Réaffirmer ses engagements de protéger les civils

Le renouvellement du mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) est une occasion pour l’ONU de réaffirmer ses engagements et d’accroître ses efforts pour protéger les civils et empêcher que la situation des droits humains en RDC et dans la totalité de la région des Grands Lacs ne se détériore encore plus, a déclaré Amnesty International le 28 mars 2017.

Le 29 mars, le Conseil de sécurité des Nations unies doit voter une résolution sur le renouvellement du mandat de la MONUSCO.

Amnesty International demande au Conseil de sécurité de veiller à ce que la MONUSCO puisse utiliser son mandat pour protéger les civils et empêcher que la situation des droits humains dans le pays ne se détériore davantage.

Compte tenu de l’intensification des tensions et des violations des droits humains qui ont suivi le retard dans la tenue des élections prévues pour 2016, la mission a besoin de toute urgence de ressources pour protéger les civils durant le processus électoral, notamment pendant les manifestations publiques et les réunions électorales. Pour ce faire, le Secrétaire général des Nations unies a proposé d’augmenter le nombre d’unités de police de l’ONU et de les déployer rapidement. Actuellement, la MONUSCO compte 1 090 policiers.

Face à l’augmentation du nombre d’attaques contre des civils, la hausse des violences inter-ethniques, l’apparente incapacité de l’État à protéger les civils dans certaines zones et l’instabilité entourant le processus électoral, le rôle de la MONUSCO est crucial.

Les atteintes aux droits humains, notamment les homicides illégaux et la violence inter-ethnique dans les territoires de Beni et de Rutshuru, dans les provinces du Kongo Central, du Tanganyika et, plus récemment, du Kasaï où deux experts de l’ONU et quatre de leurs collègues congolais ont disparu le 17 mars, soulèvent des questions quant à la capacité et à la volonté de l’État de protéger les civils dans ces zones.

Malgré sa défaite par les forces de l’ONU et de la RDC en 2013, le Mouvement du 23 mars (M23), un groupe armé responsable de graves violations des droits humains en 2012-2013 dans l’est de la RDC, est réapparu récemment dans le territoire de Rutshuru.

Les risques en matière de droits humains sont encore plus exacerbés par les conséquences des conflits et des crises dans les pays voisins, notamment le Burundi, le Soudan du Sud et la République centrafricaine.

Recommandations au Conseil de sécurité des Nations unies :

• Renouvelez le mandat de la MONUSCO et veillez à ce que la mission possède les ressources nécessaires pour s’acquitter de son mandat de protection des civils ;
• Demandez l’entière coopération des pays voisins pour mettre en œuvre l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour la République démocratique du Congo et la région des Grands Lacs afin de soutenir les efforts de protection des civils de la RDC et de l’ONU ;
• Continuez à soutenir les enquêtes indépendantes du Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme sur les violations des droits humains et les crimes de droit international ;
• Demandez aux autorités de la RDC de mener des enquêtes crédibles et indépendantes sur les violations des droits humains et les crimes de droit international qui auraient été commis par les forces de sécurité, notamment les homicides illégaux, pendant des manifestations et des opérations militaires et, s’il existe suffisamment de preuves recevables, de poursuivre en justice les responsables présumés dans le cadre de procès équitables, devant des tribunaux civils de droit commun et sans avoir recours à la peine de mort ;
• Demandez aux autorités de la RDC de respecter le droit à la liberté d’expression et de réunion pacifique, de libérer les personnes détenues pour avoir exercé pacifiquement leurs droits, de rouvrir des organes de presse fermés arbitrairement et de lever l’interdiction sur les manifestations organisées par l’opposition et les organisations de la société civile.

Complément d’information

La RDC n’a pas respecté ses délais constitutionnels pour organiser des élections présidentielles en novembre 2016. Afin d’éviter une crise constitutionnelle, le gouvernement a demandé à la Cour suprême de rendre une interprétation en juin 2016. Celle-ci a décidé que le président Kabila pouvait rester au pouvoir jusqu’à l’élection de son successeur.

Les retards dans l’organisation des élections ont occasionné un rétrécissement de l’espace civique, alors que les manifestations contre le report des élections se sont heurtées à un usage arbitraire et abusif de la force par les forces de sécurité.

Amnesty International, le Bureau conjoint des Nations unies aux droits de l’homme et d’autres organisations ont rassemblé des informations sur l’utilisation inutile et excessive de la force par les forces de sécurité, dont des homicides illégaux.

À ce jour, aucune enquête digne de ce nom n’a été menée et aucun agent de sécurité n’a été suspendu ni traduit en justice en raison de ses actes.

Les manifestations de l’opposition et des groupes de la société civile ont été interdites par les autorités locales dans plusieurs villes, dont Kinshasa, Lubumbashi et Goma. En parallèle cependant, les mêmes représentants des autorités ont facilité l’organisation de rassemblements publics et de manifestations par la majorité présidentielle. Des dizaines de jeunes militants pro-démocratie continuent d’être arrêtés et détenus arbitrairement parce qu’ils s’opposent aux délais dans l’organisation des élections.

Le gouvernement utilise également le système judiciaire pour cibler des opposants politiques de premier plan – en particulier ceux qui étaient membres de la majorité présidentielle et qui ont quitté le parti en raison du débat sur la révision de la Constitution permettant au président, Joseph Kabila, de se présenter pour un autre mandat.

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