Communiqué de presse

ONU. La terrible situation des droits humains au Mexique requiert des actes concrets de la part des autorités, pas des discours

Les autorités mexicaines devront concrétiser les promesses qu’elles feront devant le Conseil des droits de l’homme des Nations unies jeudi 20 mars si elles entendent trouver une issue à la terrible situation des droits humains dans leur pays, a déclaré Amnesty International mercredi 19 mars.

« Le Mexique doit adopter des mesures durables et efficaces pour lutter contre les disparitions forcées, actes de torture et détentions arbitraires, qui constituent des pratiques bien établies, ainsi que contre la banalisation des attaques visant les journalistes, les migrants, et les femmes et les hommes qui défendent les droits humains. Il ne faut pas que les autorités se dispensent une nouvelle fois de respecter les engagements pris auprès de la communauté internationale », a déclaré Salil Shetty, le secrétaire général d’Amnesty International.

Jeudi 20 mars, le Mexique annoncera aux membres du Conseil des droits de l’homme quelles recommandations il adoptera parmi les 176 présentées par ces États. En 2009, lorsqu’il s’est présenté pour la dernière fois devant cet organe, le Mexique a déclaré qu’il mettrait en œuvre la majorité des recommandations. Il a cependant négligé de nombreuses questions par la suite, échouant alors dans la prévention de la crise des droits humains, qui continue à ce jour.

Bien qu’il soit positif que le gouvernement mexicain ait annoncé qu’il acceptera la plupart des recommandations, certains signes inquiétants font craindre qu’il ne maintienne le statu quo et que ses paroles ne soient pas suivies d’actes.

Les recommandations portant sur l’abolition de l’arraigo, une forme de détention constituant un problème majeur des droits humains, ont ainsi été rejetées. En vertu de cette forme de détention provisoire prolongée, un suspect peut être incarcéré pour une durée maximum de 80 jours sans être présenté devant un juge.

« L’arraigo ouvre la porte à de nombreuses violations des droits humains, notamment la torture et l’extorsion d’aveux, qui mènent à leur tour à des procès iniques. Le refus d’abolir l’arraigo est un signe profondément négatif du véritable niveau d’engagement du gouvernement en faveur du respect des droits fondamentaux de tous », a déclaré Salil Shetty.

La réforme du Code de justice militaire est un autre motif de préoccupation majeur. Le Mexique a accepté des recommandations sur la nécessité de veiller à ce que l’ensemble des allégations selon lesquelles des membres des forces armées ont commis des violations des droits humains donnent lieu à une enquête, et à ce que les auteurs présumés soient poursuivis et jugés par le système civil de justice.

Cette semaine, le Sénat examine une proposition de réforme susceptible d’exclure les violations des droits humains commises par des militaires contre des civils de la liste des infractions que les tribunaux militaires sont habilités à juger. Elle ne s’appliquera cependant pas aux violations des droits humains perpétrées par des membres du personnel militaire contre leurs collègues.

Cette proposition est un pas dans la bonne direction, mais elle n’est toujours pas pleinement conforme aux normes internationales en matière de droits humains, quoi qu’en dise le gouvernement.

« Nous détectons une insouciance inquiétante dans l’attitude du Mexique vis-à-vis du Conseil. Il affirme que des mesures législatives et administratives déjà en vigueur correspondent à un grand nombre des recommandations des Nations unies, mais il risque alors de ne pas résoudre les problèmes se posant avec acuité dans le pays en matière de droits humains », a déclaré Salil Shetty.

« Cette attitude fait fi de la difficile situation de ceux qui sont le plus affectés par les violations des droits humains. Ce qu’endurent au quotidien les familles de « disparus », de victimes de la torture, de meurtre et de violences n’a pas changé. Les promesses du gouvernement leur semblent creuses et sans effet – c’est l’impunité qui règne. »

Amnesty International a demandé à maintes reprises au gouvernement mexicain de mettre en œuvre de toute urgence les recommandations du Conseil des droits de l’homme des Nations unies afin de lutter contre les violations des droits fondamentaux et l’impunité généralisées. L’organisation l’exhorte en particulier à :
• garantir le respect des normes internationales en matière de droits humains dans l’ensemble des opérations de maintien de l’ordre et de sécurité, notamment en diligentant dans les meilleurs délais des enquêtes approfondies et impartiales sur l’ensemble des violations des droits humains ;
• adopter des mesures concrètes et efficaces afin de prévenir et de punir la torture et les autres formes de mauvais traitements ;
• renforcer les mesures en vigueur concernant les enquêtes sur les enlèvements et disparitions forcées, notamment les procédures de recherche des victimes, et à obliger les responsables présumés à rendre des comptes ;
• renforcer les mécanismes globaux de protection des défenseurs des droits humains et des journalistes afin de mettre un terme aux attaques dont ils sont victimes, et à faire en sorte que les responsables présumés de ces agressions soient traduits en justice ;
• mettre en œuvre des mesures efficaces visant à prévenir et sanctionner toutes les formes de violence contre les femmes ;
• renforcer les mesures de protection des droits sexuels et reproductifs des femmes, en dépénalisant l’avortement et en garantissant que les femmes et les jeunes filles puissent avorter légalement et en toute sécurité dans les cas de viol, d’inceste et lorsque leur santé est menacée ;
• veiller à ce que les projets d’extraction de ressources et de développement économique ayant un impact sur les populations autochtones puissent seulement aller de l’avant si celles-ci ont accordé au préalable leur consentement libre et éclairé ;
• prévenir et punir les abus contre les migrants en transit, qu’ils soient commis par des bandes criminelles ou des représentants de l’État.

« Il est vital que le gouvernement travaille avec la société civile afin de mettre en œuvre des mesures concrètes et efficaces pour lutter contre la situation critique des droits humains au Mexique. Le gouvernement doit y consacrer des ressources financières et garantir un soutien politique de haut niveau, à tous les échelons de l’État fédéral », a déclaré Salil Shetty.

Complément d’information

Le secrétaire général d’Amnesty International a récemment rencontré Enrique Peña Nieto, le président du Mexique, ainsi que d’autres hauts responsables mexicains, dont des ministres, des représentants du pouvoir judiciaire et des députés, à l’occasion d’une mission de haut niveau au Mexique ayant eu lieu du 15 au 19 février.

Salil Shetty a présenté au président une note demandant la mise en œuvre en urgence de certaines mesures dans le but de combattre l’impunité généralisée et les violations graves des droits humains.

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