Pakistan : La justice pénale ne devrait pas servir à harceler ni à intimider les journalistes

Les autorités pakistanaises doivent faire en sorte que la justice pénale ne donne pas lieu au harcèlement ni à l’intimidation de journalistes.

L’organisation de défense des droits humains a fait part de ses préoccupations à l’annonce des décisions rendues par la haute cour de Lahore, qui a émis un mandat d’arrêt non susceptible de caution à l’encontre du journaliste pakistanais bien connu, Cyril Almeida, et lui a interdit de quitter le territoire.

Cyril Almeida, rédacteur en chef adjoint du journal Dawn, a été cité à comparaître à la suite d’une interview qu’il a organisée en mai 2018 avec l’ancien Premier ministre pakistanais, Nawaz Sharif, qui doit répondre d’une accusation de trahison pour avoir évoqué lors de cette interview l’existence d’un lien présumé entre l’armée pakistanaise et des groupes armés.

« Cyril Almeida n’a fait qu’exercer son activité journalistique. Il s’est entretenu avec un ancien Premier ministre et a relayé les propos tenus par son interlocuteur. Même si la haute cour de Lahore est en droit de le convoquer, les autorités doivent veiller à ne pas utiliser la justice pénale pour harceler ou intimider des journalistes. Le journalisme n’est pas un crime, et les journalistes qui font leur travail ne devraient pas être considérés comme des criminels  », a déclaré Omar Waraich, directeur adjoint pour l’Asie du Sud à Amnesty International.

La haute cour a précisé que le journaliste devait absolument comparaître, car elle l’avait déjà convoqué à plusieurs reprises. La rédaction du journal Dawn a toutefois indiqué que les deux premiers mandats ne lui avaient jamais été remis, et que le troisième n’était arrivé que la semaine du 17 septembre.

Cyril Almeida et la rédaction du journal ont tous deux fait savoir qu’ils étaient prêts à coopérer pleinement avec la justice.

Ce n’est pas la première fois que Cyril Almeida se voit infliger une interdiction de voyager. Son nom avait été ajouté à la liste des personnes dont la sortie du territoire est soumise à contrôle par le Pakistan en octobre 2016, à la suite du tollé provoqué par un article qu’il avait publié sur les tensions entre le gouvernement civil alors en exercice et l’armée, au sujet de relations présumées avec des groupes armés.

En 2016, Cyril Almeida et Zaffar Abbas, le rédacteur en chef de Dawn, avaient comparu devant une commission judiciaire d’enquête de haut niveau, qui les avait interrogés au sujet de cet article.

Ces derniers mois, après la publication de l’interview de Nawaz Sharif par Cyril Almeida, la distribution des exemplaires a été lourdement perturbée dans le pays et le journal fait l’objet de pressions intenses en raison de sa ligne éditoriale indépendante.

Les marchands de journaux ont été avertis qu’ils ne devaient pas exposer ce titre à la vente, tandis que les vendeurs de rue le proposant ont été harcelés et intimidés.

Le 7 juin 2018, à l’occasion d’une réunion de l’All Pakistan Newspaper Society, à Islamabad, Hameed Haroon, le PDG de Dawn Media Group a mis en garde contre « l’attaque la plus dangereuse » visant le droit à la liberté d’expression que subissait le Pakistan.

« Le nouveau gouvernement du Premier ministre Imran Khan a formulé plusieurs engagements très positifs en matière de droits humains. Nous attendons de son gouvernement qu’il s’engage également en faveur de la protection de la liberté d’expression, et qu’il veille à la préservation d’un cadre sûr et favorable pour les journalistes et d’autres défenseurs des droits humains, de sorte que ces personnes puissent mener à bien leurs activités, sans craindre de représailles », a déclaré Omar Waraich.

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