Il faut que les autorités maldiviennes renoncent immédiatement au projet de reprendre les exécutions et instaurent un moratoire sur l’application de la peine de mort en vue de son abolition. Amnesty International a reçu des informations indiquant que la reprise des exécutions pourrait être imminente.
Pour l’instant, la Cour suprême maldivienne a confirmé les condamnations à mort de trois personnes, dont les voies de recours sont désormais épuisées au niveau national et qui risquent donc d’être exécutées sous peu :
• Hussain Humaam Ahmed (Humaam) a été déclaré coupable de meurtre et condamné à mort en 2012 ; la Cour suprême a confirmé sa déclaration de culpabilité et sa peine le 24 juin 2016. Amnesty International et d’autres organisations de défense des droits humains ont exprimé de sérieux doutes quant à l’équité de son procès. En juillet 2016, le Comité des droits de l’homme a rendu une décision appelant à surseoir à l’exécution de cet homme en attendant qu’il statue sur l’affaire.
• Ahmed Murrath a été déclaré coupable de meurtre et condamné à mort en 2012, aux côtés de sa compagne Hanaa Fathmath. La Cour suprême a confirmé sa déclaration de culpabilité et sa peine le 9 juillet 2016 mais n’a pas encore statué définitivement sur le cas de Hanaa Fathmath.
• Mohamed Nabeel a été déclaré coupable de meurtre et condamné à mort en 2009. La Cour suprême a confirmé sa peine le 27 juillet 2016.
En 2014, le gouvernement maldivien, sous la houlette du président Abdulla Yameen, a annoncé la reprise des exécutions, après une pause de plus de 60 ans. Depuis lors, les autorités ont pris des mesures en ce sens, notamment la modification de la législation nationale. Ainsi, des lois adoptées récemment ont retiré à l’exécutif le pouvoir d’accorder des grâces ou des commutations dans les affaires de meurtre, privant les condamnés à mort de la possibilité d’effectuer ce type de demandes, comme les y autorise le droit international. En 2016, les autorités ont changé de méthode d’exécution, abandonnant la pendaison au profit de l’injection létale, et des représentants de l’État ont annoncé que les exécutions auraient lieu dans un délai de 30 jours à compter de la confirmation de la déclaration de culpabilité par la Cour suprême.
des lois adoptées récemment ont retiré à l’exécutif le pouvoir d’accorder des grâces ou des commutations dans les affaires de meurtre
La reprise des exécutions après plus de 60 ans constituerait un grand bond en arrière pour les droits humains aux Maldives. Il faudrait, en revanche, que l’État instaure de toute urgence un moratoire sur les exécutions, en vue de l’abolition totale de la peine de mort. Par ailleurs, il est préoccupant que des représentants de l’État justifient le recours à la peine capitale sous prétexte qu’elle est nécessaire à la sécurité publique. Il n’a jamais été prouvé, en effet, que la peine de mort ait un effet plus dissuasif sur les crimes que la réclusion à perpétuité.
Selon les médias et les statistiques fournies par l’administration pénitentiaire des Maldives, au moins 18 prisonniers se trouvent actuellement sous le coup d’une condamnation à mort dans le pays. Parmi eux, au moins cinq ont été déclarés coupables et condamnés pour des actes commis alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans. Le droit international coutumier et deux traités internationaux auxquels les Maldives sont partie interdisent pourtant d’infliger la peine de mort à des mineurs délinquants. Les prisonniers ou leurs représentants ont dénoncé le non-respect du droit à un procès équitable et l’utilisation, dans plusieurs affaires, de déclarations obtenues sous la contrainte et dans lesquelles les accusés s’incriminaient eux-mêmes.
au moins cinq ont été déclarés coupables et condamnés pour des actes commis alors qu’ils étaient âgés de moins de 18 ans
Amnesty International s’oppose à la peine de mort en toutes circonstances, sans exception, quelles que soient la nature et les circonstances du crime commis. En outre, le monde se détourne progressivement du recours à la peine de mort. Actuellement, 141 pays sont abolitionnistes en droit ou dans la pratique et, dans la plupart des pays du globe (104), ce châtiment a totalement disparu des textes de loi.
Amnesty International prie instamment les autorités maldiviennes de :
• Renoncer immédiatement à la reprise des exécutions et instaurer un moratoire officiel sur toutes les exécutions dans le but d’abolir la peine capitale ;
• Commuer immédiatement toutes les peines de mort déjà prononcées, notamment quand les faits reprochés ont été commis alors que les condamnés avaient moins de 18 ans ;
• Modifier la législation nationale afin de supprimer les dispositions qui ne sont pas conformes au droit international ni aux normes connexes et abolir la peine de mort pour toutes les infractions.