Amnesty s’est réjoui de la mise en place, début novembre, du projet pilote de « Centres de prise en charge des victimes de violences sexuelles » à Bruxelles, Liège et Gand. Cette initiative répond à la plupart des recommandations d’Amnesty International et de SOS Viol, avec notamment la présence 24 heures sur 24 d’un personnel formé (y compris des infirmières légistes et des policiers spécialisés), la gratuité des soins, la possibilité d’effectuer un examen médico-légal en dehors d’un dépôt de plainte, ou encore les conditions optimales d’audition. La Belgique se conforme ainsi à l’une de ses obligations au terme de la Convention d’Istanbul, qu’elle a ratifiée en 2016.
« La mise en place de ces centres représente une réelle avancée, mais nous demandons au gouvernement de veiller à ce que le financement de ces institutions subsiste pour que le projet soit pérennisé et de faire en sorte que chaque victime puisse bénéficier d’un accueil optimal où qu’elle soit en Belgique », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International.
Amnesty International salue également la volonté de la Fédération Wallonie-Bruxelles de continuer à financer et faire connaître, près d’un an après sa création, la ligne téléphonique gratuite SOS Viol. L’organisation déplore cependant que ce numéro ne soit pour le moment pas un numéro d’urgence et l’encourage à ouvrir la ligne 7 jours sur 7 et 24 heures sur 24.
Malgré ces avancées, de nombreux problèmes subsistent, comme le manque de formation initiale et continue de tous les professionnels susceptibles d’être en contact avec des victimes de violences sexuelles (policiers, travailleurs médico-sociaux, professionnels de la justice, etc.).
Par ailleurs, le genre des victimes n’est toujours pas enregistré par la police. Il apparaît pourtant indispensable de pouvoir quantifier les cas de viols commis sur des femmes afin de mettre en exergue la spécificité de cette forme de violence - en ce qu’elle affecte particulièrement des personnes de sexe féminin - et de pouvoir lutter plus efficacement contre elle. Une telle collecte des données permettrait à la Belgique de se mettre en conformité avec les recommandations de la Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique.
Il est aussi inquiétant de constater que seule une petite minorité des plaintes déposées aboutissent à une condamnation judiciaire, ce qui est inférieur à la moyenne européenne en la matière. Amnesty International demande que les autorités mènent des recherches qualitatives et quantitatives sur cet état de fait afin de pouvoir prendre les mesures nécessaires pour lutter contre l’impunité des auteurs de viols.
En outre, le financement des organisations actives dans le domaine de la lutte contre les violences sexuelles et la prise en charge des victimes tend à se réduire d’année en année et la généralisation des cours d’Éducation à la vie relationnelle, affective et sexuelle (EVRAS) sur le territoire de la Fédération Wallonie-Bruxelles n’est toujours pas une réalité, malgré l’obligation qui en a été donnée en 2012.
« Nous encourageons les autorités compétentes à prendre les mesures qui s’imposent pour améliorer la prise en charge des victimes de violences sexuelles, notamment en finançant correctement les services d’aide aux victimes afin qu’ils puissent répondre à la demande et se faire connaître auprès du grand public », indique Philippe Hensmans.
Complément d’information
En 2014, Amnesty International et SOS Viol ont réalisé une enquête auprès de 2 000 Belges qui a révélé des chiffres alarmants et témoigne de la réalité du viol en Belgique.
À la suite de cette enquête, Amnesty International a lancé une grande campagne intitulée « Quand c’est non, c’est non ! » visant notamment à faire prendre conscience de l’ampleur du problème en Belgique et à informer les victimes de viol de leurs droits et recours, et demandant aux autorités une meilleure prise en charge des victimes.