RÉPUBLIQUE DÉMOCRATIQUE DU CONGO : 115 personnes menacées d’exécution imminente

Index AI : AFR 62/025/02

Amnesty International est vivement préoccupée par le sort de 115 personnes qui risquent une exécution imminente en République Démocratique du Congo (RDC) si elles sont condamnées pour leur rôle présumé dans l’assassinat du président Laurent Désiré Kabila en janvier 2001.

" Le président Joseph Kabila devrait démontrer son engagement personnel en faveur des droits humains en faisant clairement savoir qu’aucune condamnation à mort ne sera prononcée à l’issue du procès concernant cet assassinat ", a indiqué Amnesty International ce jeudi 12 décembre 2002 dans un nouveau document public intitulé Democratic Republic of Congo : From assassination to murder ? [République Démocratique du Congo. Répondre à l’assassinat par le meurtre ?]

Le procès qui se déroule devant la Cour d’ordre militaire (COM) semble être entré dans sa phase finale et l’instance chargée de juger cette affaire doit être dissoute le 18 décembre. Les accusés n’auront pas le droit de faire appel, même s’ils sont condamnés à la peine capitale. Dans le passé, des personnes ont été exécutées quelques heures, voire quelques minutes, après avoir été condamnées à la peine capitale par cette même Cour.

Au moins deux cents personnes ont été exécutées en RDC depuis 1997 après avoir été condamnées à mort par la Cour d’ordre militaire à l’issue de procès inéquitables. Parmi elles figuraient des enfants de quatorze ans et des civils aussi bien que des membres des services de sécurité. Certains ont été exécutés quelques minutes ou quelques heures seulement après le procès, ce qui implique très clairement qu’ils n’avaient pas eu le temps de demander une grâce présidentielle - seul recours possible des condamnés.

Le procès des personnes soupçonnées d’implication dans l’assassinat du défunt président de la RDC a débuté en mars 2002. De mai à septembre, aucun observateur indépendant n’a pu assister aux audiences. Aucun des accusés n’a bénéficié d’un délai adéquat pour préparer sa défense, et les accusés n’ont été autorisés à rencontrer leurs avocats qu’à partir du jour de l’ouverture du procès. De plus, le statut de la Cour d’ordre militaire ne répond pas aux normes internationales d’équité des procès et les juges et procureurs sont en général des membres des forces armées avec peu ou pas de formation juridique.

Parmi les accusés figurent des membres des forces armées et des services de sécurité ainsi que de nombreux civils. La plupart d’entre eux sont en détention depuis début 2001. Beaucoup auraient été victimes de mauvais traitements ou torturés pendant leur détention. Amnesty International n’est pas en mesure d’établir la culpabilité ou l’innocence des accusés, mais elle craint qu’un certain nombre des femmes accusées ne soient des prisonnières d’opinion, détenues uniquement parce qu’elles sont liées ou mariées à des personnes soupçonnées d’implication dans l’assassinat et qui n’ont pas encore été arrêtées.

" Tous les accusés devraient pouvoir bénéficier de leur droit à un procès équitable conforme aux normes internationales et devraient avoir le droit d’interjeter appel de leur condamnation ", a déclaré l’organisation de défense des droits humains.

Le 11 octobre, le ministère public a requis la peine capitale pour 115 des 135 accusés. Cette requête est intervenue, de façon inquiétante, après l’annonce officielle par le gouvernement de la RDC, le 23 septembre, de la levée du moratoire sur les exécutions. Cette décision allait à l’encontre d’un engagement pris personnellement par le président Joseph Kabila lors de son discours devant la Commission des droits de l’homme des Nations unies, en mars 2001 à Genève. Le président s’était alors engagé à maintenir le moratoire en vigueur. Selon les informations disponibles, aucune exécution n’a eu lieu depuis décembre 2000 sur le territoire contrôlé par le gouvernement en RDC.

Le 19 novembre, le gouvernement de la RDC a annoncé que la Cour d’ordre militaire serait abolie le 18 décembre 2002. Si Amnesty International se réjouit de cette abolition, elle craint cependant que les peines prononcées par ce même tribunal avant sa dissolution ne soient considérées comme valides et applicables, y compris les peines capitales prononcées dans le cadre du procès pour l’assassinat du président.

" Exécuter des gens ne servira qu’à renforcer la déshumanisation d’une société déjà profondément traumatisée par un conflit qui aurait coûté la vie à plus de trois millions de personnes ", a déclaré Amnesty International.

L’organisation de défense des droits humains s’oppose à la peine capitale en toutes circonstances, car il s’agit d’une violation du droit à la vie et du droit de toute personne à ne pas être soumis à des peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants.

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