RUSSIE - La violence contre les femmes ne doit pas être ignorée

Index AI : EUR 46/059/2005

« Des fois, il me battait et je ne savais même pas pourquoi. » Oksana
« Beaucoup plus de femmes demanderaient de l’aide aux autorités si celles-ci nous aidaient vraiment. Une nuit, j’ai appelé la police 16 fois, mais elle n’est jamais venue. » Liliana

La violence contre les femmes dans la Fédération de Russie est l’une des formes les plus répandues d’atteintes aux droits humains, même si elle reste cachée. Des recherches indépendantes menées récemment ont montré que 70 % des femmes mariées avaient déjà subi des violences de la part de leur mari sous une forme ou sous une autre, a déclaré Amnesty International ce mercredi 14 décembre 2005, à l’occasion du lancement de son rapport intitulé Russian Federation : Nowhere to turn to. Violence against women in the family.

« La violence contre les femmes au sein du foyer n’est pas un problème d’ordre privé et ne saurait en aucun cas être justifiée. C’est une atteinte aux droits humains que les États ont l’obligation de combattre aux termes du droit international », souligne Nicola Duckworth, directrice du programme Europe et Asie centrale d’Amnesty International.

Dans ce nouveau rapport, des femmes victimes de violence dans leur famille témoignent de leur calvaire - coups réguliers, viols conjugaux, harcèlement, traque, tentatives de meurtre - et de la difficulté qu’elles ont à trouver de l’aide et un soutien. Si ces femmes ont accepté de parler de leur expérience, beaucoup refusent encore que leur identité soit révélée, par crainte des représailles de leur partenaire, mais aussi de l’ostracisme de la société.

Amnesty International est préoccupée par l’extrême indulgence qui prévaut à l’égard de la violence domestique contre les femmes en Fédération de Russie. Beaucoup cherchent à l’expliquer et à la justifier - les policiers, les juges et souvent les femmes elles-mêmes citent l’alcool, la pauvreté ou les problèmes de logement comme étant les « causes » de la violence au sein de la famille, et rares sont ceux, y compris parmi ses victimes, qui la considèrent comme un crime sanctionné par la loi.

« La violence contre les femmes au sein de la famille prive les femmes de certains de leurs droits les plus fondamentaux, tels que les droits à la vie, à l’intégrité physique et mentale, à la liberté et la sécurité de sa personne et à la liberté d’expression. Quel que soit le contexte individuel, l’État ne peut pas refuser sa protection à ces femmes et doit prendre des mesures efficaces pour prévenir la violence domestique, en protéger les femmes et en punir les auteurs, ajoute Nicola Duckworth.

« Il ne suffit pas de demander des comptes à ceux qui commettent des actes de violences au sein de leur famille. Un État qui tolère cette violence a aussi sa part de responsabilité et doit en répondre. »

Dans certaines régions et certaines villes, les autorités, souvent sous la pression d’organisations non gouvernementales, ont mis en place des centres d’accueil, des services d’assistance téléphonique et des centres de crise pour les femmes, mais en l’absence de politique systématique dans toute la Fédération de Russie, il est difficile pour les femmes victimes de violences conjugales de trouver une véritable protection et un soutien efficace.

Or, Amnesty International est préoccupée par le manque apparent, au niveau fédéral, de volonté politique de mettre un terme à la violence domestique contre les femmes. Beaucoup de centres d’aide et d’organisations de femmes sont menacés de disparition par la suppression des financements et de l’aide du gouvernement.

« Avec quelque neuf millions d’habitants, Moscou est la plus grande ville de la Fédération de Russie. Or, elle ne dispose d’aucun centre d’accueil pour les femmes victimes de violence. Même un petit centre permettrait de faire passer le message que les autorités ont la volonté de protéger les femmes contre la violence au sein du foyer », conclut Nicola Duckworth

La Fédération de Russie est partie à des traités internationaux et régionaux relatifs aux droits humains qui requièrent de son gouvernement qu’il protège, respecte et fasse appliquer les droits fondamentaux de toutes les personnes relevant de sa juridiction, y compris des femmes victimes de violence domestique.

Amnesty International appelle les autorités russes à mettre en place des mécanismes efficaces, judiciaires et non judiciaires, pour combattre la violence contre les femmes au sein de la famille. Elle les engage notamment, pour commencer, à appliquer les recommandations du Comité des Nations Unies pour l’élimination de la discrimination à l’égard des femmes.

Complément d’information

Le rapport Russian Federation : Nowhere to turn to. Violence against women in the family (index AI : EUR 46/056/2005, est disponible sur le site d’AIBF à l’adresse URL :
http://www.amnestyinternational.be/doc/IMG/pdf/russia20051214_svaw_report.pdf).

Ce rapport s’appuie sur des recherches menées dans plusieurs régions - Carélie, Saint-Pétersbourg, Moscou et Altaï - où Amnesty International a pu constater l’adoption de quelques mesures positives pour améliorer la protection des femmes victimes de violence au sein de la famille et les mécanismes de soutien.

Ce rapport se fonde principalement sur des recherches menées par Amnesty International en décembre 2004 et début 2005, et s’inscrit dans le cadre de sa campagne mondiale contre la violence à l’égard des femmes.

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