Il est fréquent que les enfants soient enlevés dans des orphelinats, des écoles et des lieux de culte puis maintenus en captivité pendant des semaines, parfois des mois, en fonction de la réponse aux exigences des ravisseurs. Les enfants sont parfois pris dans une embuscade pendant leur trajet à l’école, à pied ou en bus scolaire, et enlevés en échange d’une rançon.
« Aucun enfant ne devrait vivre ce que les enfants subissent actuellement au Nigeria. L’éducation ne devrait être pour personne une question de vie ou de mort. Une fois encore, le Nigeria manque à ses obligations envers les enfants de manière déplorable », a déclaré Osai Ojigho, directrice d’Amnesty International Nigeria.
« Aucun enfant ne devrait vivre ce que les enfants subissent actuellement au Nigeria. L’éducation ne devrait être pour personne une question de vie ou de mort »
Dans certaines régions du nord du Nigeria, les élèves sont constamment en danger de mort ou d’enlèvement. Depuis février 2021, ce sont plus de 780 enfants qui ont été enlevés contre rançon lors d’attaques massives contre des établissements scolaires ou des institutions religieuses, certains de ces enfants ayant été tués pendant ces exactions. Les parents des enfants enlevés ou les autorités scolaires sont parfois obligés de fournir de la nourriture et des vêtements aux enfants pendant leur captivité », a déclaré Osai Ojigho.
L’avenir de milliers d’élèves dans le nord du Nigeria demeure bien sombre, avec la fermeture de centaines d’établissements scolaires pour une durée indéterminée dans certains États en raison de l’insécurité croissante. De nombreux enfants ont abandonné leur scolarité en raison du traumatisme psychologique lié aux attaques violentes dont ils ont été témoins ou à leur vie en captivité.
Une personne enseignant dans une école primaire dans la localité où 317 adolescentes ont été enlevées le 26 février 2021 (dans la zone de gouvernement local de Jangebe, État de Zamfara) a déclaré à Amnesty International que l’insécurité a considérablement réduit la fréquentation des établissements scolaires, les enfants ayant peur d’aller à l’école même s’ils y sont contraints par leurs parents.
Un garçon de 15 ans, qui a été blessé pendant qu’il fuyait lors d’un enlèvement de masse dans son école, a déclaré à Amnesty International qu’il ne retournerait pas à son école lorsqu’elle ouvrira à nouveau.
« Ce sont plus de 780 enfants qui ont été enlevés contre rançon lors d’attaques massives contre des établissements scolaires ou des institutions religieuses »
« Si l’école ouvrait à nouveau, je ne retournerai pas au pensionnat, je préférerais être un externe dans un autre établissement. J’ai peur chaque fois que je me souviens de ce qui s’est passé ; c’est bouleversant et je veux que tous les enfants, particulièrement mes cousins, soient sauvés ».
« Lorsque des établissements scolaires sont pris pour cible ou attaqués, les dégâts causés et leurs conséquences peuvent être majeurs et avoir des ramifications très profondes. Protéger la vie des enfants est primordial, et les autorités nigérianes ont le devoir de veiller à ce que le secteur éducatif du pays ne soit pas davantage mis en péril par les enlèvements, les manœuvres d’intimidation et les meurtres d’élèves ».
La section 27 de la loi relative aux droits de l’enfant interdit l’enlèvement d’enfants. Ayant ratifié la Charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant et la Convention des Nations unies relative aux droits de l’enfant, le Nigeria a l’obligation de prendre des mesures appropriées pour prévenir les enlèvements d’enfants et garantir le droit des enfants à l’éducation.
Morts en captivité ou pendant les attaques
Deux filles et un garçon, qui avaient été kidnappés le 17 juin 2021 dans le Federal Government College de Birnin Yauri, dans l’État de Kebbi, ont été retrouvés morts, plusieurs jours après leur enlèvement. Deux de ces enfants avaient reçu des balles dans leurs jambes, tandis que le troisième semblait être décédé en raison de problèmes de santé.
Le 6 juin 2021, le corps d’un garçon de 3 ans enlevé à l’école islamique Salihu Tanko, à Tegina, dans l’État du Niger, a été retrouvé à quelques kilomètres de la ville, tandis que cinq autres enfants kidnappés pendant le raid sont également morts en captivité. Au moins 136 enfants âgés de 3 à 15 ans ont été enlevés pendant le raid puis libérés le 26 août après des mois de captivité.
« L’utilisation d’enfants comme boucliers ou monnaie d’échange est inacceptable et doit cesser »
Le 17 février, Benjamin Doma a été tué pendant qu’il tentait de fuir une attaque menée dans son école, le Government Science College de Kagara, dans l’État du Niger. Au cours de ce raid, 27 élèves ont été enlevés.
Le 19 septembre, Edeh Donald, un élève de la Marist Comprehensive Academy, à Uturu, dans l’État d’Abia, est mort lorsque son bus scolaire a été attaqué par des hommes armés le long de la route d’Ihube, dans la zone de gouvernement local de Okigwe, alors qu’il revenait d’une excursion avec ses camarades de classe.
« Les groupes armés s’en prennent délibérément aux enfants. L’utilisation d’enfants comme boucliers ou monnaie d’échange est inacceptable et doit cesser. Le gouvernement nigérian doit enquêter sur ces attaques en tant que crimes de guerre et crimes contre l’humanité », a déclaré Osai Ojigho, directrice d’Amnesty International Nigeria.
Les enfants en captivité
De nombreux enfants enlevés ont été relâchés après des négociations, mais plus de 61 enfants sont toujours en captivité plusieurs mois après leur enlèvement. Au moins 56 enfants du Federal Government College de Birnin Yauri, dans l’État de Kebbi, sont toujours en captivité 167 jours après leur enlèvement le 17 juin 2021. De plus, 102 élèves ainsi que huit membres du personnel enseignant et non enseignant ont été enlevés au cours du raid.
À Kaduna, trois étudiants enlevés au lycée Bethel Baptist le 5 juillet 2021 sont toujours en captivité après 149 jours. Au moins 121 enfants âgés de 10 à 15 ans ont été enlevés lors du raid dans la zone de gouvernement local de Chikun.
« Le gouvernement nigérian doit enquêter sur ces attaques en tant que crimes de guerre et crimes contre l’humanité »
Des enfants, dont un nourrisson, figurent parmi les 66 personnes toujours en captivité après leur enlèvement survenu le 31 octobre 2021 dans l’église baptiste Emmanuel, dans la zone de gouvernement local de Chikun, de l’État de Kaduna.
« Les attaques contre les écoles, les enlèvements et les meurtres d’élèves témoignent d’un mépris absolu pour le droit à la vie et le droit à l’éducation. Les autorités nigérianes doivent assurer la protection des écoles et des enfants. Les attaques contre les écoles constituent une violation du droit international et les autorités doivent veiller à ce que ces attaques fassent l’objet d’une enquête rigoureuse et que les auteurs présumés soient traduits en justice dans le cadre de procès équitables, sans recours à la peine de mort, a déclaré Osai Ojigho.
Complément d’information
Amnesty International Nigeria a demandé à de nombreuses reprises que les enfants soient protégés lors de contextes de crise et qu’il soit mis un terme aux attaques visant les écoles [1].