La chronologie, disponible ici [1], rassemble des photos et des images vidéo permettant de confirmer que des véhicules de l’armée nigériane ont quitté le camp de Bonny, une base militaire située à environ sept minutes de voiture du péage, à 06 h 29, heure locale, le 20 octobre.
Des images vidéo permettent ensuite de suivre les véhicules jusqu’au péage. À environ 06 h 45, l’armée nigériane a ouvert le feu sur des manifestant·e·s du mouvement #EndSARS qui demandaient pacifiquement la fin des violences policières.
« Ce qui est arrivé au péage de Lekki présente toutes les caractéristiques des méthodes de dissimulation que les autorités nigérianes emploient dès que leurs forces de défense et de sécurité commettent des homicides illégaux », a déclaré Osai Ojigho, directrice d’Amnesty International Nigeria.
« Une semaine après les faits, les autorités nigérianes doivent toujours répondre à de nombreuses questions : qui a ordonné le recours à une force meurtrière contre les manifestant·e·s pacifiques ? Pourquoi les caméras de surveillance sur les lieux avaient-elles été désactivées préalablement ? Et qui a ordonné la coupure d’électricité intervenue quelques minutes avant que les militaires ouvrent le feu sur les manifestant·e·s ?
« Ce qui est arrivé au péage de Lekki présente toutes les caractéristiques des méthodes de dissimulation que les autorités nigérianes emploient dès que leurs forces de défense et de sécurité commettent des homicides illégaux. »
« Les déclarations initiales niant l’implication des militaires dans la fusillade ont été suivies de déclarations honteuses niant les morts provoquées par l’attaque des militaires contre les manifestant·e·s.
« De nombreuses personnes sont toujours portées disparues depuis les événements et des éléments de preuve crédibles montrent que l’armée a empêché les ambulances d’arriver jusqu’aux personnes gravement blessées après les coups de feu. »
Amnesty International appelle de nouveau les autorités nigérianes à traduire en justice les personnes responsables des coups de feu et à protéger les personnes exerçant leur droit à la liberté de réunion. L’organisation enquête toujours sur les coups de feu et sur le déplacement présumé des corps des personnes tuées par l’armée, destiné à dissimuler des éléments de preuve.
Suivi des déplacements de l’armée
Les experts en matière de réaction aux crises d’Amnesty International ont enquêté et authentifié des vidéos et photos publiées sur les réseaux sociaux et confirmant que les forces de sécurité nigérianes étaient présentes au péage de Lekki lorsque les coups de feu ont été tirés.
À 06 h 29, heure locale de Lagos, deux véhicules militaires ont été filmés en train de quitter le camp de Bonny et ces vidéos ont été diffusées sur les réseaux sociaux. Des images vidéo prises après montrent quatre véhicules, qui semblent être des véhicules utilisés par l’armée et la police du Nigeria, gyrophares allumés, dans un convoi.
Ces mêmes véhicules se dirigent vers l’est sur l’avenue Ozumba Mbadiwe, qui change de nom et devient l’autoroute Lekki-Epe Expressway, en direction du péage de Lekki. Sur ce trajet, les véhicules passent devant plusieurs ambassades et consulats, notamment l’ambassade japonaise et le haut-commissariat d’Australie.
D’autres photos et images vidéo montrent l’arrivée des véhicules au péage, avant que la manifestation pacifique soit interrompue par des hommes en uniforme militaire et que des coups de feu retentissent. Alors que la nuit tombait, des manifestant·e·s ont continué de filmer et de partager les vidéos sur les réseaux sociaux. Plus tard dans la soirée, des vidéos des victimes ont également été diffusées sur les réseaux sociaux.
Complément d’information
Amnesty International suit l’évolution de la situation au Nigeria depuis que le mouvement #EndSars a commencé le 8 octobre 2020.
De jeunes Nigérian·e·s descendent pacifiquement dans la rue pour réclamer la fin des violences policières, des exécutions extrajudiciaires et des extorsions commises par la Brigade spéciale de répression des vols (SARS), une unité de la police nigériane en charge de la lutte contre les crimes violents.
Au moins 56 personnes ont été tuées dans le pays depuis le début des manifestations. Dans de nombreux cas, les forces de sécurité ont eu recours à une force excessive pour tenter de contrôler ou d’arrêter les manifestations.