RWANDA : De plus en plus de prisonniers d’opinion

Index AI : AFR 47/002/02

COMMUNIQUÉ DE PRESSE

Amnesty International a exhorté aujourd’hui le gouvernement du Rwanda à libérer sans condition et dans les plus brefs délais vingt personnes appréhendées au cours de ces derniers mois pour des raisons apparemment liées à leurs relations avec Pasteur Bizimungu, ancien président du pays et personnalité politique d’opposition, actuellement incarcéré. Ces relations sont entièrement légitimes et n’ont donné lieu à aucun acte violent. L’organisation demande également la libération inconditionnelle de Pasteur Bizimungu et de son allié politique Charles Ntakirutinka, qui sont des prisonniers d’opinion.

Amnesty International considère que toutes ces personnes sont des prisonniers d’opinion, incarcérés uniquement en raison de leur appartenance politique réelle ou présumée.

Les 20 détenus, femmes et hommes, parmi lesquels figurent des agriculteurs, des enseignants, des comptables, des fonctionnaires et des commerçants, sont soupçonnés d’appartenir au parti politique interdit de Pasteur Bizimungu, le Parti démocratique pour le renouveau –Ubuyanja (PDR-Ubuyanja).

Amnesty International craint que ces 20 détenus ne soient en butte à des actes d’intimidation ou à des mauvais traitements que les autorités leur infligeraient pour les forcer à faire des déclarations compromettantes à l’égard de Pasteur Bizimungu ou de le Mouvement démocratique républicain (MDR), ses alliés politiques.

Pasteur Bizimungu, ancien président du Rwanda sous le régime actuel, dirigé par le Front patriotique rwandais (FPR), et Charles Ntakirutinka, ancien ministre des Travaux publics, ont été arrêtés respectivement le 19 et le 20 avril 2002, après avoir tenté de créer le PDR-Ubuyanja en mai 2001. Les deux hommes ont été maintenus en détention provisoire à la prison centrale de Kigali depuis leur arrestation, pour atteinte à la sûreté de l’État, chef d’inculpation qui entraîne une peine maximum de dix ans d’emprisonnement, et association de malfaiteurs. Pasteur Bizimungu est également inculpé de possession illégale d’une arme à feu.

Aucun élément de preuve convaincant n’a été invoqué pour étayer ces chefs d’inculpation ; Amnesty International pense que ces deux hommes doivent être remis en liberté dans les plus brefs délais, que toutes les poursuites engagées contre eux doivent être abandonnées, et qu’ils doivent être autorisés à exercer sans entraves leur droit à la liberté d’expression et d’association.

Paul Kagamé, président du Rwanda, a affirmé à de nombreuses reprises que son gouvernement était disposé à respecter la liberté d’expression et le pluralisme politique, mais qu’il ne tolèrerait pas ceux qui, aux yeux de ce gouvernement, encouragent les attitudes sectaires ou la division au sein du peuple rwandais.

Néanmoins, la liste de ceux que son gouvernement refuse de tolérer inclut aujourd’hui de nombreuses catégories de la société rwandaise, parmi lesquelles on trouve les journalistes indépendants, les partisans de la paix et de la réconciliation, et tous ceux qui cherchent à exprimer un point de vue politique différent en faveur de la paix.

Amnesty International redoute que les mesures énergiques prises par le gouvernement contre l’opposition politique pacifique ne créent un contexte dangereux, qui pourrait favoriser le développement ultérieur de la violence politique. " En cherchant à empêcher l’expression légitime de points de vue critiques ou dissidents, le gouvernement du FPR risque de susciter les divisions qu’il assure justement vouloir éviter. De ce fait, le Rwanda connaît un climat de peur de plus en plus général ",a ajouté l’organisation.

Rappel des faits

Voici la liste des personnes qui seraient détenues : (originaires de Gisenyi) Agnès Bazubafite, Jean-Claude Nshimyumukiza, Obed Nsengiyumva, Jean-Damascène Kazimanyi, Bareberaho, Mwunguzi, Bazimenyera, Evariste Ntakirutimana, Aloys Bizimana, Suzanne Mukabigega, Ndisebuye ; (originaires de Kigali) Philémon Munyaneza, Charles Nshimyumukiza, Grégoire Uzabakiriho, Jean-de-Dieu Nyamucahakomeye, Valens Munyaneza, Joseph Gasasira, Emmanuel Ngayaberura, Damascène Ndahayo, Damascène Nsengimana.

Le PDR-Ubuyanja a été interdit par le gouvernement en juin 2001. Ses fondateurs ont été harcelés à maintes reprises par les autorités. Le 26 décembre 2001, un des fondateurs du parti, Gratien Munyarubuga, a été tué par balle à Kigali par des agresseurs non identifiés, soupçonnés d’être des agents du gouvernement.

Au nombre de ceux qui ont été placés en détention, intimidés ou contraints à l’exil par le gouvernement au cours de ces derniers mois, figurent des collaborateurs de l’Association Modeste et Innocent (AMI), une organisation non gouvernementale qui œuvre en faveur de la paix, des membres d’un parti d’opposition légal, le Mouvement démocratique républicain (MDR), et plusieurs reporters de la presse écrite. À une exception près, le journalisme d’information indépendant n’existe plus au Rwanda.

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