Risque accru d’expulsion forcée pour les Roms de Serbie

Amnesty International s’inquiète de ce que l’avant-projet de loi présenté par le gouvernement serbe sur le logement et l’entretien des bâtiments, s’il est adopté par le Parlement, pourrait bafouer les droits des personnes et des familles de communautés vulnérables exposées à l’expulsion.

Amnesty International s’inquiète de ce que l’avant-projet de loi présenté par le gouvernement serbe sur le logement et l’entretien des bâtiments, s’il est adopté par le Parlement, pourrait bafouer les droits des personnes et des familles de communautés vulnérables exposées à l’expulsion.

Ce projet de loi, qui s’inscrit dans le cadre de réformes essentielles sur le logement en Serbie, devrait être examiné sous peu lors d’une procédure accélérée. Il inclut des dispositions relatives à la conduite des autorités en matière d’expulsion, ce qu’exige précisément la Commission européenne et ce que prévoit le Plan d’action de la Serbie vers l’accession à l’Union européenne (UE). Amnesty International a salué l’initiative visant à adopter ce projet de loi.

Elle fait en effet campagne depuis 2010 en faveur d’une loi interdisant les expulsions forcées et apportant des protections adéquates contre ce type d’expulsions aux populations concernées. Depuis 2009, l’organisation a suivi et recueilli des informations sur l’expulsion forcée de campements informels à Belgrade de plus de 20 communautés, majoritairement roms – ce qui représente environ 3 000 personnes.

En octobre 2015, la vice-Première ministre a convié Amnesty International à livrer ses commentaires sur le chapitre du projet de loi portant sur la réglementation des expulsions forcées. Dans sa réponse, Amnesty International a fait un certain nombre de recommandations détaillées, préconisant notamment que le texte interdise clairement les expulsions forcées et garantisse que toute réinstallation faisant suite à une expulsion légale prévoit un logement décent, conformément au droit international et aux normes internationales, qui permette l’accès à des opportunités d’emploi.

Cependant, aucune de ces dispositions, ni aucune mesure de protection, n’est inscrite dans le projet actuel. S’il est adopté par le Parlement, le projet de loi, déjà approuvé par le gouvernement au terme d’une période de consultation, pourrait signifier que la Serbie ne protège pas les droits des personnes exposées aux expulsions forcées et bafoue donc ses obligations régionales et internationales. Au cours du débat parlementaire, il faut modifier le texte en ce sens, afin qu’il soit conforme à ces obligations.

Dans un courrier adressé à la vice-Première ministre Zorana Mihajlovi ?, Amnesty International a mis en avant ses préoccupations au sujet des dispositions relatives aux expulsions qui ne respectent pas les normes internationales interdisant les expulsions forcées et garantissant le droit à un logement décent sans discrimination.

Elle a exhorté le gouvernement à faire en sorte que la loi soit modifiée afin de prévoir une procédure régulière et des garanties appropriées, notamment une consultation véritable et un préavis suffisant, tout au long de la procédure d’expulsion – avant, pendant et après. Ces normes sont définies dans les Principes de base et directives sur les expulsions forcées et les déplacements liés au développement, et figurent également dans des traités ratifiés par la Serbie.

Le projet de loi omet des points cruciaux, notamment le fait que les expulsions forcées devraient être rendues illégales et que personne ne devrait, suite à une expulsion, se retrouver sans toit ni être victime d’une violation d’autres droits humains.

En outre, il ne mentionne pas les évaluations qui devraient être effectuées avant de prendre la décision d’expulser, y compris l’obligation d’envisager toutes les autres solutions possibles et de les explorer en consultant dûment les personnes touchées. Par ailleurs, il ne fournit pas de dispositions claires sur la période de préavis requise avant une expulsion, ni sur la nécessité d’une solution satisfaisante de relogement pour les personnes concernées par l’expulsion et le relogement.

Enfin, concernant la solution de relogement décent, le projet de loi actuel omet des critères clés requis par le droit international – notamment le fait de garantir que les communautés relogées aient accès à des possibilités d’emploi, des services de santé, des écoles, des crèches et d’autres services sociaux.

Le rapporteur spécial de l’ONU sur le droit à un logement convenable a encouragé la Serbie à adopter une loi interdisant les expulsions forcées, tout comme le commissaire aux droits de l’homme du Conseil de l’Europe et le Comité consultatif sur la Convention cadre pour la protection des minorités nationales.

En vue d’être à la hauteur des obligations internationales de la Serbie, ses législateurs doivent veiller à ce que le projet de loi adopté au Parlement remplisse les critères énoncés dans le droit international et fournisse des garanties précises afin que toutes les personnes touchées par une expulsion puissent exercer leur droit au logement, sans discrimination.

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