OUGANDA. Les victimes de viol et de violences sexuelles sont privées de justice

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

ÉFAI-7 avril 2010

Dans un rapport rendu public mercredi 7 avril, Amnesty International exhorte les autorités ougandaises à soutenir les femmes cherchant à obtenir justice pour des actes de violence sexuelle et domestique. Ce document met l’accent notamment sur les obstacles auxquels sont confrontées les victimes.

Intitulé “I Can’t Afford Justice” – Violence against women in Uganda, le rapport détaille les obstacles économiques et sociaux à l’exercice de la justice, tels que le coût des enquêtes criminelles ou la discrimination exercée par les représentants du gouvernement.

Par exemple, ce sont les victimes qui doivent payer le transport des policiers chargés d’arrêter l’accusé, les frais d’examens médico-légaux et les autres frais liés à l’enquête.

Dans ce pays où le gouvernement semble souvent promouvoir la « préservation de l’unité familiale » plutôt que la justice pour les victimes, certains hauts responsables ont tendance à reprendre à leur compte l’idée largement répandue selon laquelle ce sont les femmes qui sont à blâmer en cas de violence sexuelle.

« Le fait que le gouvernement ne protège pas et ne soutienne pas les victimes de violences sexuelles sape toute quête de justice, a déclaré Widney Brown, directrice de programme à Amnesty International. Le manque de ressources et de volonté politique du gouvernement a pour effet que les auteurs de ces violences sont rarement déférés à la justice. Les Ougandaises ne font plus confiance à la justice. »

Les violences contre les femmes, les jeunes filles et les fillettes sont toujours très répandues en Ouganda. Les deux tiers des femmes victimes de violences domestiques indiquent que celles-ci étaient le fait de leur compagnon ou conjoint, et une femme sur quatre affirme que sa première expérience sexuelle était forcée.

Le rapport décrit plusieurs cas personnels montrant à quel point la police, le parquet et les tribunaux manquent de ressources financières et de personnel. Le fait que ces institutions ne soient pas en mesure de fournir les services adéquats aux victimes dissuadent celles-ci de faire appel à la justice.

« Lorsque je suis allée au poste de police ils m’ont demandé de l’argent pour l’essence, a déclaré une victime à Amnesty International. Mon mari m’a de nouveau frappée mais j’ai renoncé à aller à la police parce qu’ils demandent toujours de l’argent et que je n’en ai pas. »

Il n’y a pas de foyer d’accueil géré par l’État pour les victimes de violences domestiques. Les foyers gérés par des associations n’arrivent plus à faire face et doivent refuser des femmes, et les services d’aide judiciaires sont débordés par les cas de violence fondée sur le genre. De nombreuses femmes continuent de subir des violences chez elles simplement parce qu’elles n’ont pas d’autres endroits où aller.

Les réactions officielles et le fait qu’elles n’ont pas les moyens de subvenir à leurs besoins ou à ceux de leurs enfants ont pour effet que de nombreuses femmes pensent qu’elles n’ont pas d’autre choix que d’accepter la médiation et subir une relation violente qui les met en danger. De nombreuses femmes sont ainsi privées de leur droit de ne pas être soumises à des violences et de bénéficier de la même protection de la loi.

Même lorsque la police finit par prendre un cas au sérieux peu de dispositifs existent pour protéger les victimes. Des conseillères d’un foyer d’accueil ont fait état à Amnesty International du cas d’une adolescente de 13 ans s’étant plainte d’être victime depuis des années de violences sexuelles de la part de son père. Depuis qu’elle est venue signaler ces viols elle fait l’objet de manœuvres d’intimidation de la part de ses proches et elle craint pour sa sécurité. La personne qui s’occupe de son cas pense que l’adolescente n’est pas en sécurité là où elle se trouve actuellement.

Le rapport fait état de la nécessité pour le gouvernement de doter la justice de ressources suffisantes pour que les auteurs de violences à l’encontre des femmes puissent être jugés, tout en soulignant que les autorités n’ont pas pris certaines mesures élémentaires pour que le système fonctionne pour les femmes.

Par exemple, il n’y a aucun dispositif de confidentialité lorsqu’une victime doit faire sa déposition dans un lieu public et décrire en détail les violences qui lui ont été infligées.

De nombreuses femmes à qui Amnesty International s’est adressée ont raconté qu’elles avaient été questionnées de manière humiliante sur leur vie privée et leurs relations sexuelles antérieures par du personnel policier et des avocats sans formation spécifique.

Le gouvernement ougandais est également loin de remplir ses obligations internationales en ce qui concerne l’accès des femmes à la justice. Cette situation permet aux auteurs de violences sexuelles d’échapper aux poursuites et sanctions pour leurs crimes.

« Le gouvernement doit examiner attentivement sa législation, ses politiques et ses pratiques et combler le gouffre qui sépare son discours sur le respect des droits des femmes et son échec patent en ce qui concerne la protection et le respect de ces droits », a conclu Widney Brown.

Amnesty International exhorte le gouvernement à prendre immédiatement des mesures pour faire en sorte que les femmes victimes de violences bénéficient du soutien juridique et des services de santé, de sécurité et d’accueil dont elles ont besoin.

Il devrait également s’attaquer aux raisons qui sous-tendent la violence contre les femmes en transformant les comportements discriminatoires et en levant les obstacles qui empêchent les femmes d’obtenir justice lorsqu’elles sont victimes de ces agissements.

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