République centrafricaine. Des traitements cruels et inhumains infligés pour liens présumés avec l’opposition

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

AFR 19/008/2006

Dans son nouveau rapport sur la République centrafricaine publié ce jeudi 30 novembre 2006, Amnesty International condamne les pratiques préoccupantes d’arrestations arbitraires et de détentions prolongées sans inculpation ni jugement, ainsi que les conditions de détention déplorables.

Ce rapport, Central African Republic : Government tramples on the basic rights of detainees, dénonce l’arrestation et la détention arbitraires de plus de 40 personnes depuis le début de l’année 2006 en raison de leurs liens présumés avec des groupes armés d’opposition ou des politiciens de l’opposition.

« Dans certains cas, ces personnes auraient été interpellées uniquement parce qu’elles appartiennent au même groupe ethnique que le dirigeant d’un groupe armé d’opposition. Toutes ont été placées en détention des mois durant, dans des conditions effroyables, sans avoir été inculpées ni autorisées à consulter un avocat. Celles qui ont finalement comparu devant les tribunaux ont pour la plupart été acquittées.

« Cette approche inquiétante de la sûreté intérieure foule aux pieds les normes les plus fondamentales du droit national et du droit international relatif aux droits humains », a déclaré Godfrey Byaruhanga, chercheur d’Amnesty International sur la République centrafricaine.

Dans une affaire, 14 détenus accusés d’atteinte à la sûreté intérieure puis acquittés par la justice ont été transférés de force par la Garde présidentielle – rattachée directement au président François Bozizé – depuis Bangui, la capitale, jusqu’à un centre de détention tout d’abord tenu secret par les autorités. Incarcérés pendant treize jours à la prison de Bossembélé, ils ont été libérés sous la pression d’associations d’avocats et d’organisations de défense des droits humains, dont Amnesty International.

Vingt détenus ont été libérés après avoir été acquittés, mais plus d’une vingtaine, dont Claude Yabanda, ancien président du Front patriotique pour le progrès (FPP), parti politique officiellement reconnu, se trouvent toujours derrière les barreaux, sans savoir s’ils vont comparaître devant un tribunal ni à quelle date.

Par ailleurs, le rapport d’Amnesty International dénonce les conditions de détention choquantes auxquelles ces prisonniers notamment sont soumis. Ils sont privés de nourriture et ne sont pas autorisés à recevoir les soins médicaux élémentaires, ainsi exposés au risque de contracter des maladies potentiellement mortelles. Les conditions de détention sont très dégradantes et insalubres – cellules surpeuplées, sans électricité, avec des toilettes qui débordent.

Cette situation fait parfois payer un lourd tribut aux détenus. Dans son rapport, Amnesty International expose le cas de Lydie Florence Ndouba, interpellée lors de la vague d’arrestations en mars 2006 parce qu’elle représentait une menace pour la sûreté de l’État. N’ayant pas été autorisée à recevoir des soins médicaux, Lydie Florence Ndouba a fait une fausse couche en prison. Elle a plus tard été acquittée de toutes les accusations qui pesaient sur elle.

« Lors de notre récente visite en République centrafricaine, les membres de la délégation d’Amnesty International avaient rarement – voire jamais – constaté de conditions de détention aussi effroyables. Le gouvernement centrafricain doit prendre sans délai des mesures visant à remédier à cette situation totalement inacceptable et s’acquitter des obligations qui lui incombent envers tous les détenus au titre du droit international relatif aux droits humains », a conclu Godfrey Byaruhanga.


Note d’information

Ce rapport se fonde sur la visite d’Amnesty International en République centrafricaine, en mai 2006. L’organisation avait reçu des informations selon lesquelles plusieurs personnes soupçonnées de soutenir des groupes armés opposés au gouvernement du président François Bozizé avaient été arrêtées et maintenues en détention sans inculpation. Ayant demandé à rencontrer les prisonniers, Amnesty International a ainsi été en mesure d’évaluer les conditions générales dans divers centres de détention du pays.

On pense que cette vague d’arrestations a été déclenchée par l’interpellation en février 2006 d’un ancien lieutenant de l’armée, Jean-Jacques Larmassoum, qui serait à la tête d’un groupe armé d’opposition, l’Armée pour la restauration de la république et de la démocratie. Ces arrestations reflètent le malaise général qui règne dans le pays depuis que le président Bozizé a remporté l’élection présidentielle en mai 2005.

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