Les recommandations rendues publiques par Amnesty International avant la Conférence de Bonn sur les changements climatiques, du 3 au 13 juin, où seront entamées les négociations devant se conclure à la COP à Bakou en novembre, appellent les parties à donner la priorité à des engagements sûrs et améliorés en faveur du financement de l’adaptation au changement climatique et de l’atténuation de ses effets, ainsi qu’à financer de manière adéquate le Fonds pour les pertes et les préjudices afin de permettre aux communautés et aux personnes touchées de se relever de dommages climatiques inévitables.
« La quantité et la qualité des financements climatiques disponibles à ce jour pour lutter contre l’intensification de la crise climatique sont terriblement insuffisantes. Il est indispensable que cela change, afin de maintenir le réchauffement climatique à 1,5 °C au-dessus des niveaux de l’ère préindustrielle. À mesure que le réchauffement climatique augmente, les besoins de celles et ceux qui sont en première ligne de cette crise vont se multiplier, et les préjudices et les coûts vont s’accentuer », a déclaré Ann Harrison, conseillère en matière de politique climatique à Amnesty International.
« Le "principe du pollueur payeur" doit s’appliquer, et pourtant les pays émetteurs de longue date de gaz à effet de serre ont à maintes reprises manqué à leurs engagements de financement existants. Les États doivent maintenant mettre à profit la réunion de Bonn pour changer de cap. »
Pour que les pays à faible revenu aient le moindre espoir de s’adapter au changement climatique, il est essentiel qu’ils puissent accéder à des financements suffisants, fiables et fondés sur des subventions de la part de pays à revenu élevé, ainsi que d’autres pays en mesure de contribuer, notamment les producteurs de combustibles fossiles à revenu élevé. Ces mêmes pays doivent également s’assurer qu’il existe une réserve de financement prévisible, qui ne creuse pas les dettes, afin de faire face de manière adéquate aux dommages et aux préjudices causés par le réchauffement climatique, et de soutenir une transition vers des économies sans carbone.
« Les droits humains doivent guider toutes les décisions relatives au climat sur le plan national et international »
Amnesty International a déclaré qu’il était essentiel de tenir et de renforcer l’engagement,pris lors de la COP de l’année dernière, d’« abandonner » progressivement les combustibles fossiles pour un engagement ferme à éliminer toute production et consommation de combustibles fossiles, afin de protéger les droits humains.
« Les droits humains doivent guider toutes les décisions relatives au climat sur le plan national et international. Cela revient à s’assurer que les organisations de la société civile, les représentant·e·s des peuples autochtones et tous les autres groupes marginalisés qui sont en première ligne face au changement climatique puissent véritablement prendre part à ces réunions, et que l’espace civique soit protégé », a déclaré Ann Harrison.
« Alors que les défenseur·e·s de l’environnement et les militant·e·s pour le climat ont été confrontés à une multiplication profondément inquiétante des menaces et des agressions dans le monde ces dernières années, nous demandons aux parties de convenir de mesures concrètes pour mieux les protéger. Il est par ailleurs essentiel que les droits des participant·e·s à Bonn et à Bakou soient pleinement protégés, notamment les droits de manifester pacifiquement et de s’exprimer librement. »
Les recommandations décrivent comment les participant·e·s à la conférence de Bonn doivent progresser vers un accord, qui devrait être scellé à la COP29, concernant l’amélioration d’un nouvel objectif collectif quantifié sur le financement climatique – assurant un financement beaucoup plus vaste et garanti aux pays à faible revenu pour l’adaptation au changement climatique et l’atténuation de ses effets. En 2009, des États à revenu élevé, pollueurs de longue date, avaient accepté de fournir 100 milliards de dollars de financements climatiques nouveaux et supplémentaires par an avant 2020, mais cette somme n’a été atteinte qu’en 2022 et est insuffisante pour répondre aux besoins actuels et futurs.
Les États doivent s’accorder sur la manière de tenir l’engagement à au moins doubler le financement de l’adaptation au changement climatique d’ici 2025, tout en reconnaissant que les besoins réels sont beaucoup plus importants et qu’il est nécessaire de revoir les objectifs à la hausse. Le financement de l’adaptation accuse un retard considérable par rapport aux engagements en matière d’atténuation, et cette lacune doit être comblée de toute urgence, car des personnes souffrent déjà dans le monde entier. Les investissements dans des infrastructures résistantes au changement climatique, par exemple, sont essentiels pour sauver des vies et des moyens de subsistance.
Fournir un financement adéquat pour le climat est une obligation pour certains États en vertu de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris
Les sources de financement pourraient provenir des quelque 480 milliards de dollars perdus chaque année par les États à cause de l’évasion fiscale à grande échelle et de mesures agressives d’évitement fiscal. Une autre énorme source de financement de la lutte contre le changement climatique pourrait provenir de la suppression des 7 000 milliards de dollars de subventions publiques et d’allégements fiscaux qui, selon les calculs du FMI [1] , sont offerts chaque année afin de soutenir l’industrie des combustibles fossiles.
Tous les financements pour le climat doivent être mis à disposition sous la forme de subventions, et non de prêts, et ne pas creuser l’endettement des États à faible revenu. Fournir un financement adéquat pour le climat est une obligation pour certains États en vertu de la Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et de l’Accord de Paris, et pour tous les États en mesure de le faire, au titre du principe de coopération et d’assistance internationales en vertu du droit international relatif aux droits humains.
Il est également essentiel que le Fonds pour les pertes et préjudices, destiné à aider les pays en développement à se relever de dommages climatiques tels que des tempêtes ou des inondations, soit rapidement et correctement financé avant la COP de cette année, ce qui lui permettra de devenir opérationnel et de pouvoir débourser des fonds dans l’année à venir.
Complément d’information
La Conférence de Bonn sur les changements climatiques se déroulera du 3 au 13 juin 2024 et la COP29 du 11 au 22 novembre 2024 à Bakou en Azerbaïdjan, ces deux événements relevant de la Convention-cadre des Nations Unies sur les changements climatiques. Amnesty International se mobilise pour une élimination rapide, équitable, financée et définitive des combustibles fossiles [2] et pour une transition vers les énergies renouvelables qui soit respectueuse des droits humains, ainsi que pour la protection de la liberté d’expression et des manifestations pacifiques en relation avec l’action climatique.