Le 28 novembre 2017, Badayos, coordinateur au sein de l’ONG Karapatan, et Moises, membre d’une organisation paysanne locale, ont été abattus par des personnes non identifiées circulant à moto à Bayawan, à Dunagarte. La militante Carmen Matarlo a été grièvement blessée lors de la fusillade. Selon certaines informations, le groupe de militants enquêtait sur des affaires de harcèlement et d’autres atteintes aux droits humains perpétrés par un clan familial terrien contre des paysans et des communautés impliqués dans un conflit foncier.
Quelques jours plus tard, le 5 décembre, Marcelito Paez, homme âgé, ancien prêtre et chef religieux qui a fait campagne pour la libération du prisonnier politique et leader paysan, Rommel Tucay, a été abattu par plusieurs hommes armés circulant à moto à Jaen, dans la province de Nueva Ecija.
Sous la présidence de Rodrigo Duterte, les militants et les défenseurs des droits humains aux Philippines sont la cible d’attaques croissantes.
Il a lancé des attaques ciblées contre les défenseurs des droits humains critiquant sa « guerre contre la drogue ». Sa critique la plus zélée, la sénatrice Leila de Lima, est détenue par la police pour des accusations forgées de toutes pièces liées à la drogue depuis février 2017. Amnesty International a appelé à sa libération immédiate et inconditionnelle. Jose Luis « Chito » Gascon, qui préside actuellement la Commission philippine des droits humains, a été agressé verbalement par le président, et le budget de la Commission est également menacé.
En août 2017, lors de son discours pour le 19e anniversaire de la fondation des Volontaires contre le crime et la corruption, le président Rodrigo Duterte a fait une déclaration dans laquelle il disait à la police de « tirer » sur les défenseurs des droits humains, ce qui n’est pas sa première menace contre leur sécurité.
En novembre 2017, il a mis fin aux pourparlers de paix entre la Nouvelle Armée du peuple (NPA), communiste, et le gouvernement philippin ; les négociations avaient été interrompues à plusieurs reprises et le nombre d’homicides commis par les deux parties avait augmenté. L’ONG de défense des droits humains Karapatan a ensuite signalé une multiplication des arrestations et détentions arbitraires et des homicides commis par les forces de sécurité et des personnes armées non identifiées, contre des personnes affiliées à la gauche politique.
Amnesty International est vivement préoccupée par le rétrécissement de l’espace dédié aux défenseurs des droits humains et le climat d’impunité qui s’aggrave aux Philippines. Elle demande aux autorités de condamner sans équivoque les actes de harcèlement, les menaces et les violences visant les défenseurs des droits humains, les dirigeants de communautés et les chefs religieux aux Philippines, et d’assurer dûment leur protection.
Enfin, Amnesty International appelle de ses vœux une enquête rapide, indépendante, impartiale et efficace sur l’homicide des militants Badayos, Moises et Paez, ainsi que sur d’autres homicides, et demande que les responsables, y compris ceux qui occupent des postes de commandement, soient amenés à rendre des comptes dans le cadre de procès équitables.
Complément d’information
Le 5 décembre 2017, Amnesty International a publié un rapport sur l’incapacité des États du monde entier à protéger efficacement les défenseurs des droits humains, intituléAttaques mortelles mais évitables : homicides et disparitions forcées à l’encontre des personnes qui défendent les droits humains. Ce rapport met en lumière les risques croissants qu’encourent les personnes de tous horizons qui œuvrent sans relâche en faveur de la protection et de la promotion des droits fondamentaux.