OUGANDA Enquête de la Cour pénale internationale : un pas important pour mettre fin à l’impunité

DÉCLARATION PUBLIQUE

L’annonce de l’ouverture d’une enquête par la Cour pénale internationale
(CPI) sur les crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis dans le
nord de l’Ouganda n’est qu’un premier pas vers la justice pour des dizaines
de milliers de victimes.

Amnesty International salue les déclarations du procureur de la CPI qui a
affirmé qu’il enquêterait aussi bien sur les crimes que sont accusés d’avoir
commis les membres de la Lord’s Resistance Army (LRA, Armée de résistance du
Seigneur) que sur ceux des membres des forces gouvernementales.

Toutefois, l’organisation insiste sur le fait qu’il faudra faire plus,
notamment parce que la CPI n’a compétence pour enquêter et engager des
poursuites que pour les crimes commis après le 1er juillet 2002.

Un plan national d’action à long terme est nécessaire de toute urgence pour
mettre fin à l’impunité pour tous les crimes reconnus comme tels en droit
international commis en Ouganda, quelle que soit la date à laquelle ils ont
été perpétrés et quel que soit le statut officiel de ceux qui en sont les
auteurs. Le plan d’action doit veiller à ce que des tribunaux soient
effectivement en place dans toutes les régions du pays, que la sécurité des
victimes et des témoins soit protégée et que les victimes et leurs familles
obtiennent les réparations auxquelles elles ont droit conformément au droit
international et aux normes internationales.

En plus du plan d’action, le gouvernement doit prendre cinq mesures
essentielles, à la fois pour coopérer avec la CPI et pour remplir ses
obligations propres d’enquêter sur les crimes contre l’humanité et les
crimes de guerre et de poursuivre ceux qui en sont les auteurs.

En premier lieu, il doit modifier le projet de loi de 2004 portant mise en
œuvre du statut de la Cour pénale internationale, reconnaître en droit
national les crimes définis comme tels dans le Statut de Rome de la Cour
pénale internationale et coopérer pleinement avec la CPI. Amnesty
International a adressé ce 29 juillet un commentaire détaillé du projet de
loi au ministre de la Justice, saluant le travail effectué jusqu’ici mais
demandant que le projet de loi soit modifié pour le rendre conforme aux
obligations de l’Ouganda au regard du Statut de Rome et d’autres textes de
droit international, en excluant, entre autres, tout recours à la peine de
mort.

En second lieu, il le gouvernement doit ratifier et mettre en application
dès que possible l’Accord sur les privilèges et immunités de la Cour pénale
internationale. Cet Accord est un outil essentiel pour s’assurer que la CPI
pourra enquêter sans rencontrer d’obstacles.

Troisièmement, le Parlement ne doit pas ratifier et le gouvernement ne doit
pas appliquer l’accord d’impunité qu’il a signé avec les États-Unis, qui
engage l’Ouganda à ne pas remettre de ressortissants des États-Unis à la
Cour pénale internationale.

Quatrièmement, le gouvernement doit veiller à ce que la Loi d’amnistie de
1999 ne s’applique pas à des crimes relevant du droit international.

Cinquièmement, le gouvernement doit apporter toute l’assistance possible à
la CPI pour assurer la protection des victimes, des témoins et des
enquêteurs de la CPI, pour la communication des éléments de l’enquête, la
protection des preuves matérielles, et l’arrestation et la remise sans délai
à la CPI des personnes inculpées.

La CPI jouera un rôle particulièrement important dans la sécurité des
victimes et des témoins, notamment en identifiant les personnes en danger et
en assurant leur protection. De plus, il faut que la CPI commence
immédiatement à informer la population de RDC de son existence et de son
fonctionnement.

Enquêter sur des crimes relevant du droit international en Ouganda et
poursuivre leurs auteurs ne sont pas de la seule responsabilité du
gouvernement et de la CPI. Il s’agit de crimes contre la communauté
internationale entière et contre la notion même de droit international.
Amnesty International appelle la communauté internationale à remplir ses
obligations en prêtant assistance à la CPI et en aidant l’Ouganda à élaborer
et mettre en place un plan d’action efficace pour mettre fin à l’impunité
régnante.

Complément d’information

L’annonce faite ce 29 juillet par le procureur de la CPI qu’une enquête
était ouverte intervient après l’enquête préliminaire sur les crimes commis
en Ouganda depuis juillet 2002. Cette enquête avait été ouverte à la demande
du gouvernement de l’Ouganda en janvier 2004 ; c’était la première fois que
la CPI était saisie d’une situation par un État. Le procureur a reçu des
informations de très nombreuses sources.

Le conflit qui fait rage depuis dix-huit ans dans le nord de l’Ouganda a
fait des milliers de victimes parmi les civils. La situation s’est encore
détériorée en 2003. Ce conflit s’accompagne de déplacements massifs de
population, d’homicides arbitraires, de mutilations, d’enlèvements et
d’enrôlements forcés. La LRA est notamment accusée d’enlever des enfants,
qu’elle utiliserait comme combattants ou esclaves sexuels, les emmenant
parfois de l’autre côté de la frontière, au Soudan. La manière dont sont
traités les enfants qui quittent leurs ravisseurs, volontairement ou à la
suite d’opérations militaires, est aussi sujette à controverse. En effet,
les forces de sécurité ougandaises ont été accusées de reformer certains de
ces enfants à des fins militaires pour les utiliser dans la lutte contre la
LRA.

L’enquête en Ouganda est la seconde enquête annoncée par la Cour pénale
internationale depuis sa mise en place il y a deux ans. La première,
annoncée le 23 juin 2004, porte sur les crimes commis en République
démocratique du Congo depuis juillet 2002.

Index AI : AFR 59/006/2004
ÉFAI

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