Tenant à exercer leur droit garanti par la constitution, des manifestants ont bravé l’interdiction de la marche pacifique destinée à protester contre une loi de finances votée l’année dernière qui prévoit de nouvelles taxes sur l’habitation, l’électricité, etc. La police a lancé des grenades lacrymogènes pour disperser la marche. 23 personnes ont été arrêtées, certaines aux sièges des organisations de la société civile, et d’autres au cours de la manifestation.
« La vague d’arrestations d’activistes et la réponse manifestement brutale des forces de sécurité bafouent non seulement le droit des manifestants à la liberté de réunion pacifique, mais risquent d’embraser une situation déjà tendue au Niger » a déclaré Gaetan Mootoo, chercheur sur l’Afrique de l’Ouest à Amnesty International.
« Toutes les personnes arrêtées seulement en rapport avec l’exercice de leur droit à la liberté de réunion pacifique doivent être immédiatement libérées. »
Parmi les personnes arrêtées, figurent Ali Idrissa, coordinateur du Réseau des organisations pour la transparence et l’analyse budgétaire (ROTAB), Moussa Tchangari, secrétaire général de l’association Alternative espaces citoyens, et Nouhou Mahamadou Arzika, président du Mouvement pour la promotion de la citoyenneté responsable (MPCR). Ces personnalités de la société civile ont été arrêtées aux sièges de leurs associations.
Dans un arrêté daté du 23 mars dernier, le président de la délégation spéciale de la ville de Niamey indique que la marche est interdite « pour des raisons évidentes de sécurité… et au regard du contexte sécuritaire au Niger et dans la sous-région, et d’autres part, des récentes attaques terroristes ».
Les forces de sécurité ont encerclé, tôt le matin du dimanche 25 mars les points de rassemblement, empêchant les manifestants de se mobiliser.
Des affrontements ont éclaté, alors que la société civile a plusieurs fois appelé au calme. Des éléments de la police positionnés devant l’Assemblée nationale ont confisqué le téléphone et la carte de presse de la bloggeuse et journaliste Samira Sabou alors qu’elle couvrait les évènements. Elle ne les a récupérés que cet après-midi.
L’avocat et membre de la société civile, Lirwana Abdourahamane a aussi été arrêté par des éléments de la police à sa sortie de la télévision privée ‘’Labari’’-dont le promoteur est Ali Idrissa- alors qu’il y était l’invité du journal télévisé.
La télévision sera également fermée par des forces de sécurité qui y ont fait irruption sans présenter ni une notification écrite du Conseil supérieur de la communication, ni un mandat de la police.
Elles voulaient avoir une copie du journal télévisé au cours duquel l’avocat Lirwana a été interrogé. Ce que les responsables de la télévision ont refusé. Amnesty International a pu visionner l’enregistrement pour confirmer que l’avocat n’a pas appelé ou plaidé pour la haine ou la violence.
Un membre de la télévision ‘’Labari’’ confie à Amnesty International : «
Des éléments de la police sont venus demander une copie de l’interview de Me Lariwana. Nous avons refusé car il n’y a pas de mandat du Conseil supérieur de la communication. Face à notre refus, la police est revenue vers 21h pour nous dire qu’elle a reçu l’instruction de fermer la télévision sans notification écrite. Nous avons suspendu nos programmes et des éléments de la garde nationale sont devant la porte et interdisent tout accès.
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« Fermer une télévision indépendante constitue une attaque injustifiée contre la liberté d’expression. La suspension d’un organe de presse incombe au Conseil supérieur de la communication et à notre connaissance, aucune décision publique n’a été prise » a déclaré Gaetan Mootoo.
« Les autorités doivent veiller à ce que les journalistes fassent leur travail sans crainte et sans subir de manœuvres d’intimidation ni de harcèlement. »