PAYS MEMBRES DU G8 : Les pays membres du G8 arment ceux qui violent les droits humains

Index AI : POL 30/001/2003

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amnesty International rend public aujourd’hui un document sur les exportations d’armes du G8 et leurs conséquences pour les droits humains.

Alors que les chefs d’État des pays membres du G8 s’apprêtent à assister au sommet d’Évian, Amnesty International révèle que, en dépit des assurances données, les gouvernements de ces pays arment et équipent des forces responsables de certaines des pires atteintes aux droits humains commises dans le monde.

Le nouveau rapport d’Amnesty International montre comment, profitant des lacunes d’un système de contrôle inadapté, la technologie militaire et sécuritaire des plus grandes puissances du globe continue d’être transmise à des régimes répressifs.

Les deux tiers au moins de tous les transferts d’armes réalisés dans le monde entre 1997 et 2001 provenaient de cinq pays membres du G8 : les États-Unis, la Russie, la France, le Royaume-Uni et l’Allemagne.

Ces pays, comme l’Italie et le Canada, également membres du G8, ont tous dans leur législation des dispositions qui prévoient que toute exportation de matériel militaire est soumise à l’obtention d’un permis spécial. Le Japon, quant à lui, interdit officiellement les exportations à caractère militaire. Pourtant, dans tous les cas, le rapport d’Amnesty International montre que les contrôles existants se sont avérés inefficaces ou qu’ils ont été éludés. Quelques exemples :

Pendant l’année 2000, la France a fourni au Sénégal des munitions d’armes de petit calibre. Or Amnesty International a relevé dans ce dernier pays, tout au long des années 1990, des atteintes aux droits humains commises à l’aide d’armes légères. Des civils ont notamment été tués ou blessés par balle par les forces de sécurité sénégalaises. En janvier 2001, un étudiant a été abattu lors d’affrontements entre des manifestants et la police, non loin de l’université de Dakar. Le gouvernement français aurait dû savoir qu’un tel transfert d’armement était susceptible de favoriser les atteintes aux droits humains au Sénégal.

En juillet 2002, le Royaume-Uni a autorisé l’envoi aux États-Unis d’appareils de visualisation rapide (Head-Up Display, HUD), destinés à être montés sur des chasseurs F-16 devant être livrés à Israël. Ces appareils de visualisation permettent aux pilotes de prendre connaissance des données concernant leur cible et leurs armes sans avoir à baisser les yeux vers leur tableau de bord. Le même mois, des avions F-16 ont effectué un raid sur la ville de Gaza, larguant une bombe d’une tonne, qui a tué 17 personnes et en a blessé 70 autres. La réglementation britannique n’aurait pas autorisé l’exportation de ce type d’équipement directement vers Israël. En revanche, elle n’empêche pas son expédition via un pays tiers. Les F-16 de fabrication étasunienne fournis à Israël comportent également des composantes informatiques canadiennes.

Les États-Unis fournissent aux forces armées colombiennes des fusils militaires et des mitrailleuses, bien que de telles armes soient régulièrement utilisées pour commettre des atteintes aux droits humains. Pendant l’année 2001, plus de 4 000 civils colombiens ont été tués pour des raisons politiques, la plupart par des groupes paramilitaires opérant avec le soutien des forces armées.

Le nouveau rapport d’Amnesty International montre :

 comment les marchands et les trafiquants d’armes basés dans la plupart des pays du G8 parviennent à équiper des forces responsables d’atteintes aux droits humains, en délocalisant tout simplement leurs activités dans des « pays tiers » où les contrôles sont plus laxistes ;

 que la plupart des pays du G8 ne disposent pas de lois interdisant l’exportation d’équipement de sécurité à destination de forces de sécurité de pays étrangers connues pour l’usage abusif qu’elles font de certains instruments légitimes pour torturer ou maltraiter, ni de lois imposant un gel de l’utilisation de certains matériels, comme les armes à décharge électrique, tant que leurs effets ne seront pas complètement connus ;

 que, sous prétexte de « confidentialité des transactions commerciales », les parlementaires, la presse et l’opinion publique ne sont pas informés suffisamment et en temps voulu de certains marchés, ce qui empêche le pouvoir législatif et les citoyens d’exercer comme ils le devraient un contrôle sur le commerce des armes.

Amnesty International appelle à l’adoption d’un traité sur le commerce des armes, destiné à renforcer et à harmoniser les contrôles existant au niveau national et à couper les sources d’approvisionnement en armes des auteurs d’atteintes aux droits humains.

« S’il est une leçon que le G8 doit tirer du conflit en Irak, c’est qu’on ne peut pas permettre à la communauté internationale de fournir des armes à ceux qui commettent de graves atteintes aux droits fondamentaux de la personne humaine, de les encourager et de les récompenser au point qu’ils finissent par agir en toute impunité », a déclaré Brian Wood, coordonnateur international de l’action d’Amnesty International en faveur du contrôle des armes.

À la lumière des rapports des inspecteurs des Nations unies, Amnesty International appelle les gouvernements allemand, étasunien, britannique, français, russe et chinois à publier la liste des entreprises qui ont fourni à l’Irak des technologies utilisées dans le cadre des programmes d’armement de ce pays, notamment dans les domaines chimique et bactériologique.

Complément d’information

1. Amnesty International est opposée à tout transfert d’équipement, de technologie ou de compétences susceptible, selon toute vraisemblance, de contribuer à des atteintes aux droits humains dans le pays destinataire. L’organisation a toujours demandé aux gouvernements des pays du G8 de respecter ce principe, dont ils reconnaissent depuis longtemps la pertinence, mais qu’ils n’ont jamais totalement appliqué.

2. Les promesses faites :

Il y a bientôt dix ans, les États-Unis, le Canada, la France, l’Allemagne, l’Italie, la Russie et le Royaume-Uni ont signé, aux côtés d’autres États membres de l’Organisation pour la sécurité et la coopération en Europe (OSCE), les Principes régissant les transferts d’armes classiques, en vertu desquels ils s’engageaient à éviter « les transferts susceptibles d’être utilisés aux fins de violation ou suppression des droits de l’homme et des libertés fondamentales ».

En 1998, la France, l’Allemagne, l’Italie et le Royaume-Uni se sont engagés, en tant que membre de l’Union européenne (UE), à respecter le Code de conduite sur les exportations d’armes de l’UE. D’autres États, dont le Canada et les États-Unis, ont déclaré qu’ils approuvaient ce Code. Celui-ci, tout en laissant aux gouvernements le droit de prendre la décision finale d’autoriser ou non l’exportation, interdit les transferts d’armes à destination de pays où, de toute évidence, elles risquent d’être utilisées à des fins de répression interne, ou dans lesquels de graves atteintes aux droits humains sont perpétrées.

3. Le prochain sommet du G8 aura lieu en France, à Évian-les-Bains, du 1er au 3 juin 2003.

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