice est fixée au 27 octobre. Selon des sources crédibles, elle n’a pas encore pu consulter d’avocat. Elle est actuellement détenue à la prison de Maubin, dans la région d’Ayeyarwady.

À la connaissance d’Amnesty International, ces deux affaires comptent parmi les premières au Myanmar dans lesquelles des personnes sont détenues pour des publications sur les réseaux sociaux. Un photographe a été arrêté et interrogé cette année pour avoir posté une image tournant en dérision l’armée, mais a été libéré sans inculpation.

« Nous constatons avec inquiétude que les autorités semblent étendre leur répression à la sphère numérique. Au Myanmar, les défenseurs des droits humains et les militants politiques utilisent régulièrement Facebook pour partager des informations et communiquer », a déclaré Laura Haigh.

La semaine dernière, Amnesty International a publié un rapport qui dévoile que les autorités du Myanmar ont intensifié la répression depuis deux ans, notamment en restreignant la liberté d’expression à l’approche des élections générales prévues le 8 novembre.

Amnesty International estime qu’au moins 93 prisonniers d’opinion se trouvent derrière les barreaux au Myanmar et exige leur libération immédiate et inconditionnelle.

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