Nigeria : Les responsabilités du gouvernement dans la violence des groupes d’autodéfense

Index AI : AFR 44/020/02 19 novembre 2002

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

« Tout groupe d’autodéfense armé remplissant au Nigéria, avec l’appui des autorités, des fonctions de maintien de l’ordre sans respecter les droits humains doit être démantelé de façon définitive, et les membres de ces groupes qui se sont rendus responsables de violations des droits humains doivent être traduits en justice », a déclaré aujourd’hui Amnesty International dans un rapport sur la violence des groupes d’autodéfense dans le sud et le sud-est du pays. Trois ans après le retour du pouvoir civil au Nigéria, la hausse de la délinquance et de l’insécurité, ainsi que le manque d’efficacité imputé aux forces de sécurité, ont conduit à la multiplication des groupes d’autodéfense, au niveau local comme à celui des États.
« Des groupes d’autodéfense armés remplissent des fonctions de maintien de l’ordre dans de plus en plus d’États, avec le soutien tacite et parfois explicite des gouvernements de ces États, en particulier dans le sud-est du Nigéria. Ces milices soutenues par les États se rendent régulièrement responsables d’exécutions extrajudiciaires, de détentions illégales, ainsi que d’actes de torture et autres traitements cruels, inhumains et dégradants envers des suspects de droit commun », a déclaré Amnesty International. Selon l’organisation, le gouvernement fédéral nigérian ne doit pas seulement répondre des nombreuses violations des droits humains perpétrées par ses propres forces de sécurité, il est aussi pleinement responsable des groupes chargés du maintien de l’ordre officiellement soutenus par les autorités locales ou celles d’un État. Le gouvernement doit également reconnaître qu’il n’a pas réussi à contrôler les groupes qui commettent des violations des droits humains, ni à arrêter et traduire en justice les responsables de ces violations. Dans les États d’Abia, d’Anambra et d’Imo, des groupes d’autodéfense armés, connus sous le nom de « Bakassi Boys », se sont rendus coupables d’exécutions extrajudiciaires, d’actes de torture et autres traitements cruels et inhumains à l’encontre de suspects de droit commun, ainsi que de détentions illégales, avec le soutien des gouvernements des États. Au cours des deux dernières années, des centaines de personnes auraient été exécutées de manière extrajudiciaire par l’Anambra State Vigilante Service, un groupe d’autodéfense officiellement reconnu par le gouvernement de l’État d’Anambra. Dans son rapport, Amnesty International accueille favorablement les mesures prises par la police du Nigéria pour démanteler des groupes d’autodéfense armés du sud-est, principalement dans les États d’Abia et d’Anambra. L’organisation prévient néanmoins les autorités que cette initiative pourrait se révéler insuffisante en l’absence de suivi durable, d’application de ces mesures à l’ensemble du Nigéria, et de poursuites judiciaires à l’encontre des responsables des violations des droits humains commises par des membres de ces groupes d’autodéfense armés soutenus par les États.
« En raison d’une pression sociale de plus en plus forte due à la hausse de la délinquance et aux maigres résultats obtenus par les forces de l’ordre nigérianes, et parallèlement à l’approche de la campagne pour les élections présidentielles prévues en avril 2003, il existe un risque évident d’une aggravation des violations des droits humains par des groupes d’autodéfense bénéficiant du soutien déclaré ou tacite des États, dans le contexte d’une lutte pour le pouvoir », a souligné Amnesty International.
« La police doit, dans sa lutte contre la criminalité, respecter toutes les normes internationales en matière de droits humains et de recours à la force par ses agents », a rappelé Amnesty International. L’organisation demande aux gouvernements, à l’échelon local comme à celui des États, de considérer le respect et la protection des droits humains comme une priorité politique, et de faire en sorte qu’aucune violation des droits humains ou exaction commise par un groupe armé ne reste impunie.

NB : Dans ce rapport, le terme de groupe d’autodéfense armé s’applique à deux catégories différentes :
1. Les groupes d’autodéfense armés officiellement reconnus par les autorités de certains États : C’est le cas des « Bakassi Boys » dans les États d’Imo, d’Abia et d’Anambra. Ces groupes ont publiquement reçu le soutien officiel du gouverneur de l’État, de son Assemblée ou des deux, pour remplir des fonctions de maintien de l’ordre. Dans ce cas, Amnesty International considère que, même si le gouvernement fédéral est opposé à ce soutien officiel, il reste pleinement responsable des actes de ces groupes. Lorsque ces groupes ne respectent pas les normes relatives aux droits humains, il s’agit de violations de ces droits.
2. Les groupes d’autodéfense armés ayant reçu le soutien tacite de certains gouverneurs d’État. C’est le cas de l’OPC dans l’État de Lagos, et d’autres groupes opérant déjà dans certains États où les autorités envisagent de les soutenir publiquement. Amnesty International considère que si ces groupes ne respectent pas les droits humains, il s’agit d’exactions. De toute évidence, le gouvernement fédéral a la responsabilité de démanteler immédiatement ces groupes et de traduire en justice ceux de leurs membres qui auraient commis des exactions.

Pour en savoir plus, veuillez consulter le rapport intitulé NIGERIA : Vigilante violence in South and South-East [Nigéria ; Violence des groupes d’autodéfense dans le sud et le sud-est du Nigéria] (index AI : AFR 44/021/02).

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