« La démission du général Albayalde met à mal encore une fois la crédibilité de la “guerre contre la drogue”. Les autorités des Philippines doivent veiller à ce que la justice soit rendue et que cette campagne illégale et meurtrière cesse immédiatement », a déclaré Nicholas Bequelin, directeur régional pour l’Asie de l’Est et du Sud-Est à Amnesty International.
« Le président Rodrigo Duterte a souligné que le général Albayalde bénéficierait d’une procédure régulière – un droit dont son gouvernement a privé des milliers de personnes soupçonnées de consommer ou de vendre des stupéfiants, qui ont été tuées illégalement par des policiers agissant à la fois comme juges, jurés et bourreaux.
« Ce scandale montre que l’impunité est ancrée dans les institutions censées faire respecter les droits humains et l’état de droit. Les autorités doivent de toute urgence étendre leur enquête sur le général Albayalde aux multiples violations commises par la police qui se poursuivent jusqu’à aujourd’hui. »
Complément d’information
Le 14 octobre 2019, le chef de la police nationale des Philippines, le général Oscar Albayalde, a démissionné de ses fonctions dans le contexte d’un scandale lié aux stupéfiants qui prenait de plus en plus d’ampleur.
Le 1er octobre, lors d’une audience devant le Sénat, un ancien directeur du Service d’enquêtes criminelles et de détection l’a accusé d’avoir couvert une opération de « recyclage » de stupéfiants en 2013, dans le cadre de laquelle des drogues illicites saisies par la police ont été revendues.
Quelques jours après, un ancien responsable régional de la police (qui est actuellement à la tête de l’Agence nationale de lutte contre les stupéfiants) a également affirmé sous serment qu’Oscar Albayalde avait tenté de protéger les fonctionnaires mis en cause. Ces policiers n’ont pas été renvoyés, seulement rétrogradés, et ils continuent d’exercer leurs fonctions.
Le général Albayalde a démenti les accusations portées contre lui et demandé au public de « passer à autre chose ». Le gouvernement a insisté sur le fait que ces accusations ne mettaient pas à mal la crédibilité de sa violente campagne antidrogue.
Depuis l’arrivée au pouvoir du président Rodrigo Duterte en 2016, des milliers de personnes ont été tuées dans une vague de violence cautionnée par l’État. En juillet 2019, Amnesty International a publié un rapport intitulé “They just kill” : Ongoing extrajudicial executions and other human rights violations in the Philippines ‘war on drugs’, dans lequel l’organisation expose comment de hauts gradés de la police qui supervisaient des opérations brutales à Manille ont été mutés dans la région de Luçon centrale pour continuer d’y diriger une violente campagne d’homicides. Amnesty International considère que ces homicides ont atteint un tel niveau qu’ils constituent des crimes contre l’humanité.