Des petites voitures devant l’ambassade d’Arabie saoudite en soutien aux défenseures persécutées

Afin de marquer les 100 jours de détention de Loujain al Hathloul, d’Iman al Nafjan et d’Aziza al Yousef, qui se sont notamment battues pour le droit des femmes à conduire en Arabie saoudite, des militants d’Amnesty International ont disposé devant l’ambassade saoudienne, à Bruxelles, 100 petites voitures accompagnées du message suivant : « King Salman, play with toys, not with human rights ».

Les militants ont également tenté de remettre les quelque 20 000 signatures d’une pétition demandant notamment la libération des trois défenseures des droits des femmes, mais l’ambassade a refusé de les recevoir. Elles seront donc envoyées par voie postale ultérieurement, additionnées des autres signatures que la pétition récoltera jusque là.

« En maintenant ces trois courageuses militantes en détention sans inculpation et sans représentation juridique depuis plus de trois mois, l’Arabie saoudite prouve une fois encore à quel point elle méprise les droits humains. De la même façon, la possible condamnation à mort par décapitation d’Israa al-Ghomgham pour le simple fait d’avoir pris part à des manifestations pacifiques est intolérable », explique Philippe Hensmans, directeur de la section belge francophone d’Amnesty International « Nous appelons une nouvelle fois à la libération immédiate de ces militantes, ainsi qu’à celle de tous les prisonniers et prisonnières d’opinion détenus uniquement pour avoir exercé leurs droits fondamentaux. »

D’autres actions de ce genre sont menées aujourd’hui par Amnesty International dans de nombreuses villes du monde en soutien à ces défenseures des droits humains et pour faire pression sur les autorités saoudiennes.

« En maintenant ces trois courageuses militantes en détention sans inculpation et sans représentation juridique depuis plus de trois mois, l’Arabie saoudite prouve une fois encore à quel point elle méprise les droits humains. De la même façon, la possible condamnation à mort par décapitation d’Israa al-Ghomgham pour le simple fait d’avoir pris part à des manifestations pacifiques est intolérable »

Loujain al Hathloul, Iman al Nafjan et Aziza al Yousef ont toutes été incarcérées le 15 mai et aujourd’hui (le 23 août), cela fait 100 jours qu’elles sont privées de liberté. Elles ont notamment été accusées, selon les médias soumis aux autorités étatiques, d’avoir formé une « cellule » et de représenter une menace pour la sécurité de l’État en raison de « contacts avec des entités étrangères visant à porter atteinte à la stabilité et au tissu social du pays ». Amnesty International pense que ces trois femmes risquent d’être inculpées et jugées par le tristement célèbre tribunal antiterroriste du pays, qui a déjà été utilisé par le passé pour juger des défenseur-e-s des droits humains et les condamner à de lourdes peines d’emprisonnement.

Au début du mois, deux autres éminentes défenseures des droits humains – Samar Badawi et Nassima al Sada – ont elles aussi été placées en détention. Parmi les personnes récemment incarcérées figurent également les militantes des droits des femmes Nouf Abdulaziz et Mayaa al Zahrani, ainsi que des militants qui avaient déjà été persécutés en raison de leur travail en faveur des droits humains, comme Mohammed al Bajadi et Khalid al Omeir. Hatoon al Fassi, éminente universitaire et militante des droits des femmes aurait elle aussi été arrêtée, en juin, plusieurs jours après la levée, par les autorités saoudiennes, de l’interdiction de conduire.

Israa al-Ghomgham, 29 ans, a été arrêtée avec son mari en décembre 2015 pour avoir participé à des manifestations anti-gouvernementales dans la province de Qatif. Le procureur public saoudien a requis contre elle et quatre autres accusés la peine de mort par décapitation.

Depuis le mois de mai, au moins 12 éminent-e-s défenseur-e-s des droits humains sont maintenu-e-s en détention sans inculpation : huit femmes et quatre hommes. Cette répression a débuté peu de temps après la levée par l’Arabie saoudite de l’interdiction de conduire à laquelle les femmes étaient soumises dans le pays. Les militant-e-s qui ont été arrêté-e-s menaient, dans un grand nombre de ces cas, campagne depuis de nombreuses années pour que les femmes obtiennent le droit de conduire et pour qu’il soit mis fin au système répressif de tutelle masculine en Arabie saoudite.

« Il est absolument scandaleux qu’en Arabie saoudite un si grand nombre de défenseur-e-s des droits humains soient maintenu-e-s en détention sans inculpation, apparemment uniquement pour avoir dénoncé des injustices. Le reste du monde ne doit pas continuer de détourner le regard pendant que se poursuit cette persécution incessante exercée contre celles et ceux qui défendent les droits humains en Arabie saoudite », a déclaré Samah Hadid, directrice des campagnes pour le Moyen-Orient à Amnesty International.

« La communauté internationale doit engager les autorités saoudiennes à mettre fin à cette répression ciblée exercée contre les militant-e-s dans le pays. Les États qui ont une grande influence sur l’Arabie saoudite, tels que les États-Unis, le Royaume-Uni et la France, doivent faire beaucoup plus pour demander leur libération

« L’Arabie saoudite doit libérer immédiatement et sans condition tous les prisonniers et prisonnières d’opinion, et mettre un terme à la répression sans merci exercée contre la liberté d’expression dans le pays. »

Complément d’information

La répression exercée contre les militant-e-s et les défenseur-e-s des droits des femmes intervient alors que le prince héritier Mohammed Ben Salman s’est présenté comme un « réformateur » ces derniers mois. Sa campagne internationale de relations publiques contraste nettement avec la répression qui se durcit contre les voix dissidentes, notamment celles qui font campagne en faveur de l’égalité des droits pour les femmes.

Amnesty International demande la fin de toutes les formes de discrimination à l’égard des femmes, notamment celle du système de tutelle.

Au début du mois, l’ambassadeur du Canada a été expulsé d’Arabie saoudite à la suite d’un tweet publié par la diplomatie canadienne, disant : « Nous sommes très préoccupés d’apprendre que Samar Badawi, la sœur de Raif Badawi, a été emprisonnée en Arabie saoudite. Le Canada se tient aux côtés de la famille Badawi en cette période difficile et nous continuons d’appeler fermement à la libération de Raif et de Samar Badawi. » Le ministre saoudien des Affaires étrangères a accusé le Canada d’« ingérence flagrante et manifeste dans les affaires intérieures » du pays. Amnesty International demande aux autres gouvernements de se joindre au Canada pour accroître la pression exercée sur l’Arabie saoudite afin qu’elle mette fin à la répression de la liberté d’expression dans le pays.

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