« L’annonce faite aujourd’hui par le procureur de la CPI représente une étape décisive et un avertissement important, tant pour le Myanmar que pour le reste du monde, car elle signale que les responsables présumés de crimes de droit international seront poursuivis, arrêtés et jugés, même s’ils sont puissants et même s’ils échappent depuis longtemps à la justice, a déclaré Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International.
« Il faut briser le cycle de l’impunité au Myanmar. Aucun dirigeant de haut rang n’a jamais eu à répondre des crimes atroces commis contre les Rohingyas, qui ont perdu la vie, leur logis, dont des communautés entières ont été anéanties, et qui continuent de faire face à de multiples crimes. En l’absence de reddition de comptes, des violations continueront d’être commises. Min Aung Hlaing a joué un rôle central dans de multiples catastrophes en matière de droits humains au Myanmar. Il a supervisé des opérations violentes visant les Rohingyas en 2016 et 2017, et a mené le coup d’État de 2021, qui a entraîné la mort de près de 6 000 civil·e·s et plongé le Myanmar dans le chaos économique, politique et social.
« Le mandat d’arrêt requis dans cette affaire concerne la crise de 2017, mais les Rohingyas sont toujours persécutés et chassés du Myanmar vers le Bangladesh à ce jour. Cette année a été la plus violente pour cette communauté depuis 2017 : des hommes, des femmes et des enfants rohingyas ont péri dans des bombardements ou sont morts noyés, étant pris au piège au milieu d’un conflit armé entre l’armée du Myanmar et les rebelles de l’Armée d’Arakan.
« En cas de délivrance du mandat d’arrêt, Min Aung Hlaing devra être immédiatement arrêté et remis à la CPI pour être jugé. Entre-temps, d’autres mesures doivent être prises pour mettre à profit cette dynamique et veiller à la reddition de comptes en faveur des Rohingyas et de tous les autres peuples du Myanmar. Il faut dans un premier temps que le Conseil de sécurité des Nations unies saisisse la CPI de l’ensemble de la situation au Myanmar. »
Complément d’information
La déclaration [1] du procureur de la CPI indique qu’il s’agit de la première demande de mandat d’arrêt contre un haut responsable militaire du Myanmar, et que d’autres suivront.
Le bureau du procureur de la CPI affirme que les crimes visés ont été commis sur une période de quatre mois, entre le 25 août 2017 et le 31 décembre 2017.
À partir d’août 2017, l’armée du Myanmar a chassé plus de 740 000 hommes, femmes et enfants rohingyas vers le Bangladesh dans le cadre d’une campagne qui, selon Amnesty International, constituait un crime contre l’humanité au titre du droit international.
Dans un rapport publié en 2018, Amnesty visait 13 individus contre lesquels l’organisation avait recueilli des preuves crédibles et exhaustives de responsabilité directe ou de commandement pour des crimes contre l’humanité. Min Aung Hlaing figurait en tête de cette liste.
Amnesty International a en outre appelé le Conseil de sécurité des Nations unies à saisir le procureur de la CPI de l’ensemble de la situation au Myanmar, afin qu’une enquête soit menée sur tous les crimes commis dans le pays.