Royaume-Uni, Le régime de surveillance de masse a bafoué les droits humains

Royaume-Uni Surveillance de masse

Dans une décision qui fera date, la Grande Chambre de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a statué le 25 mai 2021 que les pouvoirs du gouvernement britannique en matière d’interception massive des communications « ne renfermaient pas de garanties suffisantes "de bout en bout " pour offrir une protection adéquate et efficace contre l’arbitraire et le risque d’abus », violant ainsi les droits à la vie privée et à la liberté d’expression.

La Cour européenne des droits de l’homme a été saisie par Amnesty International, Liberty, Privacy International et plusieurs organisations de défense des droits, à la suite des révélations du lanceur d’alerte Edward Snowden en 2013, selon lesquelles les services de renseignements britanniques, le Quartier général des communications du gouvernement britannique (GCHQ), interceptaient et traitaient secrètement les communications privées de millions de personnes chaque jour.

« Il faut en finir avec la collecte et le traitement sans restriction des communications privées de millions de personnes. L’arrêt rendu ce jour marque une avancée importante dans la condamnation de la surveillance décidée selon le bon vouloir du gouvernement », a déclaré Kate Logan, conseillère juridique principale à Amnesty International.

« Il est à noter que la Cour a clairement établi que les États ne peuvent pas déléguer le pouvoir d’autoriser la surveillance à l’exécutif, ni traiter des centaines de millions de communications privées de citoyens comme un produit en libre accès. »

« L’arrêt rendu ce jour marque une avancée importante dans la condamnation de la surveillance décidée selon le bon vouloir du gouvernement »

La Grande Chambre a condamné ce 25 mai l’absence d’autorisation indépendante pour délivrer un mandat d’interception massive, les lacunes au niveau des informations requises dans les demandes d’interception, l’absence d’autorisation adéquate quant à la sélection des communications et le manque de contrôle ne permettant pas d’apporter des garanties adéquates contre les abus.

Les révélations de Snowden

Ce jugement, rendu par la plus haute instance judiciaire de la région du Conseil de l’Europe qui regroupe 47 États, est l’aboutissement de huit années de révélations et d’actions en justice intentées par une coalition d’organisations de défense des droits.

En 2013, Edward Snowden a révélé que le GCHQ britannique (Quartier général des communications gouvernementales) menait secrètement des opérations d’interception des données concernant des millions de communications privées de personnes, même lorsque celles-ci ne présentaient manifestement aucun intérêt en matière de renseignement (programme TEMPORA).

Les informations recueillies et stockées par le gouvernement peuvent dévoiler les aspects les plus intimes de la vie privée d’une personne – où elle va, avec qui elle est en contact, quels sites Internet elle visite et quand.

En 2014, l’Investigatory Powers Tribunal (IPT), la très secrète juridiction britannique chargée d’examiner les plaintes contre le GCHQ, le MI5 (services de contre-espionnage) et le MI6 (services de renseignement), a conclu que ces pratiques pouvaient en principe être conformes aux obligations du Royaume-Uni en matière de droits humains. Cette décision a par la suite été contestée devant la Cour européenne des droits de l’homme, qui a statué partiellement contre le Royaume-Uni en 2018. Cependant, ce jugement n’allait pas assez loin et la coalition a porté l’affaire devant la Grande Chambre.

Au cours de cette procédure, l’Investigatory Powers Tribunal avait estimé que les services de renseignement britanniques avaient illégalement espionné les communications d’Amnesty International et du Legal Resources Centre d’Afrique du Sud – et que le partage d’informations des services de renseignement britanniques avec les États-Unis, qui était régi par des dispositions juridiques secrètes, était illégal jusqu’à sa révélation durant la procédure.

Parties à l’affaire

Cette affaire est l’aboutissement de trois recours en justice distincts engagés par les organisations et personnes suivantes : American Civil Liberties Union (ACLU), Amnesty International, Bytes for All, Canadian Civil Liberties Association, Initiative égyptienne pour les droits de la personne, Union hongroise pour les libertés civiles, Irish Council for Civil Liberties, Legal Resources Centre, Liberty et Privacy International ; Big Brother Watch, Open Rights Group, English PEN et Constanze Kurz ; le Bureau of Investigative Journalism et Alice Ross.

Amnesty International et neuf autres demandeurs étaient représentés par Ben Jaffey et Gayatri Sarathy du cabinet Blackstone, et David Heaton du cabinet Brick Court.

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