Pologne : Le gouvernement doit tenir ses engagements sur l’indépendance du pouvoir judiciaire

Amnesty International commente la réponse de la Pologne aux recommandations issues de l’Examen périodique universel. Cette réponse a été présentée aujourd’hui à Genève.

Amnesty International salue l’engagement qu’a pris la Pologne de mettre en œuvre les recommandations formulées par la Commission de Venise et par la Commission européenne au sujet de l’état de droit. La Pologne a également accepté de prendre des mesures pour protéger l’indépendance du pouvoir judiciaire et la séparation des pouvoirs. Elle s’est engagée à veiller à ce que toute réforme du système judiciaire soit conforme aux normes internationales en matière de droits humains.

Ces engagements interviennent alors que le gouvernement et le président s’apprêtent à soumettre au Parlement de nouvelles propositions de réforme du système judiciaire. En juillet, des propositions de réforme qui menaçaient de placer le pouvoir judiciaire sous le contrôle du gouvernement ont donné lieu à de vastes mouvements de contestation et à des critiques sévères de la part d’institutions internationales, notamment de la Commission européenne.

La Pologne a répondu à une recommandation de l’EPU l’engageant à respecter l’intégrité du Tribunal constitutionnel en affirmant que le Tribunal était une institution indépendante. Ces propos contredisent directement les observations formulées en juillet par la Commission européenne, qui a estimé que « l’indépendance et la légitimité du Tribunal constitutionnel [étaient] gravement mises en péril et que, par conséquent, la constitutionnalité des lois polonaises ne [pouvait] plus être garantie de manière effective. »

La Pologne a également souligné que les réformes judiciaires « [étaient] conformes aux normes européennes pertinentes », et que « les points de vue des institutions internationales au sujet de ces réformes [étaient] pris en compte lors de l’élaboration de nouvelles dispositions législatives. » Amnesty International note que ces réformes judiciaires contreviennent directement aux normes internationales en matière de droits humains, comme l’ont fait observer un grand nombre d’organisations intergouvernementales et d’organismes indépendants, notamment la Commission européenne, le Réseau des présidents des Cours suprêmes judiciaires de l’Union européenne, le Réseau européen des Conseils de la Justice, la Commission de Venise, le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe, le Comité des droits de l’homme de l’ONU et le Comité des droits de l’homme des Nations unies. Ces réformes risquent de porter gravement atteinte à l’indépendance du système judiciaire et sont une menace directe pour les droits à un recours effectif et à un procès équitable.

Amnesty International est préoccupée par le fait que la Pologne a rejeté une recommandation préconisant l’abrogation de modifications restrictives apportées à la loi sur les rassemblements et le rétablissement de la pleine liberté de rassemblement pacifique.

Cette loi accorde la priorité aux rassemblements favorables au gouvernement organisés chaque mois dans le centre de Varsovie. Depuis avril, elle a été utilisée pour interdire des rassemblements alternatifs ou d’opposition et pour monopoliser de facto l’espace public à proximité du palais présidentiel au bénéfice d’un groupe particulier.

Enfin, Amnesty International salue le soutien apporté par la Pologne à huit recommandations l’invitant à garantir l’accès des femmes à un avortement légal et sûr, conformément au droit international relatif aux droits humains et aux décisions rendues contre la Pologne par la Cour européenne dans des affaires concernant l’accès aux droits en matière de sexualité et de procréation. Amnesty International constate cependant les initiatives actuelles de groupes de la société civile et de députés visant à introduire de nouvelles restrictions à l’accès à l’avortement et à d’autres services relatifs aux droits en matière de sexualité et de procréation. En juin 2017, par exemple, le Parlement a adopté une loi rendant la contraception d’urgence accessible uniquement sur ordonnance en Pologne. Amnesty International réaffirme que la Pologne doit s’abstenir d’adopter des propositions restreignant davantage encore l’accès des femmes et des jeunes filles à l’avortement.

Complément d’information

Le Conseil des droits de l’homme des Nations unies a adopté les conclusions de l’Examen périodique universel de la Pologne le 22 septembre 2017, lors de sa 36e session. Avant l’adoption du rapport de l’examen, Amnesty International a présenté une communication orale sur l’indépendance du système judiciaire, le droit à la liberté de rassemblement et les droits en matière de sexualité et de procréation. Elle a également contribué aux informations sur lesquelles s’est appuyé l’Examen périodique, par l’intermédiaire du rapport (en anglais) sur la Pologne qu’elle a présenté à cet effet

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