Qu’est-il advenu des projets de réforme ?

Index AI : IOR 41/026/2004
ÉFAI

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Le principal organe du système des Nations unies dans le domaine des droits humains a fait preuve d’incapacité et de manque de volonté pour traiter de questions concernant les violations graves des droits humains, a déclaré Amnesty International ce jeudi 22 avril 2004 à la fin de la 60ème session de la Commission des droits de l’homme. Malgré certaines avancées positives, il est urgent de réformer les méthodes de travail de la Commission.

« La Commission des droits de l’homme des Nations unies a donné la preuve qu’elle devait se réformer pour faire face à ses responsabilités qui sont de protéger les droits humains et de dénoncer les violations où qu’elles se produisent », a déclaré Amnesty International.

Tout en étant relativement satisfaite des résolutions concernant la Biélorussie et la République populaire démocratique de Corée et des déclarations de la présidence sur Haïti et le Népal, Amnesty International regrette que la Commission ne se soit pas prononcée sur de nombreuses autres situations préoccupantes au plan des droits humains.

 La Commission n’a pas adopté les projets de résolution concernant la Chine, la République tchétchène, le Zimbabwe et les détenus de Guantanamo Bay.

 La Commission s’est montrée aveugle aux violations systématiques des droits humains dans un certain nombre de pays.

 Certains pays posant de graves problèmes de violations des droits humains n’ont été cités que dans les déclarations de la présidence ou au titre de la coopération technique et des services consultatifs, donnant l’impression erronée que tous les problèmes pouvaient être résolus en misant sur un renforcement des capacités de ces pays.

 Un usage abusif de la procédure de « non action » a empêché toute discussion des résolutions concernant la Chine et le Zimbabwe.

 La discussion à propos de la situation des droits humains en Israël et dans les Territoires occupés a toujours été dominée par des considérations politiques.

Le manque total d’engagement par rapport à la situation des droits humains en Irak a été l’exemple le plus frappant de l’incapacité de la Commission à traiter de l’un des problèmes les plus aigus du moment.

« Un an après la guerre, l’Irak est toujours dans une période de transition difficile, entre une dictature brutale sous laquelle ont été commises de nombreuses atteintes aux droits humains et un gouvernement qui, nous l’espérons, respectera ces droits. C’est maintenant que la Commission devrait s’engager - la protection des droits humains, sous la surveillance et avec l’aide et la coopération de la communauté internationale, revêt une importance cruciale pour une transition réussie », a déclaré Amnesty International.

L’issue des délibérations de la Commission sur le Soudan était toujours incertaine à l’avant-dernier jour de la session. Amnesty International espère que la Commission compensera cet état de fait en prenant des mesures significatives par rapport à la situation tragique du Darfour.

Amnesty International salue la décision de la Commission de nommer, auprès du haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies, un expert indépendant sur la protection des droits de l’homme dans la lutte antiterroriste.

« C’est une initiative que nous saluons, mais la Commission des droits de l’homme doit mettre en place un mécanisme plus actif d’observation de l’impact global des mesures anti-terroristes sur les droits humains. Elle doit mener des enquêtes de terrain dans les différents pays et dialoguer directement avec les États concerné », a déclaré l’organisation.

Amnesty International a été très déçue par le ton des discussions sur l’orientation sexuelle. Des termes abrupts et vulgaires ont été employés fréquemment.

« Encore une fois, la Commission a eu peur de défendre des personnes souffrant de graves violations de leurs droits uniquement du fait de leur orientation et de leur identité sexuelles. Les propres experts de la Commission ont depuis longtemps établi que les droits sexuels font partie des droits humains, pourtant la Commission n’est toujours pas capable ou n’a toujours pas la volonté d’agir selon ses propres conclusions », a déclaré l’organisation.

Amnesty International a été profondément troublée par les critiques acerbes, exagérées et parfois personnelles que certains gouvernements ont adressé aux experts de la Commission en charge des droits humains. Cela semble indiquer que l’engagement de certains gouvernements à soutenir la Commission et à coopérer avec l’ensemble des organismes en charge des droits humains n’était que paroles creuses.

Pour apporter une note plus positive, Amnesty International se réjouit de l’importance accordée par la Commission à l’élimination de la violence contre les femmes. Un nombre important d’intervenants ont abordé cette question au cours de la conférence de haut niveau. La résolution finale condamne avec force la violence contre les femmes sous toutes ses formes et appelle les États à éliminer cette violence ; elle donne mandat à la rapporteuse spéciale des Nations unies sur l’élimination de la violence contre les femmes de faire des propositions concernant les indicateurs de la violence à l’égard des femmes et les mesures prises par les États pour éliminer cette violence. Il s’agit là d’une mesure concrète importante pour que soit mieux appliqué, tant au niveau local qu’au niveau national, le droit des femmes à vivre libre de toute violence.

Un autre point positif concerne la responsabilité des entreprises en matière de droits humains, question abordée pour la première fois par la Commission et inscrite à son ordre du jour. La Commission a reconnu la nécessité de renforcer les normes concernant les responsabilités des sociétés transnationales et autres entreprises commerciales en ce qui concerne les droits humains.

Amnesty International salue également l’adoption, à une forte majorité, de la résolution concernant la peine de mort. Cela prouve que le soutien international en faveur de l’abolition de la peine capitale continue de progresser de façon certaine.

Au début de la session, Amnesty International avait mis la Commission au défi de se réformer et d’établir des critères transparents et objectifs pour la sélection des pays sous observation ; elle avait également demandé que soit mis en place un système plus efficace d’observation et d’évaluation de l’application des recommandations de la Commission par les États.

La 60ème session de la Commission est sur le point de s’achever. Les gouvernements, le haut-commissaire aux droits de l’homme des Nations unies, le haut-commissariat et les ONG doivent à présent établir les priorités concernant la mise en application des réformes cruciales qui permettront à la Commission de remplir sa mission de promotion et de protection des droits humains.

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