Une modification constitutionnelle garantissant le droit à l’eau pour tous doit être pleinement appliquée afin de bénéficier aux communautés roms de Slovénie privées d’un accès à l’eau, a déclaré Amnesty International. Si la modification adoptée jeudi 17 novembre reconnaît que tout un chacun a droit à l’eau potable, certaines communautés roms restent contraintes à aller chercher de l’eau dans des ruisseaux pollués ou à des robinets publics, et n’ont pas accès à des installations sanitaires adéquates.
« Faire de l’accès à l’eau potable un droit fondamental reconnu par la Constitution est une avancée importante pour la Slovénie, mais il faut plus que des réformes juridiques aux communautés roms. Il convient désormais d’agir pour que ces changements bénéficient à toutes les personnes privées d’eau et d’installations sanitaires », a déclaré Fotis Filippou, directeur adjoint du programme Europe d’Amnesty International.
« Il est choquant que dans un pays aussi développé que la Slovénie, où la quasi-totalité de la population a accès à l’eau potable, certaines communautés roms éprouvent des difficultés considérables pour se procurer de petites quantités d’eau afin de boire, faire la cuisine et se laver. »
En Slovénie, de nombreuses familles roms vivent dans des quartiers informels, dans des logements inadaptés et parfois insalubres. Certaines n’ont pas accès à l’eau près de chez elles et doivent parcourir de longues distances avec des bidons afin d’aller en chercher dans des stations service, des cimetières ou des ruisseaux pollués. Ces conditions ont des répercussions sur leur vie et ont parfois pour conséquences des maladies, notamment à transmission hydrique.
En 2011, une commission gouvernementale a recommandé qu’un accès à l’eau soit fourni de toute urgence à l’ensemble des communautés roms, mais aucune véritable mesure n’a été prise en ce sens jusqu’à présent.
« Le gouvernement doit désormais garantir que la reconnaissance par la Constitution du droit de chacun à l’eau potable mène à des changements rapides et concrets », a déclaré Fotis Filippou.
« S’en abstenir reviendrait de la part du gouvernement à abandonner ses devoirs, mais pourrait également s’avérer coûteux puisque cette nouvelle modification donnera du poids aux revendications de toute personne qui saisira la justice en raison d’un manque d’accès à l’eau. »
COMPLÉMENT D’INFORMATION
La modification de la Constitution dispose que l’eau destinée à la consommation ou à une utilisation domestique doit être uniquement fournie par le secteur public.
En 2014, deux familles roms de Škocjan et Ribnica ont porté la question de leur manque d’accès à l’eau devant la Cour européenne des droits de l’homme. La Cour examine actuellement le cas Hudorovic c. Slovénie. Branko Hudorovič a déclaré : « Les Roms n’ont pas besoin de richesses, ce dont nous avons vraiment besoin c’est une canalisation d’eau pour que nos enfants puissent se laver et boire quand ils ont soif. »
Selon les estimations, entre 10 000 et 20 000 Roms vivent en Slovénie. La plupart résident dans des bidonvilles ou des campements isolés et séparés du reste de la population dans des zones rurales. Beaucoup habitent dans des logements mal construits ou des quartiers informels où la sécurité d’occupation n’est pas garantie. Des discriminations généralisées empêchent souvent les familles roms d’acheter ou de louer des logements dans d’autres zones.
Aux termes du droit slovène, les citoyens peuvent uniquement avoir accès aux services publics communaux s’ils sont propriétaires du terrain où ils résident où peuvent se prévaloir d’autres droits sur celui-ci, ainsi que d’un permis de construire. De nombreux roms se voient donc privés d’un accès même restreint à l’eau et à un système sanitaire, ainsi que de services tels qu’une alimentation électrique.
Le déni des droits à un logement décent, à l’eau et à des installations sanitaires, qui a également un impact négatif sur d’autres droits tels que celui à l’éducation, au travail et à la santé, entretient la pauvreté et la marginalisation. Certains préjugés généralisés à l’égard des Roms, qu’il s’agisse d’hommes, de femmes ou d’enfants, persistent en raison de leur manque d’accès à des installations sanitaires de base.