Communiqué de presse

République tchèque. La Commission européenne agit contre la discrimination dans les écoles : une victoire pour les Roms

Bruxelles, le 25 septembre 2014 – Amnesty International a salué l’annonce de la Commission européenne, qui s’est engagée jeudi 25 septembre à user de ses pouvoirs afin de lancer une procédure d’infraction contre la République tchèque pour violation de la loi relative à la lutte contre la discrimination en vigueur au sein de l’Union européenne (UE).

« Depuis des années, Amnesty International recense les discriminations systémiques dont sont victimes les enfants roms dans les écoles tchèques. Jusqu’à présent, le gouvernement tchèque n’a pas pris de mesures efficaces en vue de faire face et de remédier à cette situation », a déclaré Nicolas J. Beger, directeur du Bureau des institutions européennes d’Amnesty International.

« En décidant de lancer une procédure d’infraction, la Commission adresse un message clair à la République tchèque et à tous les États membres : la discrimination systémique envers les Roms ne sera pas tolérée. »

La procédure pré-contentieuse permet à la Commission de demander au gouvernement tchèque de rendre des comptes et d’exercer des pressions publiques et politiques afin qu’il mette un terme à la discrimination systémique et illégale à l’égard des enfants roms dans les écoles tchèques.

Cette décision intervient un an et demi après qu’Amnesty International et d’autres organisations de la société civile ont demandé à la Commission d’engager une procédure d’infraction contre le gouvernement tchèque, afin qu’il s’attaque à la discrimination exercée à l’égard des enfants roms au sein du système éducatif. Amnesty International a présenté une pétition ayant recueilli près de 100 000 signatures en moins de trois mois pour inviter la Commission à se montrer plus ferme vis-à-vis des États membres de l’UE qui n’appliquent pas la loi relative à la lutte contre la discrimination visant à protéger les Roms. L’organisation s’appuie sur des éléments recueillis pendant 10 ans, qui attestent d’une discrimination généralisée et illégale à l’égard des enfants roms dans le système éducatif tchèque ; la ségrégation se traduit notamment par le placement dans des écoles destinées aux élèves souffrant de « handicaps mentaux légers », ou dans des écoles ou des classes réservées aux Roms qui offrent un niveau d’enseignement plus faible.

« L’éducation est un droit fondamental qui doit être garanti pour tous les enfants. La discrimination que constitue la ségrégation dans les écoles est illégale. Elle se traduit par un enseignement de qualité inférieure et limite les opportunités futures en termes d’emploi : les enfants roms sont pris au piège du cercle vicieux de la marginalisation et de l’exclusion », a déclaré Nicolas Beger.

Une étude menée en 2013 par l’Inspectorat académique tchèque (institution nationale chargée de veiller à ce que les établissements scolaires respectent la législation nationale) a dévoilé la forte surreprésentation des enfants roms dans les écoles pour élèves présentant des « handicaps mentaux légers ». Le suivi de 483 écoles accueillant au minimum cinq élèves présentant ce diagnostic a montré que 28,2 % d’entre eux étaient Roms. Or, les Roms représentent moins de 3 % de l’ensemble de la population. En 2012, le médiateur tchèque (chargé de surveiller et de garantir la mise en œuvre de la Loi relative à la lutte contre la discrimination) a qualifié cette situation de discriminatoire.

Les perspectives d’avenir pour les enfants roms qui passent par le système classique ne sont guère meilleures. Beaucoup sont placés dans des écoles et des classes qui dispensent un enseignement au rabais. En 2014, Amnesty International a recueilli de nouveaux éléments démontrant que les écoles classiques réservées aux Roms proposent des programmes éducatifs très semblables à ceux suivis dans les écoles pour élèves souffrant de « handicaps mentaux légers ».

« Aujourd’hui, la Commission s’est montrée digne de son rôle de " gardienne des traités de l’UE ", qui fait respecter le droit communautaire et interpelle les États membres bafouant les droits fondamentaux », a déclaré Nicolas Beger.

« Ses déclarations doivent être suivies de mesures rapides, concrètes et cohérentes en vue de demander à la République tchèque de rendre des comptes et de mettre fin à la discrimination. Elle protègera ainsi les générations présentes et futures de Roms en République tchèque, mais aussi à travers l’UE, où elles restent confrontées à une discrimination systématique. »

Complément d’information
La procédure d’infraction définie à l’article 258 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne dote la Commission d’un outil législatif efficace pour faire en sorte que les 28 États membres de l’UE respectent le droit communautaire. Si la Commission estime qu’un État membre a manqué à l’une des obligations qui lui incombent, elle peut saisir la Cour de justice de l’UE. Si la Cour statue que cet État membre a failli à l’une de ses obligations, elle lui ordonnera de prendre les mesures nécessaires.

La décision de lancer une procédure contre la République tchèque a été annoncée le 25 septembre à la suite d’une réunion du Collège des commissaires. La procédure pointe du doigt le non-respect par la République tchèque de l’article 21 (1) de la Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne, qui interdit toute discrimination fondée notamment sur la race ou les origines ethniques, et de la Directive sur l’égalité raciale(2000/43/EC (RED)), articles 2.2a, 2.2b, 2.3, 3.1.g, qui interdit toute discrimination fondée sur la race et l’origine ethnique en matière d’éducation.

La Commission va adresser un avis fondé sur son évaluation de la situation au gouvernement tchèque, qui dispose d’un certain délai pour présenter ses observations. Ensuite, elle se prononcera sur le fait que la République tchèque respecte ou non le droit communautaire. En cas d’infraction, la Commission peut saisir la Cour de justice de l’Union européenne.

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