Un prisonnier d’opinion de 65 ans toujours emprisonné

Le fait que la Cour suprême du Kirghizistan n’a pas remis en liberté Azimjan Askarov, défenseur des droits humains et prisonnier d’opinion âgé de 65 ans, est un exemple flagrant de l’absence de respect par le Kirghizistan de ses obligations internationales, a déclaré Amnesty International.

Lors de l’examen de ce cas, la Cour suprême ne s’est pas conformée aux recommandations du Comité des droits de l’homme de l’ONU demandant la libération d’Azimjan Askarov. La Cour s’est contentée d’annuler la peine prononcée contre cet homme et de renvoyer l’affaire devant le tribunal régional de Chui en vue d’un nouvel examen. Le défenseur des droits humains restera en détention jusqu’à son nouveau procès.

« Le Kirghizistan a manqué une occasion de prendre la bonne décision : il aurait dû enfin remettre en liberté cet homme qui n’aurait jamais dû être incarcéré. La décision rendue le 12 juillet par la Cour suprême ne tient aucun compte des obligations qui incombent au Kirghizistan au titre du droit international relatif aux droits humains, a déclaré Anna Neistat, directrice générale de la recherche à Amnesty International, qui a assisté à l’audience le 11 juillet.

« Azimjan Askarov a, à plusieurs reprises, été frappé, soumis à d’autres violences et privé de soins médicaux avant son procès en 2010 et depuis, et les charges retenues contre lui ont été forgées de toutes pièces pour des raisons politiques. L’organisation continue de mener campagne pour obtenir sa libération immédiate et inconditionnelle. »

Azimjan Askarov, membre de la communauté ouzbèke, a été accusé de complicité dans le meurtre d’un policier survenu pendant les violences ethniques entre Kirghizes et Ouzbèkes qui ont eu lieu pendant plusieurs jours dans le sud du Kirghizistan en juin 2010. Trois mois plus tard, il a été condamné à la réclusion à perpétuité.

Le 31 mars 2016, le Comité des droits de l’homme des Nations unies a demandé au Kirghizistan de libérer immédiatement Azimjan Askarov, reconnaissant qu’il avait été détenu de manière arbitraire, torturé et privé du droit à un procès équitable. Le 22 juin, la Cour suprême du Kirghizistan a annoncé sa décision d’examiner le cas de Azimjan Askarov à la lumière des conclusions du Comité de l’ONU.

Des observateurs nationaux et internationaux appartenant à des organisations de défense des droits humains et à des missions diplomatiques ont assisté à l’audience devant la Cour suprême, certains d’entre eux y ayant été invités par les autorités kirghizes. Ils avaient l’espoir de voir la Cour établir un précédent en se conformant pleinement aux recommandations du Comité de l’ONU. La Cour n’a cependant pas rendu une décision de remise en liberté d’Azimjan Askarov, mais ordonné le renvoi de l’affaire devant une autre juridiction en vue d’un nouvel examen. Cette décision risque de se traduire, pour le défenseur des droits humains âgé de 65 ans qui n’aurait jamais dû être emprisonné, par de nombreux autres mois et années d’humiliation et d’angoisse derrière les barreaux.

Le deuxième jour de l’audience, un groupe de femmes et d’hommes kirghizes du sud du Kirghizistan ont été présentés devant la Cour en tant que victimes des crimes prétendument commis en 2010 par Azimjan Askarov. Le juge présidant le tribunal les a invités à parler en ne tenant aucun compte du fait que les avocats d’Azimjan Askarov ont demandé à intervenir. Ces personnes ont insulté les avocats d’Azimjan Askarov, mais ont été empêchées de justesse de s’en prendre physiquement à eux dans la salle d’audience.

Amnesty International estime qu’Azimjan Askarov est un prisonnier d’opinion, détenu uniquement pour avoir exercé, pacifiquement, son droit à la liberté d’expression. Amnesty International demande au Kirghizistan d’appliquer pleinement les recommandations du Comité des droits de l’homme de l’ONU en accordant réparation à Azimjan Askarov, en le remettant immédiatement en liberté et en annulant sa condamnation.

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