Russie. Il faut libérer des chanteuses punks arrêtées après un coup d’éclat dans une église

Amnesty International demande la libération immédiate et sans condition de trois jeunes femmes, arrêtées par les autorités russes car elles sont accusées d’être les membres du groupe punk Pussy Riot ayant entonné une chanson engagée dans la cathédrale du Christ-sauveur, à Moscou le 21 février.

Plusieurs membres du groupe punk Pussy Riot, la tête couverte d’une cagoule, ont chanté un morceau engagé intitulé « Vierge Marie, sauve-nous de Poutine » dans la cathédrale. Les autorités russes ont ensuite appréhendé Maria Alekhina et Nadejda Tolokonnikova le 4 mars, puis Ekaterina Samoussevitch le 15, affirmant qu’il s’agissait des chanteuses masquées. Bien que les trois femmes reconnaissent appartenir au collectif Pussy Riot, elles nient avoir participé à cette action de protestation particulière dans la cathédrale.

Elles sont toutes trois actuellement en détention provisoire jusqu’au 25 avril. Elles ont été accusées de houliganisme, une infraction passible d’une peine maximale de sept ans d’emprisonnement aux termes du Code pénal russe

Dans la chanson, Pussy Riot critique le dévouement et le soutien témoigné par certains représentants de l’Église orthodoxe au Premier ministre, Vladimir Poutine. Les paroles demandent également à la vierge Marie de devenir féministe et de bannir Vladimir Poutine.

Même si les trois femmes arrêtées avaient pris part à cette action de protestation, la sévérité avec laquelle les autorités russes ont réagi – en procédant à des arrestations se fondant sur l’accusation grave de houliganisme – constituerait une réponse injuste à l’expression pacifique – bien que choquante pour beaucoup – de leurs convictions politiques. Elles seraient alors considérées comme des prisonnières d’opinion.

La Cour européenne des droits de l’homme a estimé dans plusieurs décisions que la liberté d’expression valait non seulement pour les idées inoffensives, mais aussi « pour celles qui heurtent, choquent ou inquiètent l’État ou une fraction quelconque de la population ».

Même si l’action en question a été orchestrée pour choquer et s’il était entendu qu’elle risquait d’offenser, les militantes ont quitté la cathédrale quand cela leur a été demandé et n’ont causé aucune dégradation. La représentation n’a duré que quelques minutes en tout et n’a occasionné qu’une perturbation mineure pour ceux qui utilisaient la cathédrale dans d’autres buts, religieux notamment.

Le contexte politique plus large entourant les manifestants anti-Poutine à l’époque – et le contenu antireligieux et anti-Poutine du message de ces militantes (qui n’est pas lui-même punissable) – a clairement et illégalement été pris en compte dans les charges retenues contre elles.

Un montage vidéo de la chanson, disponible sur Internet, a suscité un vaste débat à propos de cette action de protestation. Le porte-parole du président élu, Vladimir Poutine, a qualifié cet acte de méprisable et annoncé qu’il serait suivi « de toutes les conséquences qui s’imposent ».

Si un représentant de l’Église orthodoxe a dans un premier temps appelé à la clémence en faveur des détenues, d’autres représentants de l’Église ont demandé dans des déclarations ultérieures qu’elles soient sévèrement punies et poursuivies pour incitation à la haine pour motifs religieux. Les proches de ces femmes auraient par ailleurs reçu des menaces de mort anonymes.

Amnesty International craint que de telles déclarations ne renforcent les pressions publiques et politiques en relation avec ce cas. Au lieu de poursuivre les membres de Pussy Riot pour leurs opinions politiques et leurs critiques à l’égard du gouvernement russe et de certains responsables religieux, les autorités russes doivent reconnaître que leur action de protestation relevait du droit à la liberté d’expression, qui est garanti par le droit international relatif aux droits humains, abandonner les charges de houliganisme retenues contre Maria Alekhina, Nadejda Tolokonnikova et Ekaterina Samoussevitch, et les relâcher immédiatement et sans condition.

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